L'arrêt de la 3e Chambre civile du 20 avril 2005 peut paraître paradoxal en ce qu'il confronte une absence de reconnaissance de la responsabilité du bailleur en raison d'un manquement à une obligation lui incombant et un élargissement de la garantie qu'il doit du fait d'autres locataires.
Par acte du 19 juin 1995 des personnes physiques ont donné à bail des locaux à usage commercial de boucherie et d'habitation. Reprochant à leur bailleur de ne pas leur assurer une jouissance paisible des lieux loués et de manquer gravement à ses obligations contractuelles les preneurs l'ont assigné pour obtenir la « résolution » judiciaire du bail, se voir autoriser à délaisser les lieux et obtenir une certaine somme à titre de dommages et intérêts.
La cour d'appel de Rouen dans un arrêt du 19 juin 2003 a débouté les preneurs de leur demande. Ils se pourvoient en cassation.
[...] L'appréciation n'est pas laissée aux juges du fond puisque la Cour de cassation affirme que ceux-ci ont pu déduire l'absence de préjudice. C'est donc véritablement l'affirmation d'un haut degré d'exigence pour retenir l'existence d'un préjudice que l'on trouve dans cet arrêt. Plus que stricte l'appréciation de l'absence de préjudice peut apparaître paradoxale puisque la Cour de cassation admet qu'on la déduise de l'absence d'occupation par les preneurs de locaux qui sont condamnés par le bailleur. On a vu plus haut que la Cour ne précise guère les contours de l'obligation violée par le bailleur. [...]
[...] Enfin on pourrait le faire dépendre de l'obligation de garantie de la jouissance paisible qui implique de garantir le preneur contre les troubles de jouissance. Il est difficile de déterminer de quelle obligation la Cour de cassation reconnaît que la Cour d'appel a relevé l'inexécution. En effet les faits qu'elle retient font penser à un manquement partiel à l'obligation de délivrance ou à une modification de la chose louée, l'absence de modification de la chose louée constituant une obligation de ne pas faire prévue à l'article 1723. [...]
[...] C'est sur ce dernier qu'est fondée la jurisprudence relative à la garantie des troubles causés par les colocataires. La combinaison de ces deux textes pour appuyer sa décision est donc logique. La combinaison des textes pour circonscrire l'obligation de faire jouir paisiblement date d'ailleurs d'un arrêt de la chambre civile du 10 juin 1949. Qu'en est-il de la condition que rajoute la Cour d'appel, à savoir l'exclusion de la garantie en cas d'actes ne se rattachant en rien à la jouissance commune normale ? [...]
[...] Arrêt de la 3e Chambre civile avril 2005 L'arrêt de la 3e Chambre civile du 20 avril 2005 peut paraître paradoxal en ce qu'il confronte une absence de reconnaissance de la responsabilité du bailleur en raison d'un manquement à une obligation lui incombant et un élargissement de la garantie qu'il doit du fait d'autres locataires. Par acte du 19 juin 1995 des personnes physiques ont donné à bail des locaux à usage commercial de boucherie et d'habitation. Reprochant à leur bailleur de ne pas leur assurer une jouissance paisible des lieux loués et de manquer gravement à ses obligations contractuelles les preneurs l'ont assigné pour obtenir la résolution judiciaire du bail, se voir autoriser à délaisser les lieux et obtenir une certaine somme à titre de dommages et intérêts. [...]
[...] Une portée générale de l'obligation qui résulte de la combinaison des articles 1719 et 1725 et de la prise en compte de la jurisprudence sur les colocataires n'aboutit-elle pas à mettre à la charge du bailleur une garantie de faits sur lesquels il n'a aucune prise ? N'est- ce pas contraire à l'intention du législateur auteur de l'article 1725 ? La solution peut paraître opportune dans la mesure où elle permet au locataire auteur de la demande d'obtenir des dommages et intérêts et la résiliation du bail par la voie de la responsabilité contractuelle du bailleur alors que celle de la responsabilité délictuelle du colocataire ne lui permettrait d'obtenir que des dommages et intérêts. Elle semble néanmoins contraire à l'équité. [...]
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