L'arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 24 juin 1998 rappelle que la solidarité entre débiteurs implique nécessairement la possibilité d'un recours exercé par l'un d'eux ayant effectué le paiement de la totalité de la dette contre ceux n'y ayant pas participé.
La solidarité passive est la modalité affectant une obligation lorsqu'il existe plusieurs débiteurs d'une dette. Elle peut être conventionnelle, autrement dit prévue par les parties au contrat, ou légale. Elle n'affecte pas seulement les relations entre le créancier et les débiteurs mais aussi les liens de droit entre les débiteurs. Ainsi, le Code civil règle la question de la répartition de la dette entre eux et les recours qui peuvent exister lorsqu'une personne a payé la part de la dette de ses codébiteurs.
Un homme et une femme prennent à bail un logement. Le contrat de bail contient une clause de “solidarité-indivisibilité” entre les preneurs pour les obligations résultant du bail. Alors que l'homme donne son congé, la femme reste dans les lieux. Après avoir payé la totalité des loyers jusqu'à son départ, cette dernière saisit le tribunal d'instance de Lyon d'une demande en paiement par son ancien colocataire de la moitié des loyers.
Dans un jugement du 6 novembre 1995, les juges du fond déboutent la demandeuse au motif qu'elle ne faisait état d'aucun accord entre elle et son ancien colocataire sur le taux de participation de ce dernier aux loyers.
[...] Il ne s'agit pas d'une règle d'ordre public mais au contraire d'une présomption simple. Ainsi, la jurisprudence, notamment dans l'arrêt du 21 février 1956, a reconnu la possibilité d'opérer la division de la dette proportionnellement aux intérêts de chacun, s'il est établi que l'intérêt des débiteurs dans la dette n'est pas identique. Le poids de la dette peut donc, dans certaines situations, être réparti de façon inégalitaire. Dans l'affaire portée ici devant la Cour de cassation, un colocataire, tenu solidairement de la dette de loyer, donne congé. [...]
[...] Effectivement, il est possible d'en déduire simplement que les juges de la Haute Juridiction refusent d'admettre que le motif avancé par le Tribunal d'Instance puisse être, à lui seul, une raison de ne pas accueillir la demande en remboursement d'un codébiteur contre un second. Cependant, bien que cette lecture soit envisageable, elle peut être critiquée. Ainsi, si la volonté de la Cour de cassation était de contester les motifs des juges du fond tout en adoptant leur position, pourquoi ne pas avoir procédé à une substitution de motif? Il s'agit peut-être d'une question d'opportunité. Cet argument peut être utilisé pour affirmer que cette seconde lecture n'est que peu défendable. [...]
[...] Un copreneur est-il toujours soumis à la modalité de solidarité affectant le paiement de loyers après son départ du logement? Dans son arrêt du 24 juin 1998, les juges de la Cour de cassation semblent répondre par l'affirmative à cette question. Effectivement, sur le fondement des articles 1213 et 1214 du Code civil, ils cassent et annulent le jugement antérieur. La division de la dette entre les codébiteurs solidaires Afin de connaître quelle est la part de chaque codébiteur d'une obligation solidaire, il n'est pas nécessaire que ces derniers aient prévu un certain taux de participation Bien que leurs intérêts respectifs à la dette puissent être pris en compte, cela n'est pas toujours le cas A. [...]
[...] Sa conjointe reste dans les lieux et continue donc d'effectuer le paiement des loyers. Ne s'agit-il pas là d'un cas dans lequel les débiteurs n'ont pas le même intérêt? Il semblerait pourtant que les juges n'en tiennent pas compte. Il n'est donc pas évoqué la possibilité pour le codébiteur ayant donné congé d'être tenu pour une part moindre que sa conjointe. Pour autant il ne faut pas en déduire que les juges excluent une telle possibilité. Cette dernière n'est peut-être simplement pas envisagée par les parties au litige. [...]
[...] N'existe-t-il pas une autre façon de comprendre l'attendu de la Cour de cassation dans cet arrêt? B. Une deuxième lecture de l'arrêt du 24 juin 1998 Force est de constater que dans cet arrêt, la Cour de cassation ne prend pas expressément position sur le point de savoir si un colocataire ayant donné congé au bailleur est toujours tenu solidairement pour les obligations résultant du bail tel que cela était stipulé dans le contrat originaire. En effet, les juges de la Haute Juridiction se bornent à affirmer “qu'en statuant ainsi, le Tribunal a violé les textes susvisés” , ils cassent et annule donc le jugement. [...]
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