Lorsqu'il y a cession de créance (convention par laquelle un créancier, cédant, transmet sa créance à son cocontractant, cessionnaire), le débiteur cédé a la possibilité d'exciper la compensation (extinction simultanée de deux obligations de même nature existant entre deux personnes réciproquement créancières et débitrices l'une de l'autre) intervenue antérieurement aux formalités de l'article 1690 du Code civil si la cession lui a seulement été signifiée (notification faite par huissier de justice et consistant en la remise de la copie du transfert de la créance au débiteur cédé) mais non acceptée (par acte authentique). Seule la compensation survenue postérieurement à l'accomplissement de la formalité est inopposable au cessionnaire (article 1295 alinéa 2 du Code civil). Toutefois, la jurisprudence apporte une importante exception: la compensation peut être opposée au cessionnaire alors que les conditions ne sont réunies qu'après la cession de créance lorsque l'obligation de chacune des parties est regardée comme la contrepartie de l'obligation de l'autre, de telle sorte que l'exécution de l'obligation de l'un est subordonnée à l'exécution de l'obligation de l'autre (créances dites connexes).
[...] La Cour de cassation admet donc une compensation pour dettes connexes. L'accueil de la compensation en raison du caractère du lien unissant les créances C'est la valeur de la décision. La notion de connexité des créances a permis d'étendre les applications de la compensation, et avant tout en matière de procédures collectives. Il s'agit de toute procédure dans laquelle le règlement des dettes et la liquidation éventuelle des biens du débiteur ne sont pas abandonnés à l'initiative individuelle de chaque créancier, mais organisés de manière à ce que tous les créanciers puissent faire valoir leurs droits: redressement ou liquidation judiciaire. [...]
[...] IV, n°381, D note Sortais et Com juin 1993, Bull. Civ. IV, nº242), puis en matière civile (Civ. 3È mars 1989, Bull. Civ. III, Defrénois 1989, p.1391, obs Aubert). La connexité est le lien unissant deux créances nées d'un même rapport de droit qui les rend compensables malgré l'ouverture d'une procédure collective de règlement du passif. Tel est le cas entre la dette du reliquat du prix des époux Scherer envers les époux Grasset et la créance d'indemnité due par ces derniers aux débiteurs cédés. [...]
[...] Deuxièmement, le Code civil dispose que les créances doivent être fongibles (c'est le cas en l'espèce des sommes d'argent), disponibles (c'est-à-dire saisissables; la condition est ici remplie), certaines (l'existence est incontestable, ce qui permet au titulaire de pratiquer une saisie- exécution), liquides (qui est déterminée dans son montant, chiffrée) et exigibles (qui peut être aussitôt exigé, sans attendre l'échéance d'un terme ou l'avènement d'une condition). La Cour d'appel relève que la créance du cédé n'a été rendue certaine, liquide et exigible que par arrêt du 17 novembre 1989 la compensation ne pouvait donc avoir lieu avant la décision. Soit dit en passant, l'avant-projet de réforme du droit des obligations reprend ces conditions dans ses articles 1241-1 et 1244-1. [...]
[...] Ainsi justifiée, lorsqu'il s'agit de créances connexes, on comprend que la compensation puisse être opposée au cessionnaire malgré la réunion des conditions après la cession de créance. Mais la décision rendue ne manque pas de pouvoir être critiquée en raison de sa contradiction avec l'article 1295 alinéas 2 du Code civil. Il convient de nous intéresser à la portée de cet arrêt. II- Les conséquences de l'exception de compensation pour dettes connexes Les effets à l'égard du cessionnaire sont ainsi tirés du régime de la compensation et de la cession de créance Un renouvellement de la fonction de la compensation D'après la Cour de cassation, le cédé peut opposer au cessionnaire une créance postérieure dès lors qu'elle était connexe à celle que les cédants avaient sur eux (même solution en matière de subrogation: Soc mai 1987, Bull IV, n°294). [...]
[...] L'admission de l'exception de compensation pour dettes connexes doit donc être relativisée en ce que le cédant est responsable si la créance est paralysée par une cause d'extinction comme la compensation même postérieure à la cession. De façon résiduelle, une obligation d'information du cessionnaire est souhaitable. En effet, le régime de la cession de créance est inspiré de celui de la vente. Une information de la part du cédant envers le cessionnaire doit donc être réalisée à cause du risque créé par la possibilité de compensation des créances d'après M. Clavier. [...]
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