Une commune signe avec une société, une convention dénommée « bail de location de terrains pour l'exploitation d'une carrière de pierres » prévue pour une durée de 15 ans renouvelable par période de 9 ans moyennant le paiement d'une redevance annuelle fixe et d'une redevance proportionnelle au nombre de mètres cubes de matériaux enlevés. Douze ans après, la commune assigne la société devant le tribunal d'instance, juridiction compétente exclusivement en matière de baux (ancien article R321-1 du Nouveau Code de procédure pénale, pour voir prononcer la nullité du bail à caractère perpétuel. La société invoque l'incompétence de la juridiction civile, déniant au contrat la nature d'une location.
La question de droit à laquelle se voit confrontée la Cour de cassation est ainsi la suivante : le contrat de concession de carrière s'analyse-t-il en un contrat de bail ?
[...] C'est pourquoi la demanderesse assigne la société devant le tribunal d'instance. Si le contrat est un bail, le fait que la demanderesse s'oppose à la requalification du contrat par le juge, pouvoir conféré par l'article 12 du Nouveau Code de Procédure Civil Le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée parait justifié. Le contrat n'étant pas en contradiction avec le droit existant, il semble légitime de respecter l'intitulé donné par les parties et de faire ainsi usage de l'article 1134 du Code civil : Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. [...]
[...] Elle considère que celle-ci est un contrat de vente de matériaux et de meubles par anticipation B. La qualification retenue : un contrat de vente de matériaux et de meubles par anticipation La Cour de Cassation, après avoir rejetée la qualification de contrat de bail, utilise l'article 12 du NCPC pour requalifier la convention en vente de matériaux et de meubles par anticipation : Mais attendu, que sans statuer par une disposition générale, l'arrêt recherchant la commune intention des parties retient que le contrat conclu entre celles-ci donne à l'entreprise le droit d'extraire et de disposer des matériaux extraits de la carrière et énonce à bon droit qu'il ne peut y avoir contrat de louage lorsque le preneur consomme la substance même de la chose, objet du contrat. [...]
[...] Par exemple, il a été jugé que la convention passée par le propriétaire d'un fonds rural (un pré) qui cède les fruits de son terrain à un tiers qui les récolte lui-même ou par l'intermédiaire de ses bêtes auxquelles il fait brouter l'herbe, peut recevoir la qualification de bail dans la mesure où cette dernière est une ressource renouvelable. Par ailleurs, la solution de la Cour de Cassation est légitime dans la mesure où sans cette requalification de la convention en contrat de vente de matériaux et de meubles par anticipation, la restitution de la chose, conformément aux exigences du régime du bail, aurait été impossible. [...]
[...] Celui-ci serait alors analysé, en l'espèce, comme un acte complexe comportant principalement une vente de matériaux à extraire par anticipation, partie soumise au régime juridique de la vente et à titre secondaire, un bail accessoire portant sur un sol à occuper, partie soumise au régime juridique des baux. Il reste toutefois que la jurisprudence n'admet que de manière exceptionnelle ce dépeçage du contrat. Par ailleurs, la requalification est susceptible de nuire à la prévisibilité juridique. En effet, la qualification retenue par le juge, grâce à son interprétation de la convention, peut différer celle choisie par les parties. [...]
[...] La solution de la Cour de Cassation est donc simplificatrice. En dépit de ces avantages, la qualification retenue par la Cour de Cassation peut être critiquée B. La qualification retenue : une qualification réductrice La simplicité apportée par le recours à la méthode de la qualification exclusive peut se révéler réductrice, notamment lorsque l'opération à qualifier déborde le cadre étroit d'une catégorie juridique unique de rattachement. En effet, en ne retenant que l'élément essentiel du contrat, les éléments secondaires de celui-ci sont passés sous silence, et ce, malgré leur existence dans la convention. [...]
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