Dans un contexte de renouveau démocratique et social, la création des Comités d'entreprise en 1945 manifeste la volonté d' « associer les travailleurs à la gestion des entreprises ». En ce sens, la conception du Comité révèle un certain équilibre entre la volonté d'assurer « la démocratie dans l'entreprise » et l'exigence de préserver le pouvoir décisionnel du chef d'entreprise.
On entend par Comité d'entreprise, une institution représentative du personnel obligatoire dans les entreprises de 50 salariés et plus. Il est composé du chef d'entreprise et de représentants élus des salariés.
Si à l'origine, le Comité d'entreprise ne disposait que d'un pouvoir limité, la succession de différentes réformes tend à renverser la tendance. C'est ainsi que les lois Auroux de 1982 consolident ses attributions en matière d'information et de consultation, en imposant au chef d'entreprise une obligation d'information et de consultation du Comité d'entreprise avant certaines prises de décision. Le Comité dispose ainsi d'un droit à l'information.
Or le respect de ce droit à l'information s'avère parfois difficile en pratique. En effet, outre la technicité croissante du processus de décision, il arrive fréquemment que les employeurs diminuent la portée de l'impact de leurs projets de décision afin de ne pas avoir à solliciter le Comité d'entreprise. C'est précisément à ce type de problème qu'est confrontée la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 12 novembre 1997.
En l'espèce, la direction de la Caisse d'allocation familiale des Yvelines a présenté et fait adopter à son Conseil d'administration deux projets relatifs à l'organisation de ses services, et ce, sans informer et consulter préalablement son Comité d'entreprise. La direction évoque dans une note ultérieure des mesures concrètes d'application, mesures qui ne seront envisagées qu'après leur soumission au Comité d'entreprise.
Le Comité d'entreprise assigne alors en référé la Caisse d'allocation familiale pour « manquement à la procédure d'information et de consultation » prévue par les articles L.432-1 et L. 431-5 du Code du travail.
Débouté de sa demande par le juge des référés, le Comité d'entreprise interjette appel auprès de la cour d'appel de Versailles, qui dans un arrêt en date du 1er décembre 1995 rejette sa demande aux motifs que les projets adoptés par le Conseil d'administration sont formulés « en des termes généraux » sans aucune mesure concrète d'application. Le comité d'entreprise forme alors un pourvoi en cassation.
[...] 431-5, la Cour devait se prononcer sur le moment opportun de la consultation du Comité d'entreprise. Sur cet aspect, il convient de s'appuyer sur les travaux de Maurice Cohen. En effet, selon son expression, la consultation du Comité d'entreprise doit être ni prématurée, ni tardive Par cette formule, M. Cohen souligne deux choses. La première est que si la consultation est trop précoce, le projet ne sera pas convenablement défini, privant ainsi le Comité de sa faculté à en apprécier les éventuelles conséquences. [...]
[...] 212-2 du Code de la sécurité sociale, ayant le pouvoir de prendre une décision au sens de l'article L. 431-5, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés. Afin d'appréhender la solution de la Cour de cassation, il convient dans un premier temps d'examiner le rappel de l'obligation pour l'employeur d'informer et de consulter le Comité d'entreprise pour ensuite s'intéresser à l'opportunité du moment de la consultation (II). I L'élaboration d'un critère précis en matière d'information et de consultation du Comité d'entreprise Dans son travail d'élaboration, la Cour de cassation rappelle dans un premier temps le droit en vigueur à travers un attendu de principe articulé autour du visa pour ensuite redéfinir la notion de décision afin de dégager un critère de consultation et d'information du Comité d'entreprise A Un attendu de principe rappelant in extenso le droit positif 1 L'article L. [...]
[...] Dès lors, là où la cour d'appel excluait du champ d'application de l'obligation d'information et de consultation tous les projets généraux dénués de mesures concrètes d'applications, la Cour de cassation tempère en affirmant que le projet doit être un minimum préparé, décidé, et donc orienté. De sorte que l'appréciation de la détermination du projet s'apprécie au regard de son impact sur le fonctionnement de l'entreprise. C'est donc un double critère qui nécessite d'une part une détermination certaine de l'objet du projet, et d'autre part un impact réel de ce projet sur la marche de l'entreprise. [...]
[...] En ce sens, l'arrêt Haulotte rendu par la chambre criminelle le 2 mars 1978 évoquait déjà que la présence de mesure d'application ne constituait pas en soi un critère pour la consultation du Comité d'entreprise. De même, l'arrêt Société générale rendu par la Chambre sociale le 7 février 1996 posait l'obligation de consultation du Comité d'entreprise en cas de décisions espacées dans le temps et s'inscrivant dans une procédure complexe. L'arrêt de cassation rendu par la Chambre sociale le 12 novembre 1997 est donc un arrêt de principe qui a son importance, mais qui du fait de sa publication et de sa continuité, ne constitue pas une solution pionnière en la matière. [...]
[...] Toutefois là encore, on décrypte une certaine volonté de la Chambre sociale de restreindre la portée de l'arrêt. A cet égard, outre le renvoi devant une juridiction du fonds, on observe une faible publication. En effet, cette jurisprudence voit sa publication limitée au bulletin alors qu'elle aurait pu faire l'objet d'une publication plus large. A la question de savoir pourquoi, beaucoup de réponses sont possibles. La Cour a certainement dû estimé que malgré la définition de la décision patronale, cet arrêt n'est pas ‘'inédit''. [...]
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