La question de la localisation du travail suscite un abondant contentieux. La Cour de cassation a, par un arrêt en date du 12 juillet 2006, mis en exergue le caractère nécessairement précis de la zone géographique d'application de la clause de mobilité. Au visa de l'article 1134 du Code civil, toute son attention se porte sur les conditions de validité de la clause de mobilité alors qu'auparavant elle se contentait d'examiner uniquement les conditions d'application de cette clause.
La société Groupama engage une chargée de clientèle et prévoit dans son contrat de travail qu'elle doit exercer son activité à l'agence de Folelli, en Corse, qu'elle est rattachée à l'établissement d'Ajaccio mais que « les évolutions dans l'organisation de l'entreprise pourront amener cette dernière à modifier tant l'établissement que le bureau de rattachement ».
L'intéressée demande un congé sabbatique de 17 mois. À son retour, on lui propose un poste à Corte, donc toujours en Corse, affectation qu'elle refuse. Elle est alors licenciée pour faute grave, motif pris de son « refus de mobilité géographique prévue par le contrat de travail ».
Tout le débat tourne autour de la validité de la clause de mobilité. La Cour d'appel de Bastia, manifestement, ne trouve rien à y redire : puisque l'emploi précédemment occupé par la salariée avant son congé sabbatique n'était plus disponible, il était normal de lui proposer un emploi similaire. Le fait que le périmètre de mutation soit circonscrit à la Corse a certainement joué en faveur de l'employeur.
À l'inverse, la Cour de cassation donne tort à l'employeur car « une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application ». La zone de mobilité doit donc être définie de manière précise. La Cour de cassation n'hésite pas à introduire une condition nouvelle de validité de la clause de mobilité (I). Dès lors, la conséquence principale de l'introduction de cette nouvelle condition de validité est un irrémédiable déplacement de la nature du contentieux de la clause de mobilité (II).
[...] L'arrêt du 12 juillet 2006 n'apporte pas de réponse à cette problématique. Il présente toutefois l'avantage d'entériner l'intitulé. En affirmant une nouvelle fois qu' une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application la Cour n'apporte aucune autre précision sur son étendue juridique. La clause doit être précise et sans ambiguïté = La précision doit concerner la zone géographique dans laquelle le salarié est susceptible d'être muté. Une clause de mobilité doit donc comporter une limite géographique définie clairement. [...]
[...] soc avr 94- JSL mai 2000, 58- 7). La Cour de cassation condamne sans ambages les clauses évolutives : la clause de mobilité n'est valable que si le salarié sait d'emblée où il risque d'être muté. L'employeur ne doit pas pouvoir se réserver le droit de modifier unilatéralement le contrat de travail. Dès lors, la validité de la clause de mobilité suppose donc que le changement de lieu de travail, ne soit pas dépendant de circonstances dépendantes de la seule volonté de l'employeur. [...]
[...] soc mai 2004, 02- JSL juin 2004, 148-3). De la même façon, la Cour de cassation a jugé imprécise et donc sans valeur, une clause prévoyant un choix par le salarié de la zone géographique concernée, dès lors que le salarié n'avait pas marqué son choix en ne cochant pas la case correspondante au moment de la conclusion du contrat (Cass. soc déc 99- 40.916 Enfin, et c'est une partie de la portée de l'arrêt du 07 juin 2006, précédent jurisprudentiel à l'arrêt du 12 juillet 2006, la portée de la clause est limitée à la zone géographique existant au jour de la conclusion du contrat. [...]
[...] Et c'est bien sous le visa de l'article 1134 du Code civil Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel que la décision du 12 juillet 2006 est rendue. Les conséquences d'un tel déplacement de la nature du contentieux de la clause de mobilité - Évolution de la jurisprudence, rapprochement avec ce qui se passe en matière de clause de non concurrence (introduction de nouvelles conditions de validité), mais ici aucun signe de rétroactivité la clause de mobilité ne peut devenir une clause de style insérée aveuglément dans tous les contrats et permettant à l'employeur de changer les conditions de travail. [...]
[...] Les clauses visant la zone d'activité du groupe sont désormais inefficaces puisque figées à la configuration du groupe tel qu'il est à la date de la signature. Les prudents choisiront de retirer des contrats toutes les clauses de mobilité et se réserveront de négocier la mobilité au moment où le besoin s'en fera sentir. C'est une possibilité à ne pas négliger. Mais pour ceux qui ne veulent pas s'exposer à de mauvaises surprises et préfèrent s'appuyer sur un contrat de travail qui prévoit, dès l'embauche, l'éventualité d'une ou plusieurs mutations géographiques, comment faire pour ménager un futur qui n'est pas toujours connu ? [...]
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