F. Térré a pu dire que « ce que font les parties prévaut toujours sur ce qu'elles disent » : il soulignait par-là qu'entre la volonté des parties et les faits, ce sont toujours ces derniers qui prévalent.
Cette sentence axiomatique est parfaitement illustrée par l'arrêt étudié qui met en exergue la possibilité pour le juge de requalifier un « contrat de téléréalité » (un « règlement participants ») en contrat de travail.
La décision de justice étudiée est un arrêt rendu en date du 3 juin 2009 par la chambre sociale de la cour de cassation. En l'espèce, les participants du jeu « l'île de la tentation » signent avec TF1 productions (anciennement « société Glem ») le « règlement participants ».
[...] Or la cour de cassation va très vite sur la caractérisation de la prestation de travail (très contestable comme on l'a dit supra) et semble déduire de la seule existence du lien de subordination l'existence du contrat de travail. Un raisonnement plus cohérent aurait consisté à prouver d'une part l'existence d'une prestation de travail en se basant sur des éléments de fait puis d'autre part celle du lien de subordination. Ici la cour de cassation semble déduire d'un faisceau d'indices qui vise à prouver l'existence d'un lien de subordination l'existence d'une prestation de travail exécutée sous la subordination de la société Cette solution laisse un impression désagréable, car, comme le souligne Pierre-Yves Verkindt, Ce n'est pas la subordination qui permet de dire que la relation est un contrat de travail, c'est une fois établi l'existence d'un travail qu'il y a lieu de se poser la question du caractère juridiquement subordonné ou non de l'action génératrice de la prestation promise : Ce n'est pas parce que les participants subissent des contraintes, sont sous un lien de subordination juridique (ils sont participants à l'émission donc cela naturellement lié à cette qualité) que pour autant ils exécutent une prestation de travail. [...]
[...] Ainsi, dans un arrêt de 1934, la cour de cassation a affirmé que ce lien de subordination était caractérisé par l'exercice par l'employeur d'un pouvoir de direction de contrôle et de sanction sur le salarié. À ces critères a par la suite été ajouté celui de l'exercice d'un travail au sein d'un service organisé, autre indice de ce lien de subordination (certains ont pensé avant l'arrêt Société Générale de 96 qui a clarifié la situation que ce critère du service organisé était un nouveau critère remplaçant celui du lien de subordination, le débat est aujourd'hui donc clos il ne s'agit là qu'un autre critère du critère Globalement, on a pu hésiter entre un lien de subordination juridique et un lien de subordination économique. [...]
[...] En l'espèce, les participants du jeu l'île de la tentation signent avec TF1 productions (anciennement société Glem le règlement participants Le contrat n'étant pas formelle un contrat de travail, les deux participants saisissent le conseil de prud'hommes contre TF1 productions pour requalifier le règlement participants en contrat de travail à durée indéterminée et ainsi pouvoir obtenir paiement de rappels de salaire et heures supplémentaires ainsi que des indemnités et dommages et intérêts suite à la rupture. Le conseil de prud'hommes procède à la requalification du contrat au même titre juridiction d'appel qui rend un arrêt confirmatif. TF1 productions est ainsi demandeur au pourvoi. TF1 productions formule deux moyens à l'appui de sa de demande. [...]
[...] Le critère discriminant en matière de contrat de travail est en effet le lien de subordination : la personne qui fournit la prestation de travail doit en effet être sous la subordination de la personne qui lui donne la rémunération : c'est ce critère qui permet à la relation salarié/employeur d'émerger. Ce critère est en effet déterminant, car deux prestations peuvent être identiques alors même qu'elles sont exécutées l'une par un salarié l'autre par un travailleur indépendant : le lien de subordination marque la différence. Pour comprendre ce que la cour de cassation entend ici par prestation de travail exécuté sous la subordination de la société il est intéressant de noter que cette notion de subordination, essentiellement fixée par la jurisprudence, est dotée de contours assez flous et évolutifs. [...]
[...] L'arrêt étudié a ainsi été vertement critiqué en ce dont il a retenu que la participation à l'île de la tentation constitue une prestation de travail. Si l'on s'en remet à l'étymologie du terme travail, trepalium apparaissent les notions de tourment et d'instrument de torture : si le travail des ouvriers des manufactures de Coton décrit par le Docteur Villermé au XIX est en cohérence avec cette étymologie, on est en droit de douter que les séances de jet ski effectuées par les candidats de l'île de la tentation le sont. [...]
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