Dans la première espèce, une société a cédé la créance qu'elle détenait sur une autre au profit d'une troisième. La cessionnaire réclama paiement de cette créance au débiteur-cédé qui refusa. La cessionnaire, après avoir assigné le débiteur-cédé en justice, interjeta appel. La cour d'appel confirma le jugement de première instance, déboutant une nouvelle fois la cessionnaire de sa demande, au motif qu'aucun lien de droit n'était établi entre elle et le débiteur-cédé et que, les formalités de l'article 1690 de la chambre civile n'ayant pas été observées, la cession restait inopposable aux tiers.
Dans la seconde espèce, une société fait une vente conclue sous diverses conditions suspensives, favorables à l'acquéreur, à une autre. Cette dernière est substituée par une troisième qui ne tarde pas à demander paiement de la créance au débiteur-cédé. Même cas de figure que dans l'affaire précédente, la demande se heurte à un refus en raison de la non-application des formalités de l'article 1690 de la chambre civile, l'acquéreur substitué ayant renoncé aux conditions avant d'avoir signifié ses droits au vendeur.
Le défaut d'accomplissement des formalités de l'article 1690 de la chambre civile rend-il la cession de créance inopposable au débiteur-cédé ?
[...] Troisième chambre civile, Cour de cassation février 1985 et 12 juin 1985 - l'opposabilité de la cession de créance au débiteur-cédé Les arrêts de la Cour de cassation des 26 février et 12 juin 1985 révèlent parfaitement la complexité qui émane de la notion d'opposabilité des cessions de créance au débiteur-cédé. Dans la première espèce, une société a cédé la créance qu'elle détenait sur une autre au profit d'une troisième. La cessionnaire réclama paiement de cette créance au débiteur-cédé qui refusa. [...]
[...] Dans l'arrêt du 12 juin 1985, l'article 1690 CCiv apparaît tel un antidote capable d'éviter une violation du principe de l'effet relatif des contrats. Or c'est pourtant par lui que la cession devient opposable, qu'elle pourra pleinement agir à l'égard des tiers. L'article 1690 CCiv n'est donc pas un barrage permettant le respect de l'article 1165CCiv. Cette justification semble donc bancale. En imposant la signification de la cession au cédé, l'article permet toutefois de réduire les répercussions néfastes qu'elle pourrait avoir, le cédé jouant un rôle d'informateur. [...]
[...] n'auraient pas été respectées est énoncée clairement dans l'arrêt du 12 juin 1985, l'article 1165 C.CIV, qui renferme le principe, étant cité au visa. La cession de créance est en effet avant tout un contrat dont les parties sont le cédant et le cessionnaire. Le débiteur-cédé, tiers à l'opération, ne doit donc en aucun cas être affecté par l'opération, que cela lui soit bénéfique ou non. Les limites d'une telle justification. La doctrine contesta cette argumentation au motif qu'elle reposait sur une confusion entre l'effet obligatoire et l'opposabilité des conventions : si celles-ci produisent un effet obligatoire entre les seules parties contractantes, elles n'en sont pas moins, en principe, opposables aux tiers ou invocables par ceux-ci en tant que fait créateur d'une situation juridique (Civ juin 1938, Weill, note, DP 39). [...]
[...] Cette vision relativise le caractère indispensable de l'article 1690 CCiv. Les auteurs en demandent d'ailleurs carrément la suppression (idée reprise dans l'avant projet de réforme de la chancellerie), se préoccupant seulement de savoir par quel moyen le débiteur-cédé pourrait être informé de la cession, cherchant à tout prix à l'empêcher de se prévaloir de l'article 1240, qui déclare valable le paiement fait de bonne foi au possesseur de la créance. Une jurisprudence permettant un contrôle de la bonne foi du débiteur- cédé. [...]
[...] Or, dans l'arrêt du 12 juin 1985, si le cessionnaire a été négligent pour signifier la cession, il ne l'a pas été pour renoncer aux conditions (acte effectué sagement dans les délais). La Cour de cassation poserait donc peut- être des limites à la négligence du cessionnaire. Une solution économiquement opportune. Dans le cadre de la cession de créance, la créance est considérée comme un bien, une marchandise. La cession de créance peut donc être considérée comme une forme particulière de vente. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture