L'employeur est responsable de la bonne marche de l'entreprise. C'est à lui qu'il revient de prendre les décisions en matière de gestion et il pourra être tenu responsable de la faillite de l'entreprise s'il ne prend pas les bonnes décisions. En contre partie de cette responsabilité, la loi confie à l'employeur le soin de diriger son entreprise comme il l'entend. Dès lors, c'est à lui que revient la tâche d'organiser le travail et la discipline dans l'entreprise.
Tout comme il est libre de qualifier le comportement de faute, l'employeur est libre de choisir la sanction. Il dispose d'un pouvoir très étendu dans ce domaine, mais il reste confronté tout de même à des limitations légales, que l'arrêt de la Chambre Sociale du 02 décembre 1992 semble illustrer.
En l'espèce, M. Denis un contrôleur de route au service de la SNCF, a omis d'effectuer son travail de contrôle et d'encaissement des amendes forfaitaires ainsi que du prix de transport dû par les voyageurs ayant pris le train à partir de gares dépourvues de guichet. Le 02 mai 1988, son employeur lui a informé par courrier, qu'il ferait l'objet d'une réduction de prime de 10% de la prime de travail du mois d'avril pour n'avoir effectué aucune perception au cours du mois de mars et d'avril 1988. M. Denis assigne son employeur aux motifs que la réduction de la prime instituant un complément de rémunération constituait une sanction pécuniaire, interdite par la loi comme le dispose l'article L122-42 du code du travail.
La Cour d'appel déboute M. Denis de sa demande d'annulation de cette mesure, et retient qu'elle ne constituait pas une sanction pécuniaire, dès lors que l'employeur, en instituant une prime excédant le minimum obligatoire, a la faculté de prévoir la réduction de celle-ci en cas de défaillance dans le travail du salarié, et qu'il peut moduler ce complément de rémunération.
Mais la qualification de comportement fautif d'un salarié par l'employeur peut-il justifier une réduction de prime prévue par le règlement intérieur d'une entreprise ?
L'intérêt de cette question est de pouvoir démontrer que l'employeur dispose d'un large pouvoir en matière de droit disciplinaire, mais qui est tout de même limité par des barrières légales et jurisprudentielles.
La Cour de Cassation estime que la réduction de la prime avait été prise en raison de faits considérés comme fautifs par l'employeur, et la sanction ne pouvait pas constituer en une réduction de prime, considérée alors comme une sanction pécuniaire prohibée par l'article L122-40 du code du travail, et ce même si elle découlait de l'application du règlement intérieur.
Ainsi, il convient de voir tout d'abord l'appréciation du comportement fautif de l'employeur, puis le pouvoir de sanction de celui-ci.
[...] Ensuite, si la suppression de prime intervient concomitamment avec une sanction disciplinaire, la suppression de prime revêt donc un caractère disciplinaire et est donc interdite. La Cour de Cassation casse logiquement l'arrêt rendu par la Cour d'Appel qui déboute M. Denis de sa demande d'annulation de la mesure qui réduit sa prime complémentaire de rémunération. En ce qui concerne les dispositions de l'article L122-42, la sanction du non-respect de l'interdiction de sanction pécuniaire est une amende de 3750 et en cas de récidive d'une amende de 7500€. [...]
[...] Puis prise par l'employeur le pouvoir de prononcer la sanction appartient donc à l'employeur, et à toute personne à qui il a délégué cette fonction. Tout comme il est libre de qualifier le comportement de faute, l'employeur est libre de choisir la sanction. Aucun contrôle a priori ne s'exerce sur la décision qu'il prend. La jurisprudence considère que l'employeur, en tant que responsable de la bonne marche de l'entreprise, est seul juge de l'exercice de son pouvoir disciplinaire. Dès lors, il semble logique de lui confier le pouvoir de sanctionner les éventuelles atteintes à cette discipline. [...]
[...] En pratique, la frontière entre les sanctions pécuniaires interdites et les diminutions de rémunération licites est parfois difficile à tracer. Par exemple seules les sanctions pécuniaires directes sont interdites, c'est-à-dire par exemple les diminutions de rémunération qui sont la conséquence directe de la faute commise par le salarié. En revanche, les sanctions pécuniaires indirectes sont licites, c'est-à-dire par exemple une diminution de la rémunération résultant d'une modification des fonctions du salarié prononcée à titre de sanction. De même pour les primes occasionnelles ou exceptionnelles, la jurisprudence estime que si l'employeur décide de verser une prime il peut la subordonner à certaines conditions. [...]
[...] Une limite à ce pouvoir : la sanction pécuniaire illicite Comme nous l'avons vu, l'employeur étant seul juge de l'opportunité de la sanction, il est normal que la loi vienne limiter ce pouvoir. Si l'employeur a le pouvoir disciplinaire, tout ne lui est pas non plus permis. Le législateur établit donc des sanctions illicites. Il s'agit de sanctions qui sont purement et simplement interdites par la loi. Elles sont illicites parce qu'elles relèvent de la part de l'employeur une intention de nuire au salarié. [...]
[...] Dans l'arrêt commenté, le problème de la preuve ne se pose pas ici. M. Denis semble reconnaître les faits qui lui sont reprochés. Celui-ci demande au juge de reconnaître que la sanction de ses agissements constitue une sanction pécuniaire prohibée par la loi. La qualification de faute par l'employeur a pour conséquence de sanctionner le salarié. La sanction est le prolongement de la faute. B. Conséquence de la qualification de faute par l'employeur La qualification de faute par l'employeur a pour intérêt de sanctionner le salarié par la suite. [...]
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