« Où manque la force, le droit disparaît ; où apparaît la force, le droit commence de rayonner. » L'exécution forcée en matière contractuelle est de l'essence du droit. Elle suppose au préalable une inexécution imputable au débiteur, encore appelée en droit anglais, « breach of contract ». L'exécution forcée n'est que la conséquence de l'inexécution contractuelle, la preuve de l'efficacité du principe de la force obligatoire des conventions et avec lui, du droit puisque « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » (article 1134, alinéa 1 du Code civil).
Les conséquences de l'inexécution contractuelle ne sont pas abordées de la même façon selon que l'on se situe d'un côté ou de l'autre de la Manche. Primauté de l'exécution forcée en nature en droit français, alors qu'en droit anglais prévaut ce que nous considérons comme une exécution forcée par équivalent, soit des dommages-intérêts (« damages »)- Nous limitons cette étude au droit anglais car il est le meilleur exemple de la Common Law au sens large d'où elle est originaire.
L'enjeu de notre étude n'est pas de prendre parti pour tel ou tel système mais de permettre une amélioration de notre droit par une étude comparative d'un modèle qui propose des solutions radicalement différentes des nôtres. L'idée étant, à l'heure de l'harmonisation européenne, la mise en place d'un corpus cohérent et attractif. L'étude des efforts de codification européenne en droit des contrats montrera que la solution est œuvre de compromis mais la préférence semble se tourner vers une approche remédiable et efficace de l'inexécution contractuelle.
L'ambition avouée de l'exposé est de mettre en relief l'obstacle que constitue l'existence d'une responsabilité contractuelle, à l'efficacité des conséquences de l'inexécution en droit français. L'idée de réparation ne doit être circonscrite qu'au domaine délictuel ; le domaine contractuel ne devant être dominé que par l'exécution. Exécution forcée en nature ou exécution forcée par équivalent. Selon les termes de Monsieur Laithier, « L'exécution forcée a lieu en nature si le débiteur est condamné à fournir l'objet précis de la prestation convenue » et par équivalent lorsqu'elle « vise à octroyer au créancier des dommages et intérêts évalués de façon à le replacer dans la situation qui aurait été la sienne si le contrat avait été ponctuellement et complètement exécuté. »
Dans quelle mesure le droit anglais et le droit prospectif permettent-ils d'appréhender les conséquences de l'inexécution contractuelle de façon moins conflictuelle, plus efficace que l'alternative exécution forcée en nature - responsabilité contractuelle, en droit français ? Comment l'évolution de l'office du juge permettrait-elle la remise en cause du principe de l'exécution forcée en nature ?
[...] Si au contraire on conçoit que les dommages et intérêts sont une forme d'exécution du contrat, la force obligatoire du contrat n'est pas atteinte. Si la moralité n'est pas antinomique de l'efficacité, elle n'est pourtant pas sa finalité même. Il nous semble plus opportun que la sanction fasse place au remède. II- L'exécution forcée du contrat : l'efficacité du remède De quelle manière le droit français pourrait-il introduire le concept d'efficacité dans les conséquences de l'inexécution contractuelle Quelles solutions ont été adoptées par les efforts de codification européenne ? [...]
[...] il ne parait pas évident, et même bien au contraire, que le principe en droit français est celui de l'exécution forcée en nature. Cependant, la primauté de cette sanction, par rapport à l'allocation de dommages-intérêts (c'est-à-dire d'une exécution forcée par équivalent), s'est imposée sur la foi de plusieurs fondements. Plusieurs articles du Code civil admettent explicitement l'exécution forcée en nature. Notamment, l'article 1143 du Code civil, s'agissant d'une obligation de ne pas faire, dispose que : Néanmoins, le créancier a le droit de demander que ce qui aurait été fait par contravention à l'engagement soit détruit ; et il peut se faire autoriser à le détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts s'il y a lieu. [...]
[...] Il ne devrait en effet plus y avoir place pour une réparation en matière contractuelle, mais uniquement pour une exécution. Ce qui relèverait de la réparation devant rester dans le cadre exclusif de la responsabilité délictuelle qui serait dès lors le seul ordre de responsabilité concevable. Le créancier victime de l'inexécution contractuelle doit pouvoir obtenir, ou bien l'exécution forcée en nature, ou bien l'exécution forcée par équivalent (par le biais de dommages- intérêts). L'idée d'exécution (qu'elle soit en nature ou par équivalent) est beaucoup plus neutre, beaucoup plus efficace économiquement que ne l'est la notion de réparation. [...]
[...] Il est nécessaire de nous imposer et donc d'être attractif en proposant, tout en conservant notre modèle, des solutions optimales pour les acteurs économiques. Le droit ne peut faire abstraction de l'économie. Le droit ne doit pas faire office de seuls préceptes moraux, mais être utile et viable. Pour cela il doit s'adapter aux nouvelles exigences de notre monde moderne et être compétitif. Les conséquences de l'inexécution contractuelle constituent une excellente illustration des difficultés de l'harmonisation européenne en raison de traditions juridiques opposées. [...]
[...] Le neveu n'exécutant pas son obligation, la tante intente une action contre lui. Mais outre la difficulté de l'intérêt à agir du fait de l'effet relatif des conventions, s'est posé le problème du dommage. La Chambre des Lords considérant que l'allocation de dommages et intérêts serait insuffisante et injuste a condamné le neveu à l'exécution en nature de son obligation.). Pour tenter un rapprochement entre le droit français et le droit anglais qui semblent a priori opposés quant aux conséquences de l'inexécution contractuelle, on peut remarquer que dans les systèmes de Common Law, comme en France, l'exécution forcée en nature sera toujours refusée lorsqu'elle est impossible et lorsqu'elle consiste en la mise en œuvre d'une obligation éminemment personnelle contract for personal service contrat de travail). [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture