Le Code civil, dans son article 1599, pose le principe selon lequel la vente de la chose d'autrui est nulle. Cette règle semble, a priori, évidente : il est impossible d'aliéner un objet sur lequel on ne dispose d'aucun droit. Cependant, en pratique, des situations complexes se présentent parfois. C'est un tel cas d'espèce qui fut soumis à la troisième chambre civile de la cour de cassation le 24 avril 2003.
En l'espèce, par acte sous seing privé en date du 23 août 1995, des époux ont souscrit au bénéfice d'une société une promesse irrévocable d'achat portant sur un immeuble, pour lequel la société bénéficiait d'une promesse de vente. La promesse d'achat prévoyait que la vente devait être régularisée par acte authentique au plus tard six mois après l'obtention d'un prêt. Une fois cette condition suspensive levée, les époux n'ont pas donné suite à la sommation de régulariser l'acte authentique. De plus, les époux ont assigné la société en annulation de l'acte sous seing privé du 23 août 1995. La cour d'appel de Montpellier, dans un arrêt du 4 septembre 2001, déclare caduque la promesse d'achat et condamne la société à restituer la somme perçue à titre de clause pénale. Cette dernière décide alors de se pourvoir en cassation.
La cour de cassation va rejeter le pourvoi, et ainsi accueillir la demande des époux. Ainsi, on peut se demander s'il est possible de vendre une chose sous condition suspensive d'en acquérir la propriété.
[...] Ainsi, l'article 1583, qui énonce que la vente est parfaite entre les parties et que la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès que le prix et la chose ont été déterminés, et ce même si la chose n'a pas été livrée ou le prix encore payé, applique à la vente le principe découlant de l'article 1138. Or ce transfert est impossible quand la chose n'appartient pas au vendeur. Donc la vente de la chose d'autrui est un contrat nul pour chose impossible. Ce raisonnement des rédacteurs du Code civil est critiquable, puisque même la cour de cassation, dans un arrêt du 24 avril 2003, avait déjà admis la possibilité d'un transfert ultérieur de la propriété. [...]
[...] La cour de cassation, en rejetant le pourvoi formé par le vendeur, va par la même occasion faire droit aux demandes des époux. Cependant, il est important de remarquer que si la cour accepte l'annulation de la convention, c'est en raison du non-respect de ses obligations contractuelles par le vendeur. En statuant de la sorte, le juge semble admettre, implicitement, l'impossibilité de vendre une chose sous condition suspensive d'en obtenir la propriété. II/ Le désaveu implicite de la vente sous condition suspensive d'obtenir la propriété La cour de cassation, en refusant d'admettre la possibilité pour le vendeur d'authentifier une convention portant sur un bien qu'il n'a pas encore acquis, va faire une application stricte de l'article 1599 du Code civil, qui interdit la vente de la chose d'autrui Cette décision peut cependant paraître surprenante eu égard à la jurisprudence antérieure A Une application critiquable de l'article 1599 du Code civil Le Code civil, dans son article 1599, dispose que la vente de la chose d'autrui est nulle : elle peut donner lieu à des dommages-intérêts lorsque l'acheteur a ignoré que la chose fût à autrui Ainsi, la cour de cassation, en refusant implicitement que la vente de la chose d'autrui soit formée, effectue une application stricte de l'article 1599 du Code civil. [...]
[...] Cependant, malgré les sommations du vendeur, les époux ne se présenteront jamais face au notaire. En effet, le vendeur n'ayant pas acquis la propriété de l'immeuble vendu, les acheteurs considéreront qu'ils n'avaient pas à régulariser la convention. B Un vendeur jugé seul responsable de la caducité du contrat Le vendeur, bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente concernant l'immeuble cédé aux époux, ne va pas lever l'option qu'il détient. En effet, la cour relève qu'à aucun moment n'est démontrée la propriété de l'immeuble vendu. [...]
[...] En effet, ces dernières n'avaient jamais convenu que le vendeur devait être propriétaire du bien au moment de la signature de l'acte authentique, rien ne permettait de déduire de la convention que les parties n'entendaient pas contracter une vente sous condition suspensive pour le vendeur d'acquérir la propriété de la chose. Cependant, la Cour déduit le délai de 6 mois accordé entre l'obtention du crédit par l'acheteur et la signature de l'acte authentique l'obligation, pour le vendeur, d'avoir obtenu la propriété du bien qu'il vend. Ainsi, la Cour de cassation considère qu'en ne se pliant pas à cette obligation la société a violé un de ses engagements contractuels. Par là même, il ne pourra pas être reproché aux époux de ne pas s'être présentés devant le notaire. [...]
[...] Dans une première partie, il conviendra de s'attarder sur les raisons qui poussent la cour de cassation à reconnaître la nullité de la convention. Diverses inexécutions contractuelles imputables au vendeur seront relevées par la cour Par ailleurs, il conviendra de remarquer que par là même, la cour de cassation désavoue implicitement la possibilité d'une vente sous condition suspensive d'obtenir la propriété de la chose (II). La sanction d'une inexécution contractuelle imputable au vendeur La cour de cassation, pour prononcer l'annulation de la convention conclue entre les époux et la société, va retenir l'inexécution des obligations contractuelles du vendeur. [...]
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