Le pourvoi fait grief à la cour d'appel de l'avoir débouté au motif que la rupture du contrat pendant la période probatoire sans possible réintégration du salarié dans son ancien poste est illicite et sans cause réelle ni sérieuse. Cette rupture s'analyse donc en un licenciement. En effet, selon l'employeur demandeur, cette décision violerait les articles L122-4, L122-14-3 du Code du travail et 1134 du Code civil.
Il fait valoir d'une part que le salarié a accepté ce changement d'emploi, d'autre part que la prévision d'une période d'essai en cas de novation est parfaitement licite dès lors que l'emploi proposé est différent du précédent. Enfin, la rupture est libre sauf abus du droit de rompre, ce que n'avait pas constaté la Cour d'appel. En somme, pour le pourvoi, la rupture est licite tout comme l'instauration d'une telle période d'essai en cours de relation contractuelle.
Mais une telle période d'essai peut-elle être valable alors même qu'elle intervient en cours de relation contractuelle à l'occasion d'un changement de fonction et par le biais d'un nouveau contrat de travail ?
[...] Il en découle la prohibition de telle période en cours de contrat. le principe Les conditions et la durée de la période d'essai, qui a pour finalité pour l'essentiel d'apprécier l'aptitude du salarié à accomplir la tâche qui lui est confiée, sont déterminées dans le contrat de travail à peine d'illicéité.(Soc mai 2000). Par l'arrêt Boydron du 25 février 1997, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel la période d'essai se situe au commencement de l'exécution du contrat de travail À la suite de cette décision, la Cour de cassation a confirmé sa volonté de cantonner l'essai à la période pendant laquelle les parties au contrat sont dans une logique de découverte réciproque c'est-à-dire au début de leur relation contractuelle. [...]
[...] Cependant, par ces arrêts, désormais quel que soit la forme du changement de fonctions, l'instauration de période d'essai est illicite. jurisprudence bancale La Cour de cassation distinguait selon que le changement de fonction prenait la forme d'une modification du contrat ou celle d'une novation. La novation est un mode de transformation des obligations qui permet notamment à un débiteur de contracter envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle disparaît (Art 1271 du Code civil). Dans le premier cas, la période d'essai était prohibée (supra) tandis que l'on a hésité sur la portée du principe sus énoncé dès lors que les fonctions nouvelles du salarié assorties d'une période d'essai sont radicalement différentes des précédents et donnent lieu à l'établissement d'un nouveau contrat. [...]
[...] Aussi on peut relever que l'employeur dispose d'un pouvoir quasi discrétionnaire pour apprécier l'aptitude du salarié à ses nouvelles fonctions et d'une totale liberté de rupture, et ce, sans avoir à motiver celle-ci autrement que par la seule affirmation du caractère insuffisant de la période probatoire. Enfin, on peut s'interroger sur la conformité de cette validité des périodes probatoires avec la loi du 4 mai 2004 qui impose à l'employeur d'adapter le salarié à son nouveau poste par des mesures d'accompagnement notamment. Dès lors, la requalification en période probatoire a de lourdes conséquences. B. [...]
[...] Fondement La Chambre sociale fonde sa solution sur l'interdiction faite au salarié de renoncer par avance, pendant le contrat, au droit de se prévaloir des règles légales licenciement : un salarié ne peut valablement renoncer pendant la durée du contrat, par avance, au droit de se prévaloir des règles légales du licenciement Ce sont les articles L122-4 et L122-14-7 du Code du travail qui sont ici en cause. La période d'essai est un mode licite de renonciation aux règles du licenciement de sorte qu'en tant que dérogation à la règle elle doit faire l'objet d'une interprétation stricte d'où l'admission de sa validité qu'au commencement de la période contractuelle. Ainsi, le salarié ne pourrait consentir à introduire une nouvelle période d'essai sans violer l'article 122-14-7 du Code du travail. [...]
[...] Sa portée est seulement limitée dans la mesure où l'employeur ne peut s'en prévaloir pour rompre le contrat de travail (infra). La période probatoire permet à l'employeur de se réserver, pendant une certaine durée, la possibilité de modifier unilatéralement les fonctions du salarié. En effet, lors d'un changement de fonction, il peut évaluer les capacités du salarié à exercer ses nouvelles responsabilités. Cette période offre ainsi à l'employeur des facilités de gestion qui au moment de pourvoir un poste peut préférer avoir recours à un salarié qu'il connaît déjà. [...]
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