Sur le champ de bataille de la cause, la doctrine s'oppose avec rage. Depuis la jurisprudence Chronopost où la Cour de cassation a fondé sa décision sur la cause, pour réputer non écrite une clause de limitation de responsabilité, la Cour de cassation semble avoir ouvert le chemin vers un usage plus pratique de la cause, plus juste pour le consommateur, un usage semblant favoriser un rapprochement du droit des contrats français avec les droits des contrats des juridictions européennes. A moins qu'elle n'ait ouvert une boîte de Pandore qui laisserait s'échapper une insécurité juridique nouvelle, la complication d'un concept jugé "plutôt simple", et une atteinte à la force obligatoire du contrat. L'espoir d'un compromis sur l'usage de la cause qui se languit au fond de cette boîte de Pandore sortira-t-il grâce aux projets de réforme du droit des contrats?
[...] En l'espèce, la société Bancherau avait confié à deux reprises, à la société de transport rapide Chronopost, l'envoi d'un pli contenant une soumission à une adjudication. Les plis étaient censés arriver le lendemain de l'envoi avant midi, mais ils n'arrivèrent que le surlendemain. La société Chronopost accepta de rembourser la société Bancherau le coût du port, en accord avec leur devise "satisfait ou remboursé". Pourtant, le préjudice de l'expéditeur était bien plus élevé que les simples prix d'envoi des plis, c'est pourquoi il demanda la réparation du préjudice causé. [...]
[...] Toutefois, avec le développement de la protection juridique du consommateur, la jurisprudence s'est montrée de plus en plus prudente envers ces clauses qui limitent la responsabilité des professionnels, et réduisent par la même la garantie de réalisation de l'obligation pour le consommateur. Dans un souci d'équilibrer les prestations des contractants, l'idée de faute lourde a été développée par la jurisprudence (l'article 1150 ne parle explicitement que de dol), suivie en 1996 par l'usage improbable de la cause. Usage certes improbable en 1996, mais qui s'est généralisé notamment par une décision de 2006 impliquant, cette fois encore, la société de transport rapide Chronopost . [...]
[...] La société de transport rapide se réfugia derrière la clause de limitation de responsabilité présente dans le contrat. En appel, la cour d'appel a soutenu que la société défenderesse n'avait pas commis de faute lourde par le simple fait d'avoir délivréŽ le pli en retard. Sans faute lourde de la part de la société défenderesse, la clause de limitation de responsabilité était valide sur le fondement de l'article 1150 du c.civ. débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée"). [...]
[...] L'utilisation de la cause renouvelée par la jurisprudence apporte des conséquences toutes particulières quant à l'avenir de la cause. En effet, l'utilisation en l'espèce, avec l'intrusion du juge dans l'appréciation de l'équilibre du contrat de façon subjective, a de légers parfums d'Equity anglo-saxonne. Dans les juridictions de Common Law, la juridiction interne dite d'Equity permet au juge d'apporter un "equitable remedy" (remède équitable) à la partie soumise à une loi de façon clairement injuste. Au motif que le rôle de la loi est de faire justice, les juges peuvent autoriser la correction d'un contrat là où le droit commun ne l'aurait pas autorisé. [...]
[...] Il conviendra donc dans une première partie d'étudier la jurisprudence Chronopost qui a transformé l'usage de la cause ( 1.1 ) dans une jurisprudence contestée ( 1.2 Dans une seconde partie nous nous attacherons à l'étude des conséquences de l'usage de la cause sur les clauses de limitation de responsabilité d'abord sur le montant d'indemnisation qui découle de la réputation non écrite de clause ( 1.1 pour enfin voir l'influence d'un tel usage de la cause sur l'avenir de la cause en vue des projets de réformes de 2005 et 2008. Partie Une jurisprudence charnière Si l'on en croit les éclats de la doctrine, l'usage de la cause pour déclarer non écrite une clause limitative de responsabilité est bel et bien une rareté dans le paysage juridique. Considéré comme "une bavure judiciaire", par Christian Larroumet, ou au contraire comme un arrêt non négligeable par Denis Mazeaud, l'arrêt de la chambre commerciale du 22 octobre 1996 a fait couler beaucoup d'encre. [...]
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