Les époux Gaillard notifient le 29 mars 1974 à la SAFER leur intention de vendre deux parcelles de terre pour un prix de 20 000 francs. Mais le 13 avril 1974, M. Gaillard décède. Le 9 mai 1974, la SAFER fait connaître à Madame Gaillard son intention de préempter. Deux ans plus tard, le 18 mai 1976, la SAFER reçoit une nouvelle notification de vente de ces mêmes terres au prix de 35 000 francs, mais cette fois-ci de la part de Madame Gaillard et de ses enfants.
La SAFER répond que cette notification est sans objet, car la vente a été définitivement formée le 9 mai 1974 par son acceptation du droit à préempter. Elle intente donc un recours devant les juridictions judiciaires afin de faire déclarer la vente parfaite à cette date. Les juges du fond la déboutent de sa demande, en cela la SAFER décide de se pourvoir en cassation. En effet, le demandeur estime que la vente est parfaite, car il y a eu acceptation de l'offre et donc qu'une obligation de contracter pèse sur les héritiers de M. Maillard. En revanche, le défendeur estime que de par le fait que M. Maillard soit décédé avant l'acceptation de l'offre par la SAFER, la vente n'a pas été conclue puisque l'offre n'avait plus lieu d'être.
Le décès du pollicitant amène-t-il à la caducité de l'offre émise avant sa mort ?
[...] Un arrêt consacrant un revirement de jurisprudence en rupture avec la doctrine majoritaire L'attendu de principe de cet arrêt est novateur. En effet, la jurisprudence antérieure insistait sur l'exact contraire de ce principe, en ce que le décès du pollicitant rendait l'offre caduque. Cette position jurisprudentielle date d'un arrêt très ancien, du 21 avril 1891 de la Chambre des requêtes de la Cour de cassation. Bien que n'ayant qu'une portée limitée en ce que ses termes font corps avec l'espèce appréciée, cette position n'a pas changé en plus de 70 ans, avant que n'intervienne une confirmation davantage explicite. [...]
[...] Sa réponse doit être parvenue au bailleur dans le délai de deux mois ci-dessus visé, à peine de forclusion, son silence équivalant à une renonciation au droit de préemption La loi est ici sans équivoque, la SAFER doit se prononcer dans les deux mois, et a priori cette obligation ne concerne qu'elle et elle seule. Mais par extension, cette obligation atteint également le pollicitant. En effet, pour pouvoir assurer pleinement à la SAFER son droit de réflexion durant un délai de réflexion, le pollicitant ne doit pas retirer son offre. [...]
[...] Ce cumul de qualité en la personne du survivant justifie le maintien de l'offre par delà le décès de l'autre pollicitant, comme le fait remarquer Jacques Mestre. Par ailleurs, il y a bien une obligation de conclure puisqu'il ne se plaide plus que l'offrant est tenu responsable civilement du préjudice qu'il a causé en revenant sur son offre alors que son destinataire pouvait espérer à son maintien, notamment dans l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 22 mars 1972, quelles que soient les circonstances entourant cette rupture, puisque comme le dit Jean Luc Aubert c'est bien du retrait qu'il s'agit et de lui seul Ces éléments nous amènent donc pertinemment à affirmer qu'il existe une obligation de conclure le contrat lorsque les conditions posées au destinataire sont acceptées et si le pollicitant ne peut s'en acquitter, c'est bien sur ses héritiers que pèsent cette obligation de contracter. [...]
[...] En effet, le demandeur estime que la vente est parfaite car il y a eu acceptation de l'offre et donc qu'une obligation de contracter pèse sur les héritiers de M. Maillard. En revanche, le défendeur estime que de par le fait que M. Maillard soit décédé avant l'acceptation de l'offre par la SAFER, la vente n'a pas été conclue puisque l'offre n'avait plus lieu d'être. Le décès du pollicitant amène-t-il à la caducité de l'offre émise avant sa mort ? La Cour de cassation répond à cette question en affirmant que l'offre émise par le pollicitant est transmise à ses héritiers lorsque celui-ci meurt. [...]
[...] Il a fallu attendre un peu moins de dix ans et un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 10 décembre 1997 pour que soit finalement reprise cette solution tombée aux oubliettes depuis 1989. L'espèce est proche de celle de l'arrêt commenté en ce que l'offre a été émise dans les deux cas par un couple, mais également de par l'existence d'un délai d'attente de la part du pollicitant. Mais à la différence de l'arrêt du 9 novembre 1983, la Cour de cassation consacre pleinement la théorie de la dualité de l'offre de Jean Luc Aubert, en ce que le décès du pollicitant n'avait pas pu rendre l'offre caduque puisque les époux s'étaient engagés à maintenir leur offre jusqu'à une certaine date, et que le décès du mari était intervenu avant cette même date. [...]
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