En l'espèce, à la suite d'un entretien préalable à son licenciement, le prévenu a, dans le but de persuader l'employeur de ne pas le congédier, adressé à son supérieur hiérarchique un courrier dans lequel il contestait les griefs retenus contre lui, accompagné de photocopies de divers documents appartenant notamment à l'association, auquel il avait accès dans l'exercice de ses fonctions.
La juridiction de première instance ainsi que la Cour d'Appel, relaxent le salarié du chef de vol en retenant que les informations figurant dans les documents reproduits, constitués de courriers administratifs de portée générale, n'ont aucune valeur marchande et que ces documents, outils de travail du prévenu, ont été communiqués aux seuls responsables de l'association.
Un pourvoi en Cassation est formé aux motifs que le seul fait pour un préposé de faire des photocopies de documents sans l'autorisation de son employeur constitue la conversion d'une détention précaire en une véritable possession et caractérise ainsi la soustraction frauduleuse au sens de l'article 311-1 du nouveau CP, cette seule interversion de possession suffit à caractériser l'élément matériel du délit de vol. De plus, la Cour ne pouvait prétendre se fonder sur le fait que les documents n'auraient été utilisés que dans le cadre d'un débat interne entre l'employeur et le salarié sans répondre à l'argument péremptoire des conclusions de la partie civile faisant valoir que les photocopies avaient été ultérieurement communiquées à des tiers dans le cadre de l'instance prud'homale.
[...] La consécration du principe de l'indifférence des mobiles inspirant l'auteur du vol et l'affirmation de l'indifférence d'utilisation du bien appréhendé La Chambre criminelle de la Haute Cour énonce dans son attendu de principe, que toute appropriation de la chose d'autrui, contre le gré de son propriétaire ou légitime détenteur, caractérise la soustraction frauduleuse caractéristique du vol, quels que soient le mobile qui a inspiré son auteur et l'utilisation du bien appréhendé En effet, l'Association énonce également que quelle que soit l'usage ultérieurement fait par son auteur de l'objet soustrait, la circonstance que le salarié n'ait pas communiqué à des tiers les documents indument photocopiés, ne saurait en aucune manière justifier la décision attaquée, celle-ci déclarant non constitué le délit de vol. De plus, celle-ci affirme que la volonté du prévenu, de disposer en connaissance de cause d'une chose détenue à titre précaire caractérise l'intention frauduleuse requise en matière de vol, quels que soient les mobiles. [...]
[...] Une fois caractérisé l'élément matériel de l'infraction, l'existence de l'élément intellectuel propre à l'infraction de vol doit être démontrée B. L'existence de l'élément intentionnel requise en matière de vol La demanderesse au pourvoi invoque le fait que la Cour d'appel a entaché sa décision d'insuffisance en retenant la bonne foi du prévenu aux motifs que les documents se trouvaient de par ses fonctions en sa possession, alors qu'il était manifestement avéré que la volonté de disposer en connaissance de cause, même momentanément, d'une chose détenue à titre précaire caractérisait l'intention frauduleuse en matière de vol. [...]
[...] En effet, la Chambre Sociale de la Cour de cassation admet le 2 décembre 1998 que le salarié puisse produire en justice des documents obtenus par appropriation de la chose d'autrui dans le but de préserver ses droits. Elle prend donc en considération les mobiles contrairement à la décision de l'arrêt étudié. En effet, cette décision va donc à l'encontre de celle de la chambre criminelle du 8 décembre 1998, et pose des difficultés pour le salarié qui souhaite démontrer ses droits : a-t-il le droit de photocopier des documents pouvant lui être bénéfiques juridiquement ? [...]
[...] La constitution du délit de vol et la recevabilité de la preuve au cours du procès civil répondent désormais aux mêmes conditions. En effet, lorsqu'un salarié photocopie des documents afin d'assurer strictement sa défense, le vol ne peut pas être caractérisé. Cependant, malgré ce recadrage opéré par la Cour de cassation entre ses deux chambres, il semble pertinent de s'interroger sur la difficulté pour le justiciable de déterminer si le document litigieux sera ou non considéré comme ayant un lien direct avec le procès. [...]
[...] En effet, la Haute Cour confirme les arguments développés par le pourvoi. Celui-ci énonce que le seul fait pour un préposé détenant matériellement des documents appartenant à son employeur, de faire à des fins personnelles, des photocopies de ces documents sans l'autorisation de ce dernier constitue la conversion d'une détention précaire en une véritable possession et caractérise ainsi la soustraction frauduleuse au sens de l'article 311-1 du nouveau Code Pénal. De plus, cette seule interversion de possession suffit à caractériser l'élément matériel de l'infraction. [...]
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