Dans la période actuelle de rénovation du droit des contrats, il est important de constater le rôle déterminant de la jurisprudence en cette matière. S'agissant de la détermination du prix, à part certaines règles concernant la vente, le Code civil est presque muet. C'est donc la jurisprudence qui depuis le XIXe siècle, s'est emparée de ce sujet pour l'adapter aux aspirations des différentes époques, jusqu'à aujourd'hui. C'est sur une question concernant la détermination du prix que se prononçait la première chambre civile de la Cour de cassation le 29 novembre 1994.
Cet arrêt du 29 novembre 1994 est d'une grande importance au regard de la jurisprudence pour deux raisons. D'abord, en restant sur la même ligne que la jurisprudence passée, il a étendu un peu plus le principe du prix déterminable. Ensuite, et surtout, il a effectué un revirement de jurisprudence en consacrant la fixation unilatérale du prix.
En ce domaine, la Cour de cassation retourne le principe en acceptant qu'un contractant fixe lui seul le prix. C'est ce qu'il faut comprendre lorsque la haute juridiction parle de « l'exclusivité qui était réservée pour majorer son tarif ».
[...] L'arrêt de 1994 prend le contre-pied de cette jurisprudence pour affirmer que le prix du contrat peut dépendre directement, non seulement des volontés, mais d'une volonté. Par cet arrêt, il est accordé plus de place au principe de la liberté des contractants. Il est considéré qu'on est jamais aussi bien défendu que par soi même au sein du contrat, car personne ne connaît mieux nos propres intérêts et nos propres désirs que nous-mêmes. Le professionnel est moins considéré comme un danger potentiel que comme un expert, qui, connaissant mieux le marché, aura plus de légitimité et de facilité à déterminer un prix juste. [...]
[...] Le 1er décembre 1995, sur cette question encore, la chambre plénière opère un revirement. Elle affirme dans le 2e arrêt (arrêt de principe) que l'abus dans la fixation du prix ne donne lieu qu'à résiliation ou indemnisation C'est là un véritable changement très clair dans son énonciation ; sauf dans la mesure où il dépend de la définition de la notion d'abus. Il est remarquable que ce soit toujours au moment de la fin du contrat que les contractants agissent en justice lors du problème de prix. [...]
[...] Certains considèrent que la solution de la Cour de cassation de 1994 constitue une brèche dans la lutte contre l'arbitraire. Celle-ci privilégierait le principe de la libre concurrence à la lutte contre l'arbitraire. Ce n'est en fait qu'un exemple, en droit des contrats, de l'ingérence de plus en plus fréquente de l'économie dans le droit en général. En l'espèce, selon cette doctrine la solution de 1994 n'est finalement pas si différente de la jurisprudence antérieure en ce qu'elle consacre le principe de la libre concurrence. [...]
[...] Une autre proposition a été faite, qui consistait à exiger de celui qui fixe le prix la justification de son choix. C'est la solution aujourd'hui consacrée par l'avant-projet de réforme du droit des contrats. [...]
[...] Cette situation mettait donc le fixateur du prix dans une situation très précaire, contrairement à ce que l'on aurait pu penser au premier abord. C'est aussi par une théorie de l'ouverture à la concurrence qu'est régi l'arrêt de 1994. Celui-ci permet la fixation unilatérale du prix dans le contrat. Donc logiquement, sans qu'il y ait de nécessité de concertation, celui qui connaît le mieux les prix pratiqués sur le marché va pouvoir décider du prix. Dans un premier temps, cette solution répond à l'impératif de rapidité dans la vie économique. [...]
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