L'alinéa 3 de l'article 1134 sort de plus en plus de l'ombre que jette sur lui l'impressionnant alinéa premier du même texte. Le principe de force obligatoire du contrat est ainsi prolongé par l'exigence d'une exécution de bonne foi.
La compagnie générale des eaux (CGE) avait, pendant plusieurs années, omis de facturer les fournitures d'eaux pour deux immeubles HLM. Dans les limites de la prescription , elle a alors demandé le paiement de ces fournitures à l'office HLM qui a demandé reconventionnellement que la CGE soit condamnée à des dommages et intérêts du même montant que la somme due.
Les juges du fond ont fait droit à cette dernière demande, estimant que le défaut de facturation constituait une faute contractuelle qui avait entraîné un préjudice égal à la dette avec laquelle il se compense.
La Cour de cassation a censuré cette décision au visa de l'article 1134 alinéa 3 du Code civil.
Elle a ainsi répondu par l'affirmative à la question suivante : l'obligation d'exécuter le contrat de bonne foi, implique-t-elle pour celui qui se sait débiteur d'une somme d'argent le devoir d'avertir son cocontractant de l'absence de facturation?
En décidant que la faute contractuelle retenue par la Cour d'appel à l'encontre de la CGE est neutralisée par la faute de l'office, la Cour de cassation contribue à préciser la portée de l'article 1134 alinéa 3. La bonne foi contractuelle prolonge en effet le principe de la force obligatoire du contrat.
[...] La bonne foi contractuelle prolonge en effet le principe de la force obligatoire du contrat (II). I. La mauvaise foi du débiteur est une faute contractuelle II. La bonne foi est un prolongement de la force obligatoire du contrat I.Si le créancier a bien commis une faute celle-ci est neutralisée par la mauvaise foi du débiteur A. La faute contractuelle du créancier Dans le contrat qui liait en l'espèce la CGE et l'office HLM, l'obligation principale de celle-là était la fourniture de l'eau alors que celui-ci devait en payer le prix. [...]
[...] Le devoir de coopération entre contractants Il existe actuellement dans la jurisprudence deux séries de solutions fondées sur l'article 1134 alinéas 3. D'abord, la jurisprudence a reconnu que l'exigence de bonne foi interdit à une partie certains comportements abusifs et notamment le fait d'invoquer brutalement des clauses qui lui permettent de se dégager du contrat telles que les clauses résolutoires, de dédit ou de résiliation unilatérale. Même lorsque ces clauses sont invoquées à la suite de l'inexécution par une partie de ses obligations, appliquées à la lettre et mises en œuvre de mauvaise foi, elles peuvent ruiner la force obligatoire du contrat (par exemple commandement de payer envoyer en période de vacances pour faire jouer la clause résolutoire). [...]
[...] Le fait de ne pas provisionner dans les charges locatives une certaine somme pour la consommation d'eau est un comportement pour le moins imprudent pour un professionnel de la gestion d'immeubles locatifs. Le préjudice trouve donc au moins en partie sa source dans une faute de l'office HLM et un partage de responsabilité aurait été plus approprié. Ce n'est cependant pas cette imprudence qui a motivé la cassation, mais le fait que l'office HLM n'ait pas averti la CGE du défaut de facturation. [...]
[...] Une partie doit respecter les intérêts de l'autre partie, mais il ne faut pas exiger d'elle qu'elle oublie les siens. Or, pour ce qui concerne le problème soulevé en l'espèce, un débiteur a presque toujours intérêt à ne pas payer sa dette ou du moins, à la payer aussi tard que possible. Et ce serait peut-être pousser les exigences de la bonne foi un peu loin que de lui demander d'avertir en toute hypothèse son créancier qui néglige de lui réclamer le paiement. [...]
[...] et tenu d'exécuter de bonne foi le contrat . devait vérifier si cette fourniture lui était facturée La solution étant fondée sur la bonne foi contractuelle, il est évident que l'Office devait ensuite signaler à son cocontractant le défaut de facturation. Faut-il déduire de cette décision que , de façon générale , l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat implique pour celui qui se sait débiteur d'une somme d'argent , le devoir d'avertir son créancier négligent si celui- ci ne réclame pas le paiement? [...]
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