« Ensemble des relations d'affaires habituelles ou occasionnelles existant entre le public et un poste professionnel et (…) trouvant leurs sources dans des facteurs personnels et matériels conjugués » (G. Cornu), la notion de clientèle civile a été l'objet d'une jurisprudence constante tout au long des XIXe et XXe siècles. Auparavant illicite, la cession d'une telle clientèle a, par la suite, été admise par la Cour de cassation. C'est d'ailleurs dans cette lignée jurisprudentielle que s'inscrit l'arrêt du 30 juin 2004 rendu par la 1re Chambre civile de la Cour de cassation.
En l'espèce, M. Issautier, médecin, a consenti à la cession partielle d'un droit de présentation de clientèle à M. Magnant, lui aussi médecin. Autrement dit, il s'agit là d'une convention de partage de clientèle entre deux praticiens. Un arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 10 juin 1999 prononce la nullité de cette cession partielle aux motifs que la pathologie des malades concernés, en ce qu'elle requiert des soins réguliers de dialyse avec appareillage, fait obstacle à la liberté de choix de médecin traitant comme de lieu d'exécution des soins, étant précisé que la convention ne faisait rien pour préserver cette liberté de choix. M. Issautier, le cédant de la clientèle, décide alors de former un pourvoi en cassation. Il fait grief à l'arrêt d'avoir, par cette décision, violé les articles 1128 (« Il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet des conventions ») et 1134 du Code civil (« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites… ») et 12 alinéa 2 du Code de procédure civile.
La question se pose alors de savoir si, en l'espèce, il y avait atteinte à la liberté de choix du patient.
La Cour de cassation répond par l'affirmative puisqu'elle rejette le pourvoi formé par le médecin cédant au motif que si la cession de clientèle médicale n'est pas illicite, c'est à la condition que soit sauvegardée la liberté de choix du patient. Autrement dit, sans remettre en cause le principe de licéité de la cession de clientèle médicale, la Cour affirme qu'il y aurait atteinte à la liberté de choix du patient dans la mesure où ce dernier ne pourrait pas s'adresser à un autre médecin que le médecin acheteur.
[...] Or, rendre valable la cession d'un droit de présentation tout en refusant d'admettre la cession de clientèle paraissait hypocrite : les deux ne sont pas fondamentalement différents dans le résultat. La cession est en effet déguisée sous la forme d'un droit de présentation. Une évolution jurisprudentielle parait alors nécessaire l'admission par la jurisprudence de la cession de clientèle médicale C'est avec l'arrêt du 7 novembre 2000 que la Cour de cassation opère un véritable revirement de jurisprudence puisqu'elle admet la licéité de la cession de clientèle médicale. [...]
[...] Or, par un arrêt du 7 novembre 2000, la Cour de cassation a opéré un véritable revirement de jurisprudence en admettant la licéité de la cession de clientèle médicale. Ce principe sera par la suite confirmé par l'arrêt du 30 juin 2004. Par conséquent, le principe de licéité de la cession de clientèle médicale antérieurement posé est réaffirmé en l'espèce par la Cour de cassation A. Un principe antérieurement posé par la Cour de cassation La jurisprudence a pendant longtemps refusé d'accepter la cession de la clientèle médicale et, plus largement, de la clientèle civile. [...]
[...] Tout au plus, cette solution initialement dégagée par l'arrêt de 2000 aura permis d'opérer une cohérence juridique en admettant clairement la licéité de la cession de la clientèle civile, sans passer par le déguisement juridique que constituait le droit de présentation. Mais, si la consécration de la validité des cessions de clientèle civile semble devoir être approuvée, elle arrive bien tard pour certaines professions. En effet, les cessions de clientèles sont en nette régression chez les médecins : le plus souvent, les jeunes praticiens s'installent directement (l'intérêt, sur le plan pratique, est donc limité). Bibliographie - Stéphanie Porchy-Simon, Droit civil 2ème année, les obligations. - M. Bourgeois, Droit civil, obligations et responsabilité civile. [...]
[...] Tout dépendra en effet des moyens mis en œuvre, au cas par cas, pour préserver cette liberté. D'ailleurs, la Cour le rappelle puisqu'elle affirme qu'en l'espèce, rien n'a été prévu pour la conserver Outre l'absence de moyens mis en œuvre pour conserver la liberté de choix du patient, c'est la spécialisation même du médecin qui semble justifier la nullité de la cession pour violation de ce principe. Mais on peut se demander s'il n'existe pas là une confusion. En effet, c'est la situation objective du patient et de la spécialisation exercée par le médecin qui semble commander le choix des juges. [...]
[...] Cependant, même si cette notion a été confirmée par un arrêt de la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation du 2 mai 2001, aucune définition n'a été donnée : le fonds libéral ne saurait donc totalement être assimilé au fonds commercial. Quoi qu'il en soit, l'arrêt du 30 juin 2004 ne fait plus référence à ce fonds. La clientèle ne serait donc plus cessible en tant qu'élément d'un fonds libéral mais en tant qu'elle-même, indépendamment de ce fonds. [...]
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