L'usufruit étant au cœur de nombreux montages patrimoniaux, la clause de réversibilité d'usufruit, reconnue dans un arrêt de la cour de cassation du 15 mai 1865, qui permet la mise en place d'un nouvel usufruit, est également très employée par la profession notariale.
La clause de réversion d'usufruit est une clause par laquelle celui qui dispose de la nue-propriété de son bien s'en réserve l'usufruit et constitue au profit d'un tiers (souvent son conjoint) un second usufruit qui ne s'exercera qu'au décès du premier usufruitier (le donateur); ainsi naît un usufruit éventuel au profit du second usufruitier qui ne s'ouvrira que s'il est vivant le jour où l'usufruit initial cessera.
La clause d'usufruits successifs s'analyse donc en deux étapes : une réserve d'usufruit au profit du propriétaire lors de l'aliénation de la nue-propriété et une constitution d'usufruit successif.
La terminologie peut paraître trompeuse car le terme de « réversion » laisse supposer que c'est l'usufruit réservé (celui du 1er usufruitier) qui est reversé au bénéficiaire alors que par le décès du 1er usufruitier, l'usufruit s'éteint et ne peut dont être reversé à cause de mort : il s'agit donc en réalité d'usufruits successifs.
[...] On voit plutôt ici un terme dans la mesure où la date du premier décès est incertaine mais l'évènement selon lequel l'un des deux mourra avant l'autre est d'ores et déjà certain. Cette distinction selon que l'usufruit successif porte sur un bien propre ou un bien commun explique la difficulté à trancher entre terme ou condition mais ne règle pas le problème car on ne peut pas se satisfaire d'une différence de régime entre biens communs et biens propres. Il faut donc essayer d'étendre l'une des analyses aux deux hypothèses. [...]
[...] En ce qui concerne l'usufruit successif, si on retient le caractère conditionnel, il s'agirait d'une condition suspensive puisque l'obligation ne se réalisera qu'à son accomplissement c'est-à-dire au prédécès du donateur. Une telle condition suspend, selon Messieurs PLANIOL et RIPERT, le droit lui-même et non pas seulement l'exécution du droit, et quand la condition se réalise, selon l'article 1179 du Code civil, elle a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté. Eu égard au mécanisme de l'usufruit successif, quels éléments permettent d'affirmer que c'est une donation conditionnelle ? [...]
[...] Dès lors, à compter du 1er janvier 2007, les usufruits successifs sont révocables ad nutum. On notera aussi qu'elles sont maintenues en cas de divorce en application de l'article 265 du Code civil, qui n'a pas été modifié par la loi du 23 juin 2006, de sorte que l'insertion dans l'acte d'une clause résolutoire en cas de divorce reste utile afin de prévenir un éventuel oubli de la part du donateur. En ce qui concerne les donations d'usufruits successifs consentis entre le 1er janvier 2005 et le 1er janvier 2007 En principe les donations d'usufruits successifs consentis durant cette période devaient être irrévocables. [...]
[...] Finalement la Cour de cassation opéra un revirement dans un arrêt du 21 octobre 1997 de la première chambre civile. Selon cet arrêt la réversion d'usufruit est une donation à terme de biens présents, le droit d'usufruit du bénéficiaire lui étant définitivement acquis dès le jour de l'acte .Seul l'exercice de ce droit d'usufruit s'en trouve différé au décès du donateur Cette solution fut confirmée par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 3 octobre 2000 qui reprit en des termes très proches la solution adoptée en 1997 : La clause de réversibilité d'usufruit s'analyse en une donation à terme de biens présents le droit du second usufruitier lui est définitivement acquis dès le jour de l'acte, seul l'exercice de ce droit est différé au décès du donateur La 3e chambre civile se rallia également à cette analyse dans un arrêt du 6 novembre 2002, reprenant à son tour les termes employés par la première chambre civile. [...]
[...] Reste à observer ce qu'il en a été en jurisprudence. - L'évolution jurisprudentielle : vers une donation de biens présents L'analyse jurisprudentielle de la clause d'usufruit successif a évolué depuis 1983. En 1983, la Cour de cassation analysa la clause de réversibilité d'usufruit en une donation de biens à venir, l'usufruit objet de la libéralité ne prenant effet qu'au décès du donateur (cf 1èreciv 20 avril 1983). Dans l'affaire qui lui était soumise, la Cour de cassation avait à se prononcer sur la validité d'une renonciation au bénéfice de la clause de réversibilité entre époux alors même que le donateur n'était pas décédé. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture