Une salarié travaillant de nuit est mutée à un nouveau poste où elle occuperait des fonctions de jour. Perdant dès lors ses primes d'astreinte, elle saisit la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat pour modification unilatérale de son contrat de travail sur le fondement des articles 1184 du code civil et 1221-1 du code du travail.
La Cour d'appel déboute la salariée de sa demande au motif que la baisse de sa rémunération ne constitue pas une modification du contrat de travail en ce sens que la perte des primes d'astreinte n'est que la contrepartie de la suppression de ceux-ci.
La Cour de cassation casse au motif que constitue une modification du contrat de travail la mutation qui fait passer le salarié d'un internat à un établissement de jour et qui fait de ce fait perdre à la salariée le bénéfice des primes qu'elle avait perçues régulièrement depuis 9 ans.
La question posée au juge était donc simple : la suppression des primes d'astreinte constitue-t-elle une modification du contrat de travail nécessitant de ce fait l'accord du salarié ?
La réponse de la Cour de cassation est clairement affirmative, ce dont on peut tirer deux types d'enseignement. Tout d'abord, la frontière entre conditions de travail et contrat de travail est repoussée en faveur du salarié (I). Ensuite, la solution vient préciser que le salaire, dans son sens large, tel qu'il est en l'espèce entendu par la Cour de cassation, constitue un élément essentiel du contrat nécessitant un accord des parties avant toute modification de celui-ci (II).
I. Une nouvelle frontière entre conditions de travail et contrat de travail
Il convient désormais de différencier les changements d'horaires (A) et les bouleversements d'horaires (B). (...)
[...] La réponse de la cour de cassation est clairement affirmative, ce dont on peut tirer deux types d'enseignement. Tout d'abord, la frontière entre conditions de travail et contrat de travail est repoussée en faveur du salarié Ensuite, la solution vient préciser que le salaire, dans son sens large, tel qu'il est en l'espèce entendu par la cour de cassation, constitue un élément essentiel du contrat nécessitant un accord des parties avant toute modification de celui-ci (II). I. Une nouvelle frontière entre conditions de travail et contrat de travail Il convient désormais de différencier les changements d'horaires et les bouleversements d'horaires A. [...]
[...] Bien qu'il soit effectivement judicieux de différencier le bouleversement des horaires et le changement des horaires (puisque cela permet au salarié de s'opposer à une décision entraînant une perte d'argent nécessaire à la survie dans une société de consommation de masse) la cour de cassation ne tient-elle pas compte ici des circonstances de fait? En effet, la cour de cassation, qui statue traditionnellement en droit, énonce expressément que les primes d'astreintes étaient régulièrement perçues depuis 9 ans Cette stabilité de fait est donc peut être une condition supplémentaire à l'opposition du salarié à un bouleversement de ses horaires de travail. [...]
[...] Il appartient donc à chaque salarié de choisir dans la mesure du possible son organisation dans la vie de tous les jours et d'être assuré d'une certaine stabilité dans le déroulement de celle-ci. Dans le même temps, cette décision de la cour de cassation apporte une précision sur ce qui est un élément essentiel du contrat de travail: le salaire (II). II. Une précision sur le caractère essentiel de l'objet de la modification Cette solution confirme tout d'abord que le salaire est effectivement un élément essentiel du contrat dont la modification entraîne donc nécessairement la modification du contrat de travail. [...]
[...] Pourtant, en l'espèce, la cour de cassation analyse ce changement des horaires en modification du contrat de travail, et non un changement des conditions de travail B. Le bouleversement des horaires, modification du contrat de travail La cour de cassation énonce en effet clairement que constitue une modification du contrat de travail (le fait de) faire passer un salarié d'un internat à un établissement de jour Ca ne semble pas être du à la volonté commune des parties, car la cour de cassation n'aurait pas énoncé de formule générale mais se serait retranchée derrière la fameuse appréciation souveraine des juges du fond Ca ne semble pas être assez général pour que cet arrêt constitue un revirement de jurisprudence pour autant. [...]
[...] L'assimilation des primes de nuit au salaire Cette solution montre que le salaire est entendu au sens large lorsqu'il s'agit de qualifier un élément d'essentiel ou pas pendant une procédure de modification du contrat de travail. Il n'allait pas de soi que les primes étaient intégrés au salaire, en ce sens qu'elles peuvent être considérées comme un simple complément du salaire ''classique''. Mais c'est néanmoins un bon choix car c'est cette notion de rémunération qui a permis d'opérer la distinction entre le bouleversement des horaires de travail et le changement ''simple'' des horaires de travail. [...]
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