L'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 10 mars 2004 s'inscrit dans la volonté de la Haute juridiction de protéger le salarié au cours de la période d'essai en instituant un nouveau principe concernant la rupture de celle-ci lorsque l'employeur invoque un motif disciplinaire à l'appui de la rupture.
Un fonctionnaire a été placé en position de détachement auprès d'une association. Son contrat de travail, à durée indéterminée, était régi par une convention collective instituant une période d'essai. L'association a mis fin au contrat pour diverses fautes par lettre.
Le Conseil de prud'hommes, saisi par le salarié, considère que la rupture était justifiée pour faute grave mais condamne l'association à payer des dommages et intérêts pour non respect de la procédure disciplinaire.
La Cour d'appel (CA) confirme cette décision.
L'association forme un pourvoi en cassation et argue que la rupture pour faute survenant au cours de la période d'essai n'est pas soumise à la procédure disciplinaire en se fondant sur l'article L.122-4 du code du travail.
L'employeur qui invoque un motif disciplinaire pour rompre la période d'essai est-il tenu de suivre la procédure s'y attachant ?
La Cour de cassation rejette le pourvoi et pose le principe selon lequel si l'employeur peut sans motif et sans formalité rompre la période d'essai, il doit, lorsqu'il invoque un motif disciplinaire, respecter la procédure disciplinaire.
En l'espèce, l'employeur avait procédé à la remise à disposition de la salariée pour faute au cours de la période d'essai sans pour autant avoir convoqué celle-ci à un entretien préalable exigé au titre de l'article L.122-41 du code du travail.
Ici, la Cour de cassation rappelle qu'en principe, la période d'essai peut être rompue discrétionnairement et sans motif (I) mais encadre cette rupture dans l'hypothèse où l'employeur a recours à un motif disciplinaire (II).
[...] Allant plus loin encore, la CA de Caen avait imposé dans un arrêt daté du 27 février 1997 le suivi de la procédure disciplinaire en cas de congédiement pour un motif disciplinaire. Les juges du fond avaient en effet considéré que dès lors que l'employeur s'est délibérément placé sur le terrain disciplinaire, la rupture constituant une sanction, l'employeur doit respecter la procédure prévue à l'article L.122-41 du Code du travail, ce qu'il n'a pas fait Cette décision est conforme au point de vue adopté par la Cour de cassation : l'employeur s'est ici placé sur le terrain disciplinaire alors qu'il aurait pu se contenter de rester sur le terrain de la période d'essai Cette décision n'est pas sans rappeler celle d'un salarié sous contrat de travail à durée déterminée dont l'employeur envisage la rupture anticipée. [...]
[...] Du silence des textes on pourrait déduire que la procédure disciplinaire peut être mise en œuvre à tout moment du contrat de travail, même pendant la phase d'essai. De plus, la question n'est pas nouvelle, tout du moins concernant l'administration, puisque dans une circulaire DRT 12 /1989 du 4 octobre 1989 il apparaît que l'employeur qui rompt le contrat de travail pendant la période d'essai pour motif disciplinaire doit respecter le délai de notification applicable au régime de la sanction Dès lors, rien dans les textes ne permet de refuser l'application du droit disciplinaire à la période d'essai. [...]
[...] Alors qu'en cas de rupture de la période d'essai pour motif non disciplinaire, celui-ci apprécie seul l'opportunité de la rupture d'où il en résulte qu'en ce cas le rôle des tribunaux se limite à l'arbitrage du différend. Le contrôle du juge portera d'abord sur la régularité de la procédure et sur l'existence de la faute et donc par suite sur les motifs fournis par l'employeur pour justifier la rupture, alors que ceux-ci n'ont, en principe, pas à être indiqués. Ce contrôle portera enfin sur la licéité de la sanction qui s'entend de sa prévisibilité et de sa proportionnalité. [...]
[...] Carbonnier, il n'est plus possible de voir dans le congédiement le fonctionnement normal du contrat à l'essai : ce n'est plus que la rupture d'un contrat de travail ordinaire Il ressort de cette décision que la Cour de cassation distingue l'exercice du pouvoir de direction de celui du pouvoir disciplinaire. L'appréciation des compétences professionnelles se rattache au pouvoir de direction et sur ce terrain, la période d'essai conserve sa spécificité et la liberté de rupture de l'employeur est préservée. Mais dès lors que l'employeur motive sa rupture par un agissement du salarié considéré par lui comme fautif il exerce son pouvoir disciplinaire et la mesure relève du droit commun disciplinaire d'où le devoir pour lui de respecter la procédure s'y attachant, obligation qui sera désormais contrôlée par les juges du fond et la Cour de cassation. [...]
[...] L'employeur qui invoque un motif disciplinaire pour rompre la période d'essai est-il tenu de suivre la procédure s'y attachant ? La Cour de cassation rejette le pourvoi et pose le principe selon lequel si l'employeur peut sans motif et sans formalité rompre la période d'essai, il doit, lorsqu'il invoque un motif disciplinaire, respecter la procédure disciplinaire. En l'espèce, l'employeur avait procédé à la remise à disposition de la salariée pour faute au cours de la période d'essai sans pour autant avoir convoqué celle-ci à un entretien préalable exigé au titre de l'article L.122-41 du code du travail. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture