La décision prise par un employeur de modifier le lieu d'exécution du travail peut résulter de considérations très diverses et obéir à des motivations aussi fondamentales que l'intérêt de l'entreprise ou la sauvegarde de l'emploi.
Tel est le sujet de l'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 11 juillet 2001 surnommé Franfinance.
En l'espèce M. T. B. salarié de la société Franfinance depuis 1983 en qualité d'inspecteur contentieux, a été nommé, le 1er août 1988, responsable de l'unité de contentieux régional de Marseille. En 1994 il fait l'objet d'une mutation à l'unité de Bordeaux suite à de mauvais résultats. Le 25 mai 1994 il est licencié pour avoir refusé cette mutation.
M. T. B. mécontent de ce licenciement saisit les prud'hommes.
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence dans son arrêt de la 17e chambre sociale en date du 18 janvier 1999 statue en faveur du salarié énonçant que le licenciement dont il fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse. La société Franfinance au vu de cette décision se pourvoit donc en cassation.
La question qui se pose à la Cour est de savoir d'une part si la mise en œuvre d'une clause de mobilité à des fins disciplinaires entraine une modification du contrat de travail et de plus est-ce que cela entraine donc l'application du pouvoir disciplinaire.
[...] T.B a refusé la mutation il a donc refusé une sanction. Si les juges du fond estiment que la mutation est exclusivement fondée sur une faute du salarié, le refus d'accepter cette mutation constituera alors lui-même une faute grave entraînant son licenciement. Le salarié aura donc commis deux fautes successives, sanctionnées chacune par une mesure disciplinaire différente nécessitant pour chacune d'elles le respect des règles procédurales. Dans le cas contraire, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse et justifiera le versement des indemnités prévues par le Code du travail. [...]
[...] Une faute sérieuse suffirait sans doute à justifier la sanction et à satisfaire au contrôle de proportionnalité exigé par la Chambre sociale. La cour d'appel devra donc vérifier si cette mutation est proportionnelle à la gravité de la faute commise À la lecture de cette décision, bon nombre d'employeurs souhaiteront sans doute insérer dans les contrats de travail des dispositions à caractère disciplinaire. S'il s'agit notamment de clauses de mobilité, il conviendrait de veiller à ce que les clauses traduisent la volonté claire et non équivoque de leurs auteurs de les utiliser à de telles fins. [...]
[...] La solution de notre arrêt s'inscrit à l'encontre de la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation en matière de clause de mobilité parce qu'elle considérait que ces clauses relavaient du pouvoir de direction et la Cour sanctionnait clairement les employeurs qui prononçaient, sur leur fondement, des mutations déguisant des sanctions disciplinaires (arrêt 4 juin 1992). En effet une clause de mobilité Dans un arrêt de 1998, la Cour de cassation avait décidé qu'une modification du contrat de travail, même prononcé à titre disciplinaire, ne pouvait être imposée au salarié (société Hôtel le Berry) Ces décisions confirment donc qu'il convenait de considérer que la mobilité inscrite dans les prévisions contractuelles autorisait l'employeur à user de son pouvoir de direction qui consiste dans ce cas à modifier les conditions de travail, donc de lieu d'exécution du travail dans l'intérêt de l'entreprise. [...]
[...] La question qui se pose à la Cour est de savoir d'une part si la mise en œuvre d'une clause de mobilité à des fins disciplinaires entraine une modification du contrat de travail et de plus si cela entraine l'application du pouvoir disciplinaire . La Cour de cassation dans son arrêt en date 11 juillet 2001 statue en faveur de l'employeur en se fondant sur l'article 1134 du Code civil et L.122-43 de code de travail au motif que la mise en œuvre d'une clause de mobilité n'entraîne pas de modification du contrat de travail ; que même si le déplacement du salarié a le caractère d'une mesure disciplinaire, il ne constitue pas un abus, dès lors que l'employeur peut invoquer une faute du salarié. [...]
[...] L'affirmation par la Cour de cassation de la mise en œuvre d'une clause de mobilité à des fins disciplinaires traduisant un simple changement des conditions de travail restant donc une sanction En effet étant un simple changement des conditions de travail, la mutation imposée par l'employeur constitue donc une sanction qui ayant été refusée par l'employé est constitutive en soi d'une faute mais la Cour rappelle tout de même que la mutation doit être proportionnelle à la gravité de la faute La nécessité d'un comportement fautif de la part de M. T.B. La Cour affirme que qu'il revenait à la Cour d'appel de vérifier si le comportement incriminé de M. T.B. était fautif C'est donc une des conditions de validité pour que la clause de mobilité soit mise en œuvre à des fins disciplinaires. En l'espèce le salarié a fait l'objet d'une mutation pour insuffisance de résultats, de Marseille à Bordeaux. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture