Commentaire d'arrêt : Soc. 11 décembre 1986

Extraits

[...] Le risque d'aggravation d'une scoliose est-il constitutif d'un danger grave et imminent pour la santé justifiant d'user du droit de retrait ? La Cour de cassation répond par l'affirmative en affirmant que la salariée avait un motif raisonnable de penser que le maintient à son poste de travail présentait un danger grave et imminent pour sa santé. Elle rejette donc les pourvois principal et incident. Le droit de retrait est mis en œuvre librement par le salarié les juges contrôlant la légitimité de l'utilisation de ce droit (II). I. [...]

[...] C'est du moins la conception qui est retenue ici. Le droit de retrait s'applique donc en dehors des cas d'accident comme lorsque la santé du salarié est en jeu, quand bien même l'état de ce dernier n'est pas dû à un accident de travail, lorsque l'exercice de son travail peut aggraver son état. Dans tous les cas les juges doivent justifier dans leur appréciation des éléments de faits constitutifs d'une part d'un danger et d'autre part de l'imminence de celui-ci, sous peine de se voir censurer par la Cour de cassation. [...]

[...] Ces dispositions ont été reprises par le Code du travail à son article L. 231-8-1, peu de temps après l'adoption des lois Auroux par la loi du 23 décembre 1982. Sorte de transposition de la convention internationale de l'Organisation internationale du travail. Mais la loi française prévoit également qu'aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un salarié ou d'un groupe de salariés ayant usé de ce droit. Le droit de retrait est ici à distinguer du droit de grève qui implique le non versement du salaire. [...]

[...] Commentaire d'arrêt : Soc décembre 1986 Les principes de notre droit positif conduisent à l'affirmation de la primauté de l'intégrité corporelle du salarié (Michèle Bonnechère). C'est dans cet optique de protection que le droit social assure l'intégrité du salarié. Face aux risques croissants auxquels sont exposés les travailleurs dans l'accomplissement de leur travail, le législateur est intervenu, influencé parfois par les normes internationales afin d'assurer une protection active des salariés. C'est ainsi qu'un droit de retrait est apparu permettant aux salariés de se soustraire à leur lien de subordination afin de prévenir une situation dangereuse. [...]

[...] Soit une analyse subjective qui suppose de prendre en compte la croyance réelle et proportionnée du danger dans l'esprit du salarié. C'est cette dernière conception qui est retenue par les magistrats. Ainsi les juges contrôlent les motifs raisonnables des salariés en fonction des informations dont ils disposent. Un rapport d'expert ne pouvant avoir d'intérêt si le salarié n'a pas accès à ses conclusions (CA Paris 30 septembre 1987). La jurisprudence a par ailleurs été amenée à préciser que le danger n'a pas à être extérieur (Soc mars 1996). [...]