La nature et le régime de l'action en responsabilité dans les différentes chaînes de contrats ont posé beaucoup de difficultés en jurisprudence.
Ainsi, cet arrêt de la troisième chambre civile du 16 novembre 2005 illustre parfaitement cette hésitation sur la nature de l'action en responsabilité concernant les successions de contrats, et notamment concernant sa transmission aux acquéreurs successifs de la chose.
En l'espèce, une commune, propriétaire originaire d'un terrain qu'elle avait exploité de 1863 à 1929 par l'intermédiaire d'une usine de production de gaz, l'a vendu en 1956 à une société de supermarchés (SES).
Par la suite, un marchand de biens (société CIC) a acquis le dit-terrain, et l'a revendu en 1990 à une société immobilière (CIA), l'actuelle propriétaire. Celle-ci ayant découvert l'existence d'hydrocarbures, a assigné la commune en garantie des vices cachés prévue à l'article 1641 du Code civil.
La Cour d'appel déboute la société demanderesse (la CIA) au motif qu'il existe une clause de non-garantie stipulée dans l'acte de vente entre la société SES (vendeur intermédiaire) et la société CIC (acquéreur direct), qui fait obstacle à cette action sur le fondement des vices cachés.
Dès lors, une clause limitative de responsabilité non-formulée lors de la première vente peut-elle faire obstacle à l'action directe de l'acquéreur final, même si elle est apparue dans un « maillon » de la chaîne de contrats ?
A cette question, la troisième chambre civile répond par la négative en cassant l'arrêt d'appel, et énonce ainsi le principe selon lequel : « une clause de non-garantie opposable par un vendeur intermédiaire à son propre acquéreur ne peut faire obstacle à l'action directe de l'acquéreur final contre le vendeur originaire, dès lors qu'aucune clause de non-garantie n'a été stipulée lors de la première vente ».
Par conséquent, la Cour de cassation admet bien qu'il y a transfert des actions en responsabilité et en garantie d'une chose lors de son transfert de propriété (I) ; mais ces actions ne concernant que l'acte de vente originaire (II).
[...] Inversement, les droits relatifs au bien transmis passent aux acquéreurs successifs. En l'espèce, les différents contrats portaient sur un même bien, le terrain. C'est pourquoi la société CIA était fondée à porter son action relative à ce bien, sur le terrain de la responsabilité contractuelle, ce qu'elle fait fort justement. L'action en responsabilité contractuelle pour les contrats successifs Normalement, d'après le principe d'opposabilité du contrat de l'article 1165, le tiers peut se prévaloir de l'inexécution du contrat par l'une des parties et lui portant préjudice, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l'article 1382 du Code civil. [...]
[...] Commentaire : troisième chambre civile novembre 2005 La nature et le régime de l'action en responsabilité dans les différentes chaînes de contrats ont posé beaucoup de difficultés en jurisprudence. Ainsi, cet arrêt de la troisième chambre civile du 16 novembre 2005 illustre parfaitement cette hésitation sur la nature de l'action en responsabilité concernant les successions de contrats, et notamment concernant sa transmission aux acquéreurs successifs de la chose. En l'espèce, une commune, propriétaire originaire d'un terrain qu'elle avait exploité de 1863 à 1929 par l'intermédiaire d'une usine de production de gaz, l'a vendu en 1956 à une société de supermarchés (SES). [...]
[...] La victime peut se voir opposer des clauses, c'est un fait. Mais elles doivent avoir été prévues à l'origine. Quid, dès lors, sur la légalité de ces clauses ? Car d'une certaine manière, on revient à la situation antérieure à 1991 puisqu'il semblerait que seuls les contractants à un contrat (d'une chaîne) soient liés par ces clauses. Bibliographie Droit civil : Les obligations de Luc Grynbaum (ed. [...]
[...] En effet, la première chambre civile a retenu une responsabilité contractuelle (civ. 1ère juin 1988) ; alors que la troisième chambre civile, afin d'éviter que la victime ne se voit opposer les clauses limitatives de responsabilité, s'est opposée à une telle solution (civ. 3ème décembre 1989), en continuant de retenir une responsabilité nécessairement délictuelle. C'est pourquoi, l'Assemblée plénière a mis fin à cette divergence dans son arrêt du 12 juillet 1991. Dans cette affaire relative à une succession de contrats d'entreprises, il a été jugé que l'action directe du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant était de nature délictuelle. [...]
[...] Elles ne peuvent lier ceux qui ne l'ont pas voulu. Ainsi, normalement, le contrat de vente conclu entre la société SES et la société CIC, ainsi que ses clauses, ne devraient pas concerner la société demanderesse en cassation. Néanmoins, ce principe ne fonctionne que partiellement. Seules les clauses nouvelles ne se transmettent pas. La société CIA, considérée comme un ayant cause à titre particulier puisqu'elle a reçu de la société CIC (l'auteur) le terrain, se trouve liée dans une certaine mesure aux différents contrats successifs relativement au bien transmis. [...]
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