Dans cet arrêt, la Chambre sociale de la Cour de cassation est venue subordonner la validité d'une clause de non-concurrence à l'existence d'une contrepartie financière, sur le fondement du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et de l'article L120-2 du Code du travail.
En l'espèce, plusieurs salariés d'un groupe commissionnaire en douanes ont été repris par une autre société, cessionnaire d'élément du fond de commerce. Les nouveaux contrats de travail conclus comprenaient une clause de non-concurrence or les salariés ont démissionné et ont été engagés par la société concurrente.
La société cessionnaire a alors saisi le conseil de prud'hommes en paiement des pénalités stipulées aux contrats. La Cour d'appel conforte la société dans ses droits en condamnant les salariés à lui payer une indemnité pour infraction à la clause contractuelle de non-concurrence. Elle énonce en effet que « la clause portant interdiction d'exploitation directe ou indirecte d'une activité concurrentielle à celle de l'employeur emporte interdiction pour le salarié d'accepter un emploi similaire dans une entreprise concurrente, non créée par lui ». Par ailleurs, elle constate que la clause de non-concurrence ne comporte pas l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière. Les salariés forment alors un pourvoi en cassation.
La question qui se pose à la Cour de cassation est donc de savoir si une clause de non-concurrence, sans contrepartie financière, est valable. Autrement dit, si l'absence de contrepartie financière dans une clause de non-concurrence est constitutive de nullité.
[...] En revanche, la violation par le salarié de la clause de non-concurrence dispense l'employeur du paiement de la contrepartie financière (soc mai 2004). Ainsi, à défaut de contrepartie financière, la clause de non-concurrence est nulle et le salarié délivré de l'obligation de la respecter. Dès lors, l'employeur ne peut lui demander aucune indemnité pour non-respect de la clause, mais le salarié qui a respecté la clause illicite peut prétendre à des dommages et intérêts (soc mars 2003). De même, si la clause de non- concurrence sans contrepartie financière est nulle, la responsabilité de l'ancien salarié peut toujours être engagée pour agissement concurrentiel déloyal (soc mai 2005). [...]
[...] La question qui se pose à la Cour de cassation est donc de savoir si une clause de non-concurrence, sans contrepartie financière, est valable. Autrement dit, si l'absence de contrepartie financière dans une clause de non-concurrence est constitutive de nullité. La Cour de cassation censure la Cour d'appel, sur le fondement du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et de l'article L120-2 du Code du travail, en énonçant la nullité de la clause de non-concurrence litigieuse. Cette clause est nulle du fait qu'elle ignorait l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière. [...]
[...] Si la validité d'une clause de non-concurrence est désormais subordonnée à l'exigence d'une contrepartie financière cette solution pose quelques difficultés quant à son application et à son interprétation (II). La contrepartie financière : une condition de validité de la clause de non- concurrence Par cet arrêt en date du 10 juillet 2002, la Cour de cassation opère un revirement quant aux conditions de validité d'une clause de non- concurrence. Aux conditions déjà connues s'ajoute celle de la contrepartie financière Les conditions connues Par plusieurs décisions en date du 10 juillet 2002, notamment l'arrêt reproduit, la Cour de cassation a modifié profondément sa jurisprudence relative aux clauses de non-concurrence. [...]
[...] On peut tout à fait concevoir qu'une jurisprudence affirme que le juge ne peut modifier une clause de non-concurrence dont la portée dans le temps ou dans l'espace est excessive et qu'il doit au contraire, en présence d'une telle clause, affirmer qu'elle est nulle. Concernant ce pouvoir qualificatif du juge, la jurisprudence actuelle estime qu'il ne dispose que d'un pouvoir de réformation à l'égard d'une clause dont l'étendue dans le temps ou dans l'espace est excessive (soc juillet 1984). On arrive donc à des incertitudes avec cette jurisprudence quant au pouvoir du juge dans son appréciation souveraine des faits. [...]
[...] En effet, le principe de sécurité juridique commanderait que la validité d'une convention ne soit appréciée qu'au regard des règles de droit applicables au jour de sa conclusion et non pas au regard des règles fixées postérieurement par la loi ou la jurisprudence. Cette approche pourrait trouver un fondement juridique dans l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantit le droit à un procès juste et équitable. Néanmoins, l'approche de la Cour de cassation est tout autre. [...]
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