Comme celle de l'enrichissement sans cause, la théorie de l'apparence est une création jurisprudentielle, destinée à tempérer la rigueur aveugle des principes. Le principe ici en cause est celui selon lequel nul ne peut transmettre de droits qu'il n'a pas. Il est des cas où ce principe parfaitement logique doit cependant être écarté : lorsqu'une personne avait toutes les apparences du titulaire de certains droits, de sorte que des tiers ont traité avec elle sur la foi de cette apparence.
Le rôle de la théorie de l'apparence a pour but de transformer en droit véritable ce qui n'était qu'une apparence trompeuse, pourvu toutefois que cette apparence ait revêtu une force suffisante pour égarer les tiers. Ce tiers sera donc regardé comme ayant bien acquis la chose ou le droit en cause, et cette acquisition sera opposable au véritable titulaire.
[...] Le titulaire réel ne peut jamais se prévaloir de la théorie de l'apparence pour obliger le tiers. Mais une fois que celui-ci a opté, il est lié par son choix : s'il tient le contrat pour valable et opposable au titulaire réel, il doit lui même l'exécuter Entre le titulaire apparent et le tiers abusé Le titulaire apparent a traité sans qualité avec le tiers. Celui-ci sera le plus souvent satisfait pour l'opposabilité de l'acte au titulaire réel, par exemple au pseudo mandant. [...]
[...] Les effets de la théorie de l'apparence Entre le titulaire réel et le tiers abusé 1. Lien quasi contractuel. La théorie de l'apparence, destinée à protéger le tiers abusé, crée à son profit le droit qu'il a cru valablement acquérir. A-t-il traité avec un mandataire apparent : le pseudo mandant sera lié par cet engagement comme s'il avait réellement donné mandat. De même, le propriétaire véritable d'un bien vendu ou loué par un propriétaire apparent sera tenu de respecter la vente ou le bail. [...]
[...] Cependant, l'analyse conduit à distinguer dans ce recours deux éléments qui ne suivent pas exactement le même régime : - D'une part un recours en restitution : le titulaire apparent doit restituer au titulaire véritable ce qu'il a pu recevoir à l'occasion du contrat, par exemple le prix de la chose qu'il a vendue, les loyers qu'il a déjà encaissés Cette restitution est due dans tous les cas, même si le titulaire apparent n'a commis aucune faute et a agi de parfaite bonne foi : le sommes perçues ne sont en effet que la contrepartie d'un droit qu'il n'avait pas et la théorie de l'apparence, destinée à protéger les tiers, ne créent aucun droit au profit du titulaire apparent, même de bonne foi. - D'autre part, un recours en indemnités : le titulaire apparent peut devoir réparer le préjudice causé par son acte au titulaire réel et non déjà couvert par la restitution précédente. Mais cette réparation ne trouve son fondement que dans la responsabilité civile délictuelle et nécessite une faute. [...]
[...] Les exemples les plus fréquents concernent le mandat apparent Les exceptions et l'origine de l'apparence en principe indifférente. Cette théorie semble toutefois aujourd'hui repoussée de façon abstraite et insécurisante par la jurisprudence dans quelques domaines ; ainsi, en matière de régimes matrimoniaux, les tribunaux répugnent à admettre qu'un acte régulièrement conclu par le seul mari puisse engager la femme, par une sorte de résurgence de l'adage nul n'est censé ignorer la loi ; de même en matière d'incapacités, l'apparence ne peut faire échec à la protection de l'incapable et un arrêt en a refusé par principe le jeu à l'encontre des nullités de la période suspecte. [...]
[...] Bibliographie indicative Les modes d'évolution de la théorie générale du contrat. Thèse d'État de droit de Véronique Chéritat, université d'Orléans Théorie générale de l'apparence en droit privé. Thèse de doctorat de droit privé d'Agnès Rabagny, université Paris 2001. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture