Première chambre civile de la Cour de cassation, 30 octobre 2008 - force majeure et responsabilité contractuelle

Extraits

[...] Première chambre civile de la Cour de cassation octobre 2008 - force majeure et responsabilité contractuelle La violation d'une obligation peut être justifiée par certaines circonstances. Ainsi la force majeure, la cause étrangère et la faute de la victime sont des causes d'exonération, partielle ou totale, de responsabilité (article 1148 du Code Civil). La Cour de cassation se prononce, dans cet arrêt du 30 octobre 2008 rendu par la première chambre civile, sur les conditions de constitution de la force majeure en matière de responsabilité contractuelle. [...]

[...] Un évènement prévu postérieurement à la conclusion du contrat La Cour d'appel a commis une erreur en déclarant que les coupures d'électricité étaient prévisibles puisqu'annoncées publiquement Celles- ci ont en effet été prévues deux ans après la formation du contrat. Elles étaient donc imprévisibles au moment de la formation du contrat. C'est cette mauvaise appréciation de l'imprévisibilité de l'évènement qui a amené la Cour de cassation à casser l'arrêt de la Cour d'appel et à rappeler les conditions d'admission de la force majeure. La Cour de cassation avait en effet déjà fixé cette date d'appréciation de la prévisibilité ( Com novembre 1967). [...]

[...] II- Une imprévisibilité originelle Le caractère imprévisible s'apprécie au moment de la conclusion du contrat Dans le cas présent, l'évènement a été prévu après celle-ci Un caractère imprévisible appréciable lors de la conclusion du contrat La Cour de cassation mentionne un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat En effet, si l'évènement est prévisible au moment de la conclusion du contrat, le débiteur accepte sa réalisation et les conséquences qui en découlent. Il aurait pu, en effet, refuser de conclure le contrat ou le renégocier. De plus, apprécier l'imprévisibilité de l'évènement postérieurement à la conclusion du contrat remettrait en cause la sécurité juridique. [...]

[...] Une force majeure subordonnée à deux critères L'imprévisibilité était auparavant facultative Elle est maintenant nécessaire Une imprévisibilité auparavant facultative Selon la Cour d'appel, dans le domaine contractuel, dans de telles circonstances d'irrésistibilité, l'imprévisibilité n'est pas requise En effet, la jurisprudence admettait que l'irrésistibilité de l'évènement constitue à elle seule la force majeure lorsque sa prévision ne permet pas d'en empêcher les effets et à condition que le débiteur ait pris toutes les mesures possibles pour en empêcher la réalisation. Cette solution avait notamment été admise par la chambre commerciale de la Cour de cassation le premier octobre 1997 et par la première chambre civile le 9 novembre 1994. La première chambre civile de la Cour de cassation a cependant opéré un revirement de jurisprudence le 6 novembre 2002 en affirmant la nécessité de la présence des deux éléments, l'irrésistibilité et l'imprévisibilité. [...]

[...] Les deux ruptures dans la fourniture d'énergie constituent-elles pour EDF un cas de force majeure ? Selon la Cour de cassation, l'irrésistibilité ne suffit pas à caractériser la force majeure. De plus, l'imprévisibilité doit s'apprécier au moment de la conclusion du contrat. En déclarant que les coupures d'électricité étaient prévisibles et que, étant donné les circonstances d'irrésistibilité, l'imprévisibilité n'était pas nécessaire, la Cour d'appel a violé les articles 1147 et 1148 du Code Civil. Son arrêt est donc cassé et annulé. [...]