« Le consentement de la partie qui s'oblige » est, selon l'article 1108 du Code civil, la première des « quatre conditions […] essentielles pour la validité d'une convention ». Pour être valablement donné, ce consentement doit toutefois être exempt de l'un des trois vices que l'article 1109 du code énumère : l'erreur, le dol et la violence, dont traitent respectivement les articles 1110, 1116 et 1111 à 1115. A dire vrai, la distinction de ces trois vices du consentement n'exclut pas certains rapprochements. En particulier, le dol occupe une place intermédiaire dans la catégorie des vices du consentement, car il présente des affinités avec la violence, mais aussi avec l'erreur. D'une part, en effet, des considérations principalement morales expliquent l'incrimination du dol et de la violence : à l'origine, en droit romain, des délits civils, ils sont devenus tardivement des vices du consentement, sous l'influence de l'Ecole du droit de la nature
et des gens. Au contraire, l'aspect psychologique domine dans l'erreur, que le droit romain analysait déjà en un défaut de consentement, en ne l'admettant que de manière fort restrictive, et dont l'Ancien droit fit un vice du consentement. Ainsi, de ce point de vue, l'erreur s'oppose-t-elle au dol et à la violence. Cependant, d'autre part, à la différence de la violence, le vice d'erreur et celui de dol supposent tous deux l'existence d'une erreur. Plus précisément, le dol consiste dans le fait, pour une partie, de provoquer ou, à tout le moins, dans la réticence dolosive, de faciliter une erreur de
l'autre partie : dans un arrêt du 10 juillet 1995, la première Chambre civile de la Cour de cassation l'a rappelé, en cassant pour violation de l'article 1116 du Code civil, une décision d'appel qui avait annulé un contrat pour dol en se fondant sur la violence
morale exercée par une partie, sans constater de sa part de manoeuvres destinées à provoquer une erreur de nature à vicier le consentement de l'autre partie. En revanche, la violence n'affecte le consentement extorqué que dans sa liberté : la partie qui contracte sous l'empire de la crainte que la violence lui inspire, n'est victime d'aucune erreur, spontanée ou provoquée. Il existe donc une parenté indéniable entre l'erreur et le dol. Or l'oeuvre créatrice de la jurisprudence a renforcé cette parenté, en rapprochant
ces deux vices du consentement, sans pour autant les confondre. Aussi examinera-t-on successivement la distinction traditionnelle de l'erreur et du dol, et leur rapprochement actuel.
[...] Il obtiendra ainsi indirectement un rééquilibrage de la convention en sa faveur. En matière de dol, la solution se rattache à la notion, d'ailleurs controversée, de dol incident. Cependant, en matière d'erreur, la jurisprudence admet également l'errans à ne solliciter que le paiement de dommages intérêts, au lieu de la nullité du contrat. Que le demandeur invoque le dol de l'autre partie ou uniquement son erreur, les sanctions apparaissent donc identiques. Le mouvement de rapprochement du dol et de l'erreur n'est peut-être pas encore achevé. [...]
[...] Il n'est pas exclu qu'à force d'en assouplir les conditions respectives et d'en élargir les sanctions, la jurisprudence en vienne un jour à les confondre. Cependant, en l'état actuel du droit positif, malgré parfois certains chevauchements, ces deux vices du consentement demeurent irréductibles l'un à l'autre. Aussi bien, l'avant-projet de 9/9 réforme du droit des obligations les vise-t-il distinctement, dans les dispositions qu'il est proposé d'insérer dans le Code civil, aux lieu et place de celles existant actuellement. [...]
[...] Elle rapproche ainsi le dol de l'erreur, à propos de laquelle les considérations psychologiques sont prédominantes. Cette jurisprudence libérale ne va pas sans inconvénient. En effet, l'erreur résultant du dol est prise en compte alors même qu'en elle-même, elle ne serait pas d'une gravité suffisante ou qu'elle serait inexcusable. Il existe donc un risque de voir le demandeur à l'annulation chercher à tourner les conditions requises pour une annulation du contrat fondée sur l'erreur, en invoquant une réticence dolosive de son cocontractant. [...]
[...] Peu importe, notamment, que l'erreur ait été unilatérale ou qu'elle ait été partagée. En effet, du moment qu'elle est bien entrée dans le champ contractuel, l'erreur vicie le consentement que les deux parties se soient trompé ou uniquement l'une d'entre elles. Ainsi le cocontractant serait-il été également victime de l'erreur et, partant, n'aurait-il pas cherché à exploiter une erreur de l'autre partie, que l'annulation du contrat n'en serait pas moins encourue. Au contraire, le dol étant un délit civil en même temps qu'un vice du consentement, requiert, pour être caractérisé, un fait moralement blâmable. [...]
[...] Or certaines de ces conditions deviennent superflues lorsque l'erreur a été provoquée ou facilitée par un dol. Les rédacteurs du Code civil n'ont admis l'erreur comme vice du consentement qu'à des conditions strictes. En effet, aux termes de l'article 1110, alinéa 1er, du Code civil : l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet Quant à l'erreur sur la personne, selon l'article 1110, alinéa du Code civil, elle n'est cause de nullité de la convention que dans les contrats conclus intuitu personae. [...]
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