Le développement de négociations sur l'emploi est l'illustration la plus marquante du progrès de la négociation d'entreprise en France. C'est dans ce contexte social qu'a été rendu l'arrêt du 5 mai 1998 qui vient préciser de quelle manière s'articulent la négociation collective et la consultation du comité d'entreprise.
En l'espèce, un accord collectif d'entreprise dit « accord pour le développement de l'emploi et une nouvelle dynamique sociale » a été conclu le 19 novembre 1993 entre d'une part, Electricité de France (EDF) et Gaz de France (GDF) et d'autre part, plusieurs organisations syndicales de salariés. Le 3 décembre 1993, une organisation syndicale de salariés non-signataire de l'accord - la fédération CGT - et le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production (le CSC des CMP) d'EDF-GDF assignent les signataires de l'accord devant le tribunal de grande instance afin que soit constatée la nullité de l'accord ou celle de ses clauses.
Le tribunal de grande instance ainsi que la cour d'appel rejettent la demande des requérants qui forment alors un pourvoi en cassation.
[...] En effet, une consultation tardive ne servirait à rien, l'intérêt de la consultation étant d'éclairer les syndicats et non de mettre le comité devant le fait accompli. Le cumul de la procédure de négociation et des attributions du comité d'entreprise doit être approuvé. Il favorise les intérêts des salariés. L'intérêt de la complémentarité des deux procédures Avant tout, il est notable que l'accord collectif connaisse un essor important dans l'entreprise, car il permet une meilleure prise en compte des nécessités de celle-ci. [...]
[...] Cependant, alors que le cumul présente des avantages certains aux salariés, le choix de la sanction par la Cour l'est beaucoup moins. En effet, la décision unilatérale du chef d'entreprise prise sans consultation du comité est entachée de nullité contrairement à l'accord collectif, qui lui est sanctionné moins sévèrement. On peut y voir un paradoxe, voire la remise en cause de l'efficacité du principe du cumul. En effet, la négociation doit être précédée d'une consultation, cependant, en cas d'inobservation de la procédure, l'accord reste valable. L'efficacité d'une règle ne réside t'elle pas dans les sanctions de son inobservation? [...]
[...] La solution de la Cour de cassation présente donc un intérêt majeur, car en imposant une consultation préalable à la négociation d'un accord collectif, les intérêts des salariés seront mieux pris en compte dans l'entreprise. En effet, la mission du comité d'entreprise étant d'assurer une expression collective des salariés, l'extension de ses attributions par l‘affirmation du cumul des procédures permet une meilleure représentation des intérêts des salariés auprès des syndicats. De plus, le comité d'entreprise qui ne dispose pas du pouvoir de négocier pourra néanmoins avoir une influence sur l'employeur. [...]
[...] Il est très probable que la solution soit différente et que la Cour prononce la nullité pour défaut de consultation dans l'hypothèse où il serait question d'une décision unilatérale, les règles de validité étant différentes de celles des accords collectifs qui sont quant à eux soumis à des règles de validité qui leur sont propres et qui se suffisent à elles-mêmes. L'inobservation de la procédure ne vicie pas l'accord collectif, peut-on alors en déduire que la consultation n'est pas une condition substantielle? Peut-on parler d'autonomie des conditions de validité des accords collectifs? [...]
[...] Ainsi, malgré l'absence de consultation, l'accord collectif signé reste applicable indépendamment des sanctions civiles ou pénales possibles. Sur le plan pénal, l'absence de procédure constitue un délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise et peut être sanctionnée sur le fondement de l'article L.2328- 1 du Code du travail (arrêt de la chambre criminelle du 13 décembre 1994). La solution de la Cour de cassation a été défendue en doctrine par plusieurs auteurs dont le professeur Jean-Emmanuel Ray pour qui le non- respect des attributions consultatives du comité d'entreprise n'affecte pas de nullité l'accord collectif conclu. [...]
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