L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 16 octobre 2001 apporte une contribution intéressante à la notion de contestation potestative, à son identification, et à ses effets.
Lorsque des cocontractants affectent leurs obligations de conditions, cela leur permet d'appréhender l'avenir en prenant en considération le hasard ou des événements qui ne surviendront pas nécessairement. Pour autant, cela ne doit pas entraîner la possibilité pour l'un d'eux de se réserver la maîtrise de l'obligation.
Le propriétaire d'une clinique conclut avec différents médecins des contrats afin de prévoir l'exercice de l'activité de ces derniers au sein de l'établissement. L'une des clauses de ces contrats précise qu'en cas de cessation d'activité de la clinique, ils prendraient fin sans que les cocontractants ne puissent exiger d'indemnité. Ce propriétaire informe par la suite les médecins de la fermeture prochaine de la clinique en raison de difficultés de gestion, les contrats sont alors rompus en application de la clause. Les médecins contestant celle-ci, ils assignent le propriétaire en justice pour obtenir une indemnisation pour rupture abusive du contrat et de dommages-intérêts complémentaires. Les juges du fond, dans un arrêt du 12 janvier 1966, ordonnent une expertise dans le but, notamment, de caractériser lesdites difficultés de gestion. Un second arrêt datant du 29 octobre 1999 et rendu après dépôt du rapport des experts nommés déboute les médecins de leur demande d'indemnisation pour rupture abusive du contrat et de dommages-intérêts complémentaires. La cour d'appel motive sa décision en expliquant que, la clause n'étant pas purement potestative, elle ne peut être déclarée nulle. Elle met également en avant le fait qu'à la prise de décision de fermeture de la clinique, la situation était irrémédiablement compromise.
[...] Une analyse contemporaine dont fait notamment partie la thèse de Taisne[1] admet cependant que la nullité puisse être prononcée à l'égard de ces deux types de conditions. Force est de constater que l'arrêt du 16 octobre 2001, en application de cette nouvelle conception, n'a pas égard au fait que la condition soit résolutoire ou suspensive. Ainsi, les juges se contentent de relever que cour d'appel . a souverainement constaté qu'elle (la clause litigieuse) n'était pas purement potestative”. Cependant, la clause ayant pour but de préciser qu'aucune indemnité ne serait versée si l'activité de la Clinique cessait, il s'agit d'une condition résolutoire. [...]
[...] La cour d'appel motive sa décision en expliquant que, la clause n'étant pas purement potestative, elle ne peut être déclarée nulle. Elle met également en avant le fait qu'à la prise de décision de fermeture de la clinique, la situation était irrémédiablement compromise. Les médecins forment alors un pourvoi en cassation. Ils reprochent au premier arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes. Ils se fondent sur les articles 1170 et 1174 du Code civil pour affirmer que la clause litigieuse était potestative et aurait dû être nulle. [...]
[...] L'arrêt d'appel et l'arrêt de rejet de la Cour de cassation désignent alors cette clause comme étant une condition. Cependant, n'aurait-il pas été possible d'estimer qu'il s'agissait une clause limitative de responsabilité, le débiteur affirmant qu'en cas de rupture du contrat, il n'y aurait lieu à aucune indemnité? Une telle analyse de cette clause tient peut être au fait que les parties ne l'ont pas invoquée comme ayant une nature différente. Une condition potestative résolutoire peut ainsi être licite mais force est de constater qu'il semblerait que l'élément primordial soit son caractère simplement potestatif. [...]
[...] Elle peut également avoir simplement considéré que les juges du fond ont pu, seuls, affirmer que les parties au contrat désiraient affecter leur obligation d'une modalité. D'autre part, la Cour de cassation considère que la cour d'appel a pu affirmer que la clause n'était pas nulle. Pourtant, l'article 1174 du Code civil dispose “toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige”. Force est donc de constater que la condition ne doit pas seulement être déclarée nulle, ce n'est toute l'obligation qu'elle affecte qui doit être annulée. Il s'agit peut-être, ici, d'une question d'opportunité. [...]
[...] Ainsi, lorsque la réalisation d'une clause ne dépend pas uniquement de l'arbitraire du débiteur, elle n'est pas considérée comme potestative et est donc valable. Les juges auraient donc pu faire application de ce critère et auraient alors pu relever, que la clause “pouvant permettre une cessation pour toutes causes, ainsi que celles étrangères à la volonté ou au pouvoir du médecin propriétaire” tel que le précise la Cour d'appel, elle était valable puisqu'elle ne dépendait pas uniquement de la volonté du débiteur s'obligeant. [...]
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