Dans un arrêt du 13 décembre 2005 la 1ere Chambre civile de la Cour de cassation affirme que la potestativité de la condition stipulée par une clause d'un contrat n'affecte pas la validité du terme prévu selon la même clause et à la survenance duquel une obligation est subordonnée.
Par acte authentique du 10 juin 1995 un individu a consenti un prêt à une personne qui a constitué une hypothèque sur un bien immobilier lui appartenant, en garantie du remboursement de ce prêt. L'acte stipule que le prêt sera remboursable à la vente du bien par le propriétaire ou au plus tard à son décès.
La Cour retient l'affectation de l'obligation de remboursement par deux modalités alternatives : une condition potestative et un terme valable.
[...] Il s'agirait en effet d'une renonciation au bénéfice du terme valable en vertu des articles 1186 et 1187 du Code civil : rien ne remet en cause la présomption de stipulation du terme en faveur du débiteur et le bénéficiaire du terme peut toujours y renoncer et effectuer un paiement anticipé valable. Quant au caractère potestatif de ce remboursement anticipé il lui est inhérent. Les professeurs Philippe Malaurie et Laurent Aynès, quant à eux, proposent d'y voir un terme potestatif, valable, dans la mesure où la potestativité ne concerne pas l'existence de la dette mais son exigibilité. Ils tirent eux aussi cette conclusion de la coexistence de la condition avec un terme de survenance objectivement inéluctable. [...]
[...] Il y a pourvoi en cassation. Lorsqu'une même obligation est subordonnée alternativement à la réalisation d'une condition et à la survenance d'un terme, la potestativité de la condition affecte-t-elle la validité du terme, et par conséquent celle de l'obligation elle-même ? La Cour casse et annule l'arrêt aux visas des articles 1174 et 1186 du Code civil et dit n'y avoir pas lieu à renvoi conformément aux prévisions de l'article 627 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile. Elle estime en effet que la cour d'appel a violé l'article 1174 du Code civil par fausse application et l'article 1186 par refus d'application dans la mesure où le caractère potestatif de la condition prévue par la clause n'affectait pas la validité du terme, à la survenance duquel, selon la même clause, le remboursement du prêt était subordonné. [...]
[...] Néanmoins Cécile Pérès, qui reprend l'argumentation de Jacques Guestin, approuve en l'espèce la qualification de condition potestative. Jacques Guestin souligne en effet l'importance d'une appréciation exacte de la portée de l'intervention d'un tiers dans la distinction entre conditions mixtes et conditions potestatives. Il jugeait satisfaisante la solution de l'arrêt du 15 mars 1974 rendu par la Cour d'appel de Paris qui retenait le caractère potestatif d'une condition suspendant le remboursement d'un prêt à la vente d'un immeuble puisque libres de na pas vendre, les emprunteurs auraient pu conserver indéfiniment les sommes reçues D'autre part l'articulation entre les deux modalités alternatives est susceptible de remettre en cause la qualification de condition de la stipulation selon laquelle le prêt sera remboursable à la vente de la maison de l'emprunteur. [...]
[...] L'arrêt rendu le 14 décembre 2000 par la cour d'appel de Rennes accueille cette demande. Il énonce en effet que la clause subordonne la condition de remboursement à la seule volonté de l'emprunteur de décider ou non de vendre son bien et s'analyse selon les termes de l'article 1174 du Code civil en une clause potestative qui affecte de nullité non pas l'existence du prêt, la remise de la chose n'étant pas subordonnée à la clause, mais l'obligation de restituer par l'emprunteur, de sorte que la somme prêtée doit être immédiatement restituée. [...]
[...] La solution pose deux problèmes différents, le premier étant lié à une absence apparente d'application de l'article 1174 du Code civil, le second à un manque d'explicitation par la Cour des conséquences de la solution. L'article 1174 dispose que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige La solution de la Cour ne respecte donc pas la lettre de l'article. En effet elle affirme l'absence d'influence de la potestativité de la condition sur la validité du terme. [...]
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