« Nous croyons que les agents non titulaires de l'État et des collectivités locales constituent une troisième catégorie de travailleurs, demeurée à l'écart des deux grands courants législatifs qui ont fait progresser et les garanties des fonctionnaires, et la protection des salariés. On peut alors déplorer que la situation persiste aujourd'hui et que les employeurs de ces travailleurs soient des collectivités publiques » telles est la définition que Mme Grevisse, commissaire du gouvernement, donne du statut d'agent public, en soulignant le vide législatif qui entoure la protection de leur emploi.
Le 27 janvier 1989, le Conseil d'État se prononce dans l'arrêt « Centre Hospitalier de Rambouillet » sur la question de la possibilité de licenciement pour faute d'un agent de droit public en état de grossesse.
Le 11 janvier 1985, une femme enceinte travaillant dans un centre hospitalier est prévenue par son chef de service que des fautes professionnelles lui sont reprochées, mais également qu'une sanction allait être demandée à son encontre. Son licenciement pour faute est prononcé le 29 janvier 1985, sans faire état de sa situation de grossesse.
Dans un jugement du 4 octobre 1985, le tribunal administratif de Versailles annule la décision par laquelle le directeur de l'établissement public licencie la femme enceinte, au motif d'un défaut de motivation de l'employeur tel que le prévoit l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979. De plus, le tribunal administratif considère que le directeur du centre hospitalier a commis une faute en licenciant une employée du service public en état de grossesse.
[...] II - LA RECONNAISSANCE D'UN PRINCIPE GENERAL DU DROIT DE SECONDE GENERATION Le principe général du droit interdisant le licenciement des agents de droit public en situation de grossesse date de 1973 il sert de fondement à l'arrêt du 27 janvier 1989, qui vient le nuancer en lui ajoutant une exception Le principe du non-licenciement des femmes enceintes Le statut de la fonction publique prévoit très peu de cas de licenciement. Le principe général de non-licenciement des agents de droit public en état de grossesse est affirmé dans l'arrêt Dame Peynet de 1973. En l'espèce, l'agent contractuel de service public est licencié alors qu'elle se trouvait état de grossesse. A l'époque, le statut des emplois contractuels n'obéissait pas à des règles juridiques aussi précises. Un texte prévoyait leur rémunération et leurs congésmais il n'existait aucune protection pour les femmes enceintes. [...]
[...] Toutefois, le Conseil d'État annule la décision du juge administratif. Celui-ci estime que le licenciement est motivé. En effet, avant d'être licenciée l'employée a été avertie que des sanctions pouvaient être prises à son encontre en raison des fautes graves qui lui étaient reprochées. Le Conseil d'État considère que la décision du directeur du centre hospitalier se justifie légalement, au motif des fautes qui ont été reprochées à l'employée : Mme Carluer a fait preuve, dans l'exécution de son travail, de mauvaise volonté, de négligences, et d'insubordination ; qu'eu égard à la gravité des fautes ainsi commises, qui sont sans rapport avec l'état de grossesse dans lequel Mme Carluer se trouvait, le directeur du centre hospitalier de Rambouillet a pu prendre légalement la décision de licencier l'intéressée Ainsi, le Conseil d'État établit des principes généraux du droit (PGD) pour défendre certaines valeurs. [...]
[...] En l'espèce, la requérante est une femme employée dans un centre hospitalier. Elle est donc considérée comme un agent contractuel de droit public, et de ce fait, cette dernière dépend, dans le cadre du litige, du tribunal administratif. L'appréciation de la motivation du licenciement par le juge administratif L'employée du service public est licenciée pour faute grave alors que celle- ci se trouve en état de grossesse. Saisi, le tribunal administratif doit contrôler si le licenciement est suffisamment motivé, et vérifier que l'état de grossesse de la requérante est étranger à ce licenciement. [...]
[...] Dans l'arrêt du 27 janvier 1989, l'employée licenciée invoque la jurisprudence antérieure du Conseil d'État, celle de l'arrêt dame Peynet de 1973. Les faits sont assez simples, et a priori à peu près similaires, puisqu'il s'agit dans les deux cas d'une employée dans un centre hospitalier, licenciée en cours de grossesse. Le Conseil d'État est cependant confronté en 1989 à une deuxième question, celle de l'employée enceinte licenciée pour faute grave. Une dérogation accordée au principe de l'irrégularité du licenciement des femmes enceintes dans le service public basée sur la notion d'équité Le Conseil d'État prononce le 27 janvier 1989 un rejet face à l'annulation par le tribunal administratif de la décision de licenciement de l'employée du centre Hospitalier de Rambouillet. [...]
[...] En effet, au travers de cette décision, le Conseil d'Etat, vient greffer un second principe général du droit, en ce qui concerne le licenciement des agents de droit public en situation de grossesse, au principe formulé en 1973 dans l'arrêt Dame Peynet Le juge précise que cette interdiction vaut sauf faute grave de l'agent sans rapport avec l'état de grossesse Les fautes reprochées en l'espèce étaient le comportement de l'employée qui faisait preuve de mauvaise volonté, de négligences et d'insubordination Ce second principe, ou plutôt ce principe dérogatoire au principe général du droit concernant le non-licenciement des femmes enceintes, semble logique en matière d'équité. La doctrine ne le remet visiblement pas en cause ; il serait en effet absurde que le principe général du droit protégeant les employées enceintes, et ce, sans réserve, puisse leur permettre d'accéder à un statut tel qu'une faute grave ne puisse pas permettre leur licenciement, et ainsi d'agir de manière tout à fait contraire à l'équité. [...]
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