La question de l'imprévision en droit français et plus exactement en droit des contrats n'est pas récente puisqu'elle fut soulevée par les juristes de l'Ancien Droit. Pour autant, elle suscite de nos jours toujours des interrogations et des controverses doctrinales car aucun texte n'envisage l'imprévision dans son ensemble.
Le contrat est, pour reprendre l'expression du Professeur Larroumet, une œuvre de prévision. Il appartient aux parties de prévoir leur avenir contractuel c'est-à-dire de tenir compte, lorsqu'elles concluent et déterminent les prestations réciproques dues par chacune, à la fois des circonstances existantes mais aussi des évènements futurs prévisibles qui pourraient survenir au cours de l'exécution du contrat. L'objectif poursuivi par les contractants est de maintenir un équilibre entre ces prestations tout au long de l'exécution du contrat.
Or le 20ème siècle a mis en lumière que, pendant l'exécution du contrat, ces circonstances, sur lesquelles les parties s'étaient appuyées au jour de la conclusion du contrat, vont changer à la suite de la survenance d'évènements imprévus par les parties et extérieurs à celles-ci (les guerres, les crises boursières, les inflations), causant un déséquilibre significatif, manifeste entre les prestations réciproques, et, plus généralement un bouleversement de l'économie des contrats. Ainsi peut être définie l'imprévision.
Enfin, l'imprévision est évoquée essentiellement pour des déséquilibres contractuels dus à des faits économiques, financiers ou techniques.
Le problème se pose de savoir si l'équilibre du contrat peut être retrouvé par une révision de ce contrat.
Lorsque les parties sont d'accord pour modifier le contrat au cours de son exécution, cela ne pose pas de problème puisque le législateur, au titre de l'article 1134, alinéa 1 et 2 du Code Civil, autorise la révocation mutuelle, en ce sens que, ce que les parties ont fait, elles peuvent le défaire et donc le modifier .
Le débat se pose quand un des contractants ne veut pas modifier le contrat initial. Le juge peut-il, de manière générale, s'immiscer dans le contrat et le réviser à la demande d'un contractant ?
[...] Certaines rémunérations peuvent être disproportionnées, excessives eu égard au service rendu. Cette jurisprudence ne peut s'appliquer en cas d'imprévision où l'événement causant le déséquilibre est extérieur aux parties, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque le déséquilibre est dû à une mauvaise appréciation de la valeur réelle de la prestation du mandataire, au moment de la formation du contrat. Cass. Com nov nº90- RTD civ p124, obs. MESTRE Elle contestait le fait d'être contractuellement tenue d'intégrer Monsieur Huard dans son réseau en lui assurant une rentabilité acceptable et estimait qu'aucune inexécution contractuelle ne pouvait résulter du seul grief de ne pas avoir recherché un accord de coopération commerciale avec son distributeur agréé. [...]
[...] Cette abstention du juge judiciaire n'apparaîtrait pas fondée. Mais il ressort que cette divergence entre ces deux ordres juridictionnels n'est que relative L'abstention du juge judiciaire est aussi légitime en raison de risques juridiques et économiques encourus par une révision judiciaire du contrat. la divergence relative entre les juridictions judiciaires et administratives. L'imprévision a été accueillie en droit administratif depuis un arrêt[11] de la Compagnie générale d'éclairage de Bordeaux rendu par le Conseil d'Etat le 30 mars 1916. Il ne faut pas pour autant déduire de cet arrêt que le juge administratif a le pouvoir général de réviser un contrat administratif en cas d'imprévision. [...]
[...] En plus d'une majoration de plein droit accordée par la loi de finances annuelle, une révision judiciaire est possible pour aligner le montant de la rente sur l'augmentation de la valeur du bien aliéné du fait des circonstances économiques. De plus, l'article 28 du décret du 30 septembre 1953 permet au juge de réviser le montant d'un loyer d'un bail commercial assorti d'une clause d'échelle mobile quand la mise en œuvre de celle-ci dépasse du quart le montant du loyer initial. Les juges interprètent largement le texte. [...]
[...] Sa décision qui constitue l'exécution du contrat initial s'impose en conséquence aux parties. Il faut ajouter que si les parties ne parviennent pas à un accord, le contrat sera maintenu à moins que les parties décident de rompre d'un commun accord, ou qu'une disposition contractuelle autorise les parties à demander la résiliation du contrat en cas d'échec de la renégociation.[39] Si le législateur et la jurisprudence n'ont pas admis volontairement l'imprévision à une époque où pourtant de grands bouleversements économiques justifiaient alors son admission, on peut penser qu'ils ne sont pas prêts de l'admettre en droit privé. [...]
[...] Les clauses de renégociation. La clause de renégociation ou de révision ( ou clause de hardship[31] très présente dans les contrats internationaux) a un domaine plus large que la clause d'indexation[32]. Elle est insérée dans un contrat permettant à chaque partie de demander la révision du contrat si un changement imprévu, intervenu dans les circonstances initiales au regard desquelles les parties s'étaient engagées, vient à modifier profondément l'équilibre du contrat au point d'en faire supporter le poids qu'à l'une des parties. [...]
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