L'article 1382 du Code civil, relatif à la responsabilité délictuelle, n'a pas été modifié depuis la création du Code civil en 1804. Il y a une jurisprudence prolixe à son niveau, car son domaine d'application est très large, ce qui explique sa pérennité.
Dans cet arrêt, la société Antineas a engagé des négociations avec la société civile immobilière Longson (SCI) et les consorts Y… X… pour la vente d'un terrain destiné à la construction d'un immeuble. Un projet de « protocole » de vente a donc été élaboré entre la société Antineas et la SCI avec les consorts Y…X…, mais il n'a pas été signé. Or, entre-temps, la société Antineas a vendu le bien à un tiers.
La SCI et les consorts assignent donc la société Antineas en paiement de dommage-intérêts pour rupture abusive des pourparlers précontractuels, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. Après une interjection en appel de la partie mécontente, la Cour d'appel de Nouméa donne raison, dans un arrêt du 29 juillet 2004, à la SCI et aux consorts Y… X…, en retenant le préjudice découlant de la perte d'une chance sur le manque à gagner inhérent à la rupture des pourparlers précontractuels. La société Antineas se pourvoi en cassation, au motif que la rupture des pourparlers précontractuels ne constitue pas un préjudice.
La rupture unilatérale des pourparlers précontractuels peut-elle être considérée comme une rupture abusive, causant ainsi la perte d'une chance de conclure un contrat ayant un motif déterminé ?
[...] La jurisprudence a admis pour la première fois que la faute commise dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers n'est pas la cause du préjudice consistant dans la perte de chance de réaliser les gains espérés de la conclusion du contrat, dans un arrêt Manoukian du 26 novembre 2003, rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Cet arrêt ne rejette pas toute possibilité de réparation, mais il la limite. Les tribunaux ont ici opéré une distinction entre la faute et le préjudice, il n'y a pas de lien de cause à effet direct entre la rupture abusive des pourparlers et la perte d'une chance de réaliser des gains. [...]
[...] La société Antineas se pourvoit en cassation, au motif que la rupture des pourparlers précontractuels ne constitue pas un préjudice. La rupture unilatérale des pourparlers précontractuels peut-elle être considérée comme une rupture abusive, causant ainsi la perte d'une chance de conclure un contrat ayant un motif déterminé ? La Cour de cassation a répondu par l'affirmative : Attendu que pour condamner la société Antineas à payer des dommages-intérêts à la SCI l'arrêt retient que la cour dispose d'éléments suffisants pour évaluer le préjudice de celle-ci consistant en la perte d'une chance sur le manque à gagner résultant de la disparition du programme immobilier envisagé ; qu'en statuant ainsi, alors qu'une faute commise dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels n'est pas la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE Cette problématique soulève deux points importants. [...]
[...] C'est ainsi que la Cour de cassation a cassé l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Nouméa, pour confirmer son arrêt de 2003. La Cour de cassation maintiendra une jurisprudence constante à ce niveau, puisque la chambre civile de la Cour de Cassation rendra un arrêt le 28 juin 2006, dans lequel elle confirme encore que la rupture unilatérale des pourparlers précontractuels n'est pas la cause du préjudice subit consistant dans la perte d'une chance de réaliser des gains. La Cour de Cassation, avec ces trois arrêts, prend une position constante sur le préjudice découlant de la perte de la chance sur le manque à gagner, qui résulte de la non-conclusion du contrat. [...]
[...] Les négociants d'un pourparler précontractuel se sentaient donc obligés de conclure le contrat, dès l'engagement de pourparlers. La Cour de Cassation a posé ici une limite nécessaire, en décourageant les négociants d'un pourparler qui n'avaient pas pu conclure un contrat de demander des dommages-intérêts au potentiel contractant, alors même que le contrat n'était pas valablement formé. Cette solution est d'autant plus logique que la formation du contrat répond à des conditions précises, alors que la formation des pourparlers ne répond à aucune condition de forme ni de fond particulière. [...]
[...] La SCI et les consorts assignent donc la société Antineas en paiement de dommage-intérêts pour rupture abusive des pourparlers précontractuels, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. Après une interjection en appel de la partie mécontente, la Cour d'appel de Nouméa donne raison, dans un arrêt du 29 juillet 2004, à la SCI et aux consorts Y X , en retenant le préjudice découlant de la perte d'une chance sur le manque à gagner inhérent à la rupture des pourparlers précontractuels. [...]
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