L'inexécution d'un contrat synallagmatique offre la possibilité pour le cocontractant lésé d'opposer l'exception d'inexécution au cocontractant défaillant, cette exception d'inexécution lui permet de suspendre l'exécution de son obligation tant que son partenaire n'exécute pas lui-même son obligation. De plus, l'inexécution d'un contrat synallagmatique offre la possibilité de demander en justice la résolution du contrat inexécuté, c'est-à-dire son anéantissement rétroactif.
Toutefois, ces moyens ne peuvent être invoqués que par une partie au contrat, par opposition aux tiers, qui selon Cornu, sont les personnes étrangères à une situation juridique. En effet, les tiers se voient appliquer le principe de l'effet relatif des contrats posé à l'article 1165 du Code civil : "Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers." Ce principe trouve lui même sa ratio legis dans le dogme de l'autonomie de la volonté, seules les parties qui ont consenti au contrat sont liées par lui.
Quel effet l'inexécution du contrat peut-elle avoir sur les tiers et en quoi peuvent-ils également y participer ?
[...] En effet, la tierce victime obtient finalement l'exécution par équivalent d'un contrat auquel elle n'est pas partie. (M. Bacache-Gibeili) De plus, cette solution nuit à la prévisibilité contractuelle des parties, lesquelles pensaient être tenues en cas d'inexécution que dans les termes du contrat. En effet, la Cour de cassation admet la recevabilité de l'action en responsabilité délictuelle de la tierce victime de l'inexécution, mais en contrepartie, comme on se situe sur le plan délictuel et non contractuel, les parties ne peuvent pas lui opposer les aménagements contractuels relatifs à leur responsabilité comme elles les avaient convenu. [...]
[...] En l'espèce, un bien avait donné à bail et le preneur avait ensuite conclu une location-gérance. La société locataire gérant avait alors agi en responsabilité délictuelle à l'encontre des propriétaires, car elle ne pouvait plus exercer son activité du fait de manquement à l'obligation d'entretien des lieux. La Cour d'Appel fit droit à sa demande et les propriétaires formèrent un pourvoi au moyen duquel ils invoquèrent la jurisprudence de la chambre commerciale. Mais, l'Assemblée Plénière rejeta leur pourvoi aux motifs que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage Cette solution a ensuite été confirmée par Com mars 2007 ; Civ mai 2007 Civ mai 2007 Civ juillet 2007 Com octobre 2008. [...]
[...] En revanche, lorsque le fait du tiers ne remplit pas les conditions de la force majeure, il n'entraine pas l'exonération totale du débiteur. Néanmoins, comme ce fait est pour partie la cause du préjudice subi par le cocontractant lésé, dans ce cas, ce dernier pourra alors faire condamner in solidum le tiers et le cocontractant défaillant. Il agira sur le fondement de la responsabilité contractuelle contre le cocontractant défaillant et sur le fondement de la responsabilité délictuelle contre le tiers. En fait, le tiers et le cocontractant défaillant seront tenus solidairement à réparer le préjudice subi par la victime de l'inexécution. [...]
[...] Ainsi, pour ce courant, le tiers doit établir le manquement contractuel ainsi que le manquement à une règle de bonne conduite qui s'impose en dehors de tout contrat ( Obligation de sécurité, devoir d'information de conseil ) Or, comme l'ont souligné Mme Viney et M. Brun, cette distinction n'est pas évidente. Conception défendue par la Première Chambre civile : l'assimilation des fautes contractuelles et délictuelles En revanche, la première chambre civile défend une autre conception, qui a vu le jour avec un arrêt du 15 décembre 1998. [...]
[...] Divergence quant à l'appréciation de la faute Or, la condition de la faute a soulevé une importante problématique : le tiers devait-il rapporter la preuve d'une faute délictuelle spécifique, distincte de la faute contractuelle, ou pouvait-il se contenter de démonter que son dommage procédait de l'inexécution contractuelle imputable au débiteur ? Jusqu'à la fin des années 1990, la jurisprudence était unanime : le tiers devait démontrer l'existence d'une faute délictuelle, envisagée en elle- même, indépendamment de tout point de vue contractuel (Civ novembre 1962). Le tiers devait donc rapporter la preuve d'une faute détachable du contrat. Mais, progressivement, la Première chambre civile s'est détachée de cette conception, alors que la Chambre Commerciale continuait de s'y rallier. [...]
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