La période d'essai est une période qui survient juste après la conclusion du contrat et permet à l'employeur et au salarié de « s'observer mutuellement ». Pendant cette période, les règles de droit commun concernant la résiliation unilatérale du contrat de travail par les parties sont écartées et prime la liberté de rupture. Cette liberté doit être encadrée afin que ni l'employeur ni le salarié n'en abuse, et ainsi c'est la théorie générale de l'abus de droit qui est, dans ce cas aussi, invoquée comme limite par la Cour de cassation.
Un salarié a été embauché en contrat à durée indéterminée. Le contrat prévoyait une période d'essai de trois mois. Huit jours après son embauche, la période d'essai a été rompue par l'employeur. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale. La Cour d'appel de Rennes a confirmé le 6 décembre 2001 le jugement du conseil des prud'hommes et condamné l'employeur à verser des dommages-intérêts au salarié licencié au motif que la rupture du contrat de travail était abusive. L'employeur se pourvoit donc en cassation selon le moyen que la Cour d'appel aurait violé l'article L122-4 du Code du travail en déduisant le caractère abusif de la rupture du contrat de l'age du salarié, de la brièveté de l'essai, du fait que celui-ci venait de démissionner de son précédent emploi et qu'il effectuait un stage d'adaptation. L'employeur affirme qu'il peut rompre à tout moment la période d'essai et ce, discrétionnairement, tant qu'il n'y a pas d'abus. La Cour d'appel aurait du constater, pour déclarer la rupture abusive, que celle-ci était motivée par des considérations étrangères à l'appréciation des capacités professionnelles du salarié, ce qui n'était pas le cas.
Un employeur peut-il rompre unilatéralement une période d'essai s'il ne fait pas dégénérer ce droit en abus ?
La Cour de cassation répond oui à cette question mais rejette pourtant le pourvoi formé par l'employeur. Elle considère que la Cour d'appel, ayant relevé certaines informations, a pu décider que l'employeur avait agi avec une légèreté blâmable et avait abusé de son droit de résiliation.
Cet arrêt ne constitue pas un revirement de jurisprudence car la théorie de l'abus de droit a depuis longtemps été utilisée pour limiter la liberté de l'employeur de rompre une période d'essai. Cependant, il est intéressant de voir comment l'exercice de cette liberté est contrôlé. Ainsi, à travers cet arrêt, il apparaît que le pouvoir de direction de l'employeur est nécessaire mais encadré (I) et d'autre part que les juges disposent quant à eux d'un pouvoir de contrôle des décisions de l'employeur (II).
[...] Un employeur peut-il rompre unilatéralement une période d'essai s'il ne fait pas dégénérer ce droit en abus ? La Cour de cassation répond oui à cette question mais rejette pourtant le pourvoi formé par l'employeur. Elle considère que la Cour d'appel, ayant relevé certaines informations, a pu décider que l'employeur avait agi avec une légèreté blâmable et avait abusé de son droit de résiliation. Cet arrêt ne constitue pas un revirement de jurisprudence car la théorie de l'abus de droit a depuis longtemps été utilisée pour limiter la liberté de l'employeur de rompre une période d'essai. [...]
[...] Plusieurs arrêts précédents peuvent être cités (Cour de cassation, Chambre sociale août 1973 et 20 avril 1989). Dans l'arrêt du 5 mai 2004, il est tout à fait établi que l'abus du droit de résiliation unilatérale du contrat de travail pendant la période d'essai peut constituer un obstacle à la liberté contractuelle qui prévaut pendant cette période. L'employeur sauf abus ainsi que la Cour de cassation sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus sont d'accord sur ce point. [...]
[...] Cour de cassation, Chambre sociale mai 2005 - cassation Un pilote d'hélicoptère a été embauché en CDD une première puis une deuxième fois durant l'été, puis il a été embauché en CDI quelques jours plus tard. Licencié pour faute grave, il saisit le CPH de diverses demandes d'indemnisation. La Cour d'appel accueille la demande du salarié et lui accorde deux indemnités de requalification égales chacune à un mois de salaire ainsi que des indemnités pour rupture abusive concernant les deux CDD et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse pour le CDI. [...]
[...] L'employeur se pourvoit donc en cassation. Un employeur peut-il recourir à des CDD successifs (ayant pour objet l'activité normale et permanente de l'entreprise) pour palier à un besoin structurel de main d'oeuvre ? Un employeur peut certes conclure avec le même salarié des contrats à durée déterminée successifs pour remplacer un ou plusieurs salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu mais cette succession de CDD ne peut pas avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, en l'espèce il s'agissait de faire face à un besoin structurel de main d'oeuvre. [...]
[...] Le dernier contrat prévoit une période probatoire d'une durée de deux mois renouvelable une fois et, en cas de rupture de cette période, la fin des deux autres contrats sans que la salariée puisse prétendre au rétablissement de sa situation initiale. L'employeur de la salariée lui notifie la fin de sa période probatoire concernant le troisième contrat et donc la fin de toutes relations contractuelles. La salariée saisit donc la juridiction prud'homale. Elle requiert le versement d'une indemnité de licenciement, de préavis, pour inobservation de la procédure de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. [...]
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