« L'absence de cause entendue comme le défaut de contrepartie est sanctionnée très différemment selon que l'on retient la théorie classique ou la théorie moderne des nullités » (MM. Terré, Simler et Lequette, Droit civil, les obligations, précis). Par un arrêt en date du 29 mars 2006, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a eu l'occasion de se prononcer quant aux critères permettant de distinguer la présence de l'application d'une nullité absolue ou relative, conformément à la théorie moderne, ainsi que sur les modalités d'application des prescriptions de l'action en nullité.
Les demandeurs effectuent des contrats de vente à titre onéreux, par lesquels ils acquièrent chacun un bien immeuble, une « chambre hôtelière » par une société d'aménagement et d'exploitation. Ils acceptent également d'adhérer à la société en « participation club » de l'hôtel du golf qui partage les produits et les charges du fonds de commerce d'hôtel-restaurant dirigé par une société tierce. Toutefois, la participation à cette société engageait les membres aux bénéfices et pertes ; ainsi, lorsque les demandeurs reçoivent une demande de participation aux dettes fixées en Assemblée Générale le 25 avril 1995, ceux-ci s'empressent de demander la nullité des actes de vente, le paiement de dommages-intérêts et la résolution des contrats, pour absence de cause : en effet, s'ils ont contracté, c'était dans le but que leur investissement génère un profit, et qu'ils n'auraient en aucun cas à assumer les pertes d'exploitation de l'hôtel, qui étaient normalement prises en charge par la société qui leur a vendu la chambre hôtelière selon une convention de porte-fort.
[...] En effet, la Cour d'appel statuant sur renvoi conclue en un premier temps que la demande de nullité des conventions passées au motif de la découverte d'un dol ne pourrait être accueillie étant donné que la prescription serait acquise, le dol, n'ayant pas été découvert au jour où les requérants apprirent suite à une assemblée générale qu'ils devaient participer aux pertes de la société, mais au jour même de la formation des conventions dont l'annexe de la notice d'information concernant les membres supportant la charge des dettes semblait vague, imprécise, en l'absence de date et de signatures. [...]
[...] Suivant cette décision, le défaut de cause ne doit donc pas être conçu comme l'absence d'un élément essentiel débouchant sur une nullité absolue du contrat. Cette décision atteste donc de l'abandon de la conception dite organique de la nullité au profit d'une analyse moderne bien que déjà relativement ancienne (V. E. [...]
[...] Il semble donc incontestable qu'ils agissent dans leur intérêt privé, et non pas dans un intérêt général : ainsi, effectivement comme l'accorde en l'espèce la Cour de cassation, quiconque peut demander la nullité absolue d'une convention puisqu'il en va à la protection de l'intérêt général, de l'ordre public et des bonnes mœurs, même la partie insatisfaite de la convention ; mais puisque finalement l'on se trouve dans un cas de nullité relative, seul peut agir celui dont l'intérêt était spécialement protégé par la règle violée : celui qui a été victime, par exemple, d'un vice du consentement, ou d'une absence de cause objective, ou d'une lésion, ou qui était l'objet d'une incapacité de protection. Ainsi, alors que les demandeurs se prévalaient du fait que ce n'était pas parce qu'ils étaient lésés qu'il s'agissait d'une nullité relative, ce que confirme la Cour, ceux-ci se retrouvent tout de même au seing d'une nullité relative, dont ils peuvent eux seuls la revendiquer en justice. [...]
[...] Selon la théorie classique, la cause est un élément essentiel du contrat ; on peut dès lors se demander que se passe-t-il lorsqu'il y a absence de cause ? En cas d'absence de cause, en vue de son importance, la tradition penche pour le fait d'entacher de nullité absolue des conventions : en effet, lorsque fait défaut dans une convention la contrepartie dans un contrat synallagmatique la nullité est absolue. C'est le cas lorsqu'une vente est dépourvue de cause, ou repose sur une fausse cause, voir sur une cause illicite, ce qui entache de nullité absolue la convention passée (Cass, 3e civ avril 1953) En l'espèce, les demandeurs effectuent un contrat de vente, dans lequel ils acquièrent deux biens immeubles, tout en adhérant en participation club à la société afin de partager les produits et les charges du fonds de commerce : en effet il s'agissait d'une vente à la substitution des acquéreurs dans les obligations du vendeur résultat de la société en participation. [...]
[...] Gaudemet, Théorie générale des obligations,) Ainsi, dans la mesure où elle ne protège qu'un intérêt particulier, l'absence de cause entraîne une nullité relative, invocable par la seule partie protégée, pouvant éventuellement faire l'objet d'une confirmation et qui est soumise à la prescription quinquennale. Que le contrat ne puisse remplir sa fonction sociale d'échange ne suffit donc pas à considérer qu'un intérêt général est en cause : la Cour suprême reprend indéniablement l'idée d'économie voulue par les parties en évoquant le défaut de cause tenant à l'impossibilité de réaliser un profit mais ce critère ne peut donc justifier l'annulation du contrat pour absence de cause. (3ème civ décembre 1999). [...]
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