Les époux Saint-Arroman ont confié au commissaire-priseur Rheims, la vente aux enchères publiques d'un tableau attribué par tradition familiale à Nicolas Poussin. L'oeuvre fut inscrite au catalogue de la vente comme attribuée à l'École des Carrache. Cette dernière fût adjugée en février 1968 à un marchand pour 2200 F. L'œuvre a été préemptée par l'État pour le musée du Louvre qui l'a, par la suite, exposée comme une oeuvre de Nicolas Poussin.
Par jugement du 13 décembre 1972, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé la nullité de la vente pour vice de consentement des vendeurs en raison de l'erreur sur la substance. Ce jugement a été infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 février 1976, puis cassé par arrêt du 22 février 1978 par la cour de cassation.
Il est intéressant d'analyser cet arrêt car il pose les problèmes « à l'envers ». En effet, ce sont les vendeurs qui veulent obtenir la nullité de la vente et non les acheteurs comme c'est le cas la plupart du temps. De plus, cette affaire a eu de nombreuses répercussions dans la mesure où elle a ouvert la voie à plusieurs autres contentieux de ce type en matière d'acquisitions. Le contentieux le plus caractéristique du marché de l'art porte sur les contestations relatives à l'authenticité des pièces, qui constitue une qualité substantielle dont la contestation peut amener à l'annulation de la vente pour " erreur sur la substance " (article 1110 du Code civil). Sur le plan juridique, l'affaire a apporté des éléments importants à la théorie générale des contrats et à l'interprétation de l'erreur sur les qualités substantielles pouvant entraîner la nullité de la vente dans le cadre de l'application de l'article 1110 du Code civil.
L'erreur sur la substance constitue-t-elle une erreur vice de consentement dans le cas ou la conviction de l'authenticité du tableau aurait été établie avant la vente?
[...] Par jugement du 13 décembre 1972, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé la nullité de la vente pour vice de consentement des vendeurs en raison de l'erreur sur la substance. Ce jugement a été infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 février 1976, puis cassé par arrêt du 22 février 1978 par la Cour de cassation. Il est intéressant d'analyser cet arrêt car il pose les problèmes à l'envers En effet, ce sont les vendeurs qui veulent obtenir la nullité de la vente et non les acheteurs comme c'est le cas la plupart du temps. [...]
[...] Il faut qu'en l'espèce que l'erreur ait pour objet la substance du contrat. L'arrêt du 22 février semble trancher la question relative au doute sur la réalité ; ainsi, il peut exister une erreur qui va être source de la nullité d'un contrat même lorsque la réalité est incertaine, mais que la conviction est ferme. L'arrêt va avoir une valeur importante de par la procédure rare et va pouvoir servir d'exemple à d'autres litiges. La persistance des débats et des enjeux théoriques Le 22 février 1978, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu entre les parties le 2 février 1976 au motif que la cour d'appel n'avait pas recherché si, au moment de la vente, le consentement des vendeurs avait été vicié par leur conviction erronée que le tableau ne pouvait pas être une oeuvre de Nicolas Poussin. [...]
[...] La croyance des époux ne concordant pas avec la réalité même incertaine, il y avait bien erreur. Pour se prononcer sur l'existence d'un vice du consentement au moment de la formation du contrat, les juges du fond peuvent faire état d'éléments d'appréciation postérieure à cette date. Le couple vendeur peut évoquer l'erreur sur sa propre prestation bien qu'en général, l'erreur du contrat porte sur la prestation reçue de son partenaire. Dans le cas des œuvres d'art, l'erreur la plus souvent alléguée est celle de l'acheteur qui croyait acquérir un tableau authentique. [...]
[...] En effet, le couple ne semblait pas avoir de connaissances particulières en matière d'art, c'est pourquoi ils avaient pris la précaution de consulter un expert. Ces derniers avaient dès lors toute confiance en son verdict étant donné sa qualification. Cependant, une autre question se pose: il s'agit de savoir si la vente a été consentie dans la conviction erronée que le tableau ne pouvait pas être une œuvre de Nicolas Poussin. II/ Problème posé par la conviction de l'erreur lors du contrat Le fait que «seule compte la conviction au moment de la vente» nous questionne sur les débats et enjeux théoriques actuels «Seule compte la conviction au moment de la vente» C'est au jour de la conclusion du contrat que doit être prise en considération la conviction de l'erreur. [...]
[...] Le jour où le juge statue, le tableau n'est pas considéré comme un tableau authentique de Nicolas Poussin alors que c'est peu être le cas. Une telle solution comporte de grands dangers pour le marché des œuvres d'art. En effet, leur attribution reste dans la majorité des cas sujette à discussion, ce qui ruine inévitablement la sécurité juridique. Si on admet que des ventes peuvent être remises en cause au prétexte d'une découverte, cela dissipe le mystère de l'authenticité de l'œuvre. [...]
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