Selon l'article 1874 du Code civil, il y a deux sortes de prêt, celui des choses dont on peut user sans les détruire, que l'on appelle le prêt à usage, et celui des choses qui se consomment par l'usage qu'on en fait, que l'on appelle le prêt de consommation. Le prêt d'argent entre dans la catégorie du prêt de consommation, car la chose prêtée, l'argent est un bien consomptible. Le Code civil pose le principe du consensualisme en matière contractuelle, toutefois la Cour de cassation a, dès l'origine, admis la survivance d'un certain nombre de contrats réels tels que le prêt et le dépôt.
La notion de contrat réel, directement issue du droit romain, fait dépendre la formation du contrat de la remise de la chose, le contrat revêt alors un caractère unilatéral. Un arrêt rendu par la 1re chambre civile de la Cour de cassation en date du 20 juillet 1981 pose le principe selon lequel, un prêt de consommation, contrat réel, ne se réalise que par la remise de la chose prêtée à l'emprunteur lui-même ou à un tiers qui la reçoit et la détient pour le compte de l'emprunteur.
Toutefois, la jurisprudence a évolué, et choisi de transformer la nature juridique du contrat de prêt d'argent, et ce, dans l'intérêt de l'emprunteur. Le contrat de prêt à priori caractérisé par sa nature unilatérale et réelle se voit substituer les caractères d'un contrat consensuel et synallagmatique.
Dans quelle mesure la nature du contrat de prêt d'argent modifie-t-elle la cause de l'obligation de l'emprunteur ?
[...] Le changement de qualification du contrat de prêt, devenu tantôt réel, tantôt consensuel, a entrainé une dualité de la cause de l'obligation de l'emprunteur. Aux vues de deux arrêts rendus par la première chambre civile de la cour de cassation le 19 juin 2008, la cause de l'obligation serait différente selon que le contrat de prêt d'argent a une nature réelle ou consensuelle, elle serait la remise matérielle de la chose lorsque le contrat est réel, et l'obligation de remettre la chose lorsque le contrat est consensuel. [...]
[...] La cause du contrat de prêt d'argent : une notion incertaine La jurisprudence a adopté une conception distincte de la cause selon la nature du contrat de prêt Mais au regard de la doctrine, il semble qu'elle soit allée plus loin en prenant en compte la cause subjective lorsque le contrat de prêt d'argent est qualifié de consensuel A. Conception distincte de la cause selon la nature du contrat Avant que soit transformée la nature du contrat de prêt d'argent, lorsque ceux-ci étaient tous des contrats réels, la notion de cause ne faisait l'objet d'aucune incertitude. Il était unanimement admis que la cause de l'obligation de l'emprunteur était la remise des fonds. [...]
[...] Pour le professeur Ghestin, la solution de cet arrêt est dangereuse car elle permettrait de faire annuler le contrat de prêt pour absence de cause, lorsque l'affectation des fonds décidée par les parties, lors de la conclusion du contrat et entrée dans le champ contractuel, n'est pas respectée. L'espèce présentée à la cour de cassation en 2008 ne se prêtait pas à l'annulation puisque l'utilisation des fonds litigieuse n'était pas entrée dans le champ contractuel car elle avait été décidée par les emprunteurs postérieurement à leur remise. [...]
[...] Cela est conforté par l'article L 311-15 du code de la consommation qui semble exclure tacitement la nature de contrat réel du prêt. En effet il prévoit que le contrat devient parfait dès l'acceptation de l'offre par l'emprunteur. La cour de cassation dissipe le doute par un avis du 2 octobre 1992 elle affirme que le prêt d'argent à caractère mobilier revêt un caractère consensuel. Il peut donc être soutenu que le crédit à la consommation n'est pas formé par le versement des fonds et n'entre plus dans la catégorie des contrats réels. [...]
[...] Dans quelle mesure la nature du contrat de prêt d'argent modifie-t-elle la cause de l'obligation de l'emprunteur ? Il apparaît alors nécessaire de s'intéresser à la transformation de la nature du contrat de prêt d'argent qui engendre de nombreuses incertitudes quant à la cause de l'obligation I. La nature du contrat de prêt d'argent La volonté croissante de protéger les emprunteurs contre les excès des prêteurs professionnels, a conduit la cour de cassation à transformer la nature du contrat de prêt, qu'il soit régi par le droit de la consommation ou le droit commun du Code civil A. [...]
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