Nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui. C'est alors l'action de in rem verso qui permet à la personne appauvrie, qui a payé et permis un enrichissement sans cause, d'agir pour obtenir le remboursement de la chose versée. Cependant, l'arrêt de 1892 pose un principe qui contient toutefois quelques lacunes, et c'est par la suite la jurisprudence, au fur et à mesure, qui précise et délimite cette théorie, mais ces lacunes ne sont pas toutes comblées, et c'est notamment à ce moment-là que cet arrêt de la 1re chambre civile de la Cour de cassation du 25 février 2003 intervient.
En l'espèce, la Maison de retraite et de gériatrie de la Fondation de Rothschild hébergeait les époux X. En 1992, un jugement fixe la répartition de la créance alimentaire entre les enfants et les petits-enfants des deux époux, mais les obligations résultant de ce jugement n'ont jamais été exécutées. Suite au décès des consorts X en 1993, la Maison de retraite réclame aux descendants des défunts le paiement des « frais de séjour non soldés ».
La question qui se pose ici est de savoir si l'appauvrissement sans cause est une condition nécessaire pour retenir la théorie de l'enrichissement sans cause. L'enrichissement indirect sans cause peut-il donc faire l'objet d'une action de in rem verso ?
[...] Sans non plus dire que la Cour de cassation exclut la faute ou l'intérêt personnel de l'appauvri de la cause de son appauvrissement, on peut remarquer qu'elle dissocie ces deux éléments. La faute ou l'intérêt personnel de l'appauvri ne représenteraient, s'ils étaient retenus, une exclusion complète de la théorie de l'enrichissement sans cause, et donc de l'action de in rem verso, mais en réalité ce sont des conditions autonomes désormais, puisqu'on ne peut plus les rattacher à la cause de l'appauvrissement, mais peuvent exclure tout de même l'action de in rem verso indépendamment de ce rattachement. [...]
[...] Le principe de subsidiarité s'applique donc à cette action, et même si avant cette interprétation était stricte, aujourd'hui, l'action fondée sur l'enrichissement sans cause peut être exercée à chaque fois que le demander est en pratique dans l'impossibilité concrète d'exercer une autre action pour obtenir remboursement. Cette action permet à l'appauvri d'obtenir une indemnisation de la part de l'enrichi. Cette indemnisation correspond soit au montant de l'appauvrissement, soit à celui de l'enrichissement, et le juge choisira la moins élevée des deux sommes. [...]
[...] Cependant, la Cour d'appel ainsi que les descendants des consorts X estiment qu'il n'y a pas d'enrichissement sans cause, à partir du moment où l'appauvrissement trouve une cause dans le rapport contractuel qui liait la maison de retraite aux époux X. La question qui se pose ici est de savoir si l'appauvrissement sans cause est une condition nécessaire pour retenir la théorie de l'enrichissement sans cause. L'enrichissement indirect sans cause peut-il donc faire l'objet d'une action de in rem verso ? [...]
[...] En l'espèce, puisque la Cour de cassation va à l'encontre de la décision de la Cour d'appel, elle retient donc qu'il y a eu un enrichissement sans cause, même indirect, de la part des descendants des époux en relation avec l'appauvrissement de la maison de retraite. Ainsi, puisque la maison de retraite a eu un appauvrissement égal à l'enrichissement (équivalent à tout ce qui n'a pas été dépensé par les descendants), le montant de l'action de in rem verso sera celui de l'appauvrissement ou de l'enrichissement. [...]
[...] Mais en plus de cette condition, il faut qu'il y ait un lien de causalité entre l'appauvrissement et l'enrichissement, et cette corrélation doit être prouvée par le demandeur. Concernant la seconde condition, la jurisprudence Boudier du 15 juin 1892 nous dit que l'enrichissement et l'appauvrissement ne doivent pas découler d'une cause, qu'elle soit légale, judiciaire, contractuelle ou même délictuelle. S'il existe une cause légitime, on ne peut pas utiliser cette théorie. Cependant, la théorie de l'enrichissement sans cause ne peut être retenue en cas de faute de la part de l'appauvri, dans quel cas il est privé de la possibilité d'utiliser l'enrichissement sans cause, et donc d'exécuter l'action de in rem verso. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture