En l'espèce, la Société d'investissement et de gestion de la Caisse centrale de réassurance, bailleresse d'un immeuble, a fait mettre à un accès un système d'ouverture par digicode ou carte magnétique (l'autre accès en étant déjà équipé) et en a avisé ses locataires. Certains locataires de confession juive ne pouvant utiliser ce système électrique durant le sabbat, ils ont assigné la bailleresse pour la faire condamner à poser une serrure mécanique aux entrées de la résidence et de leur immeuble et à leur en donner les clefs.
La question qui se pose est donc la suivante : est-il possible d'assujettir le bailleur à l'exécution de travaux et ainsi admettre qu'une règle religieuse puisse créer une obligation alors même que celle-ci n'est pas mentionnée dans le bail ?
[...] Le droit refuse de consacrer le précepte religieux comme une norme collective opposable juridiquement et cet arrêt témoigne de ce refus d'opposabilité, au nom de la force obligatoire du contrat et de l'équilibre (parfois fragile) entre l'intérêt de tous et celui de chacun. [...]
[...] La Cour de cassation casse ce jugement, estimant que les convictions religieuses des preneurs n'entrent pas en compte dans le champ contractuel du bail, c'est-à-dire qu'elles ne font naître aucune obligation à la charge du bailleur : les pratiques dictées par les convictions religieuses des preneurs n'entrent pas, sauf convention expresse, dans le champ contractuel du bail et ne font naître à la charge du bailleur aucune obligation spécifique La question qui se pose est donc la suivante : est-il possible d'assujettir le bailleur à l'exécution de travaux et ainsi admettre qu'une règle religieuse puisse créer une obligation alors même que celle-ci n'est pas mentionnée dans le bail ? La Cour de cassation a donc donné une réponse négative. [...]
[...] Cour de cassation, troisième chambre civile décembre 2002 - le champ contractuel du bail Les obligations du bailleur d'habitation Commentaire d'arrêt : Civ. 3è décembre 2002 Afin de coller au mieux aux particularités de chaque situation, le droit des contrats autorise l'insertion de clauses spécifiques si les parties parviennent à un accord. Cependant, il peut arriver que des obligations soient implicitement déduites par le juge, lorsque l'économie générale du contrat obéit à des textes dont les formulations peuvent parfois être floues. [...]
[...] Les dépenses liées au gardiennage et à la sécurité (équipements de protection contre l'incendie, de fermeture ou de contrôle d'accès) sont à la charge du propriétaire, car elles correspondent à l'obligation d'assurer une jouissance paisible du bien au preneur. Cette obligation ne cesse qu'en cas de force majeure. Les locataires des appartements appartenant à la Société d'investissement et de gestion de la Caisse centrale de réassurance auraient peut-être pu invoquer, pour obliger la bailleresse à remplacer les digicodes par des serrures mécaniques, le motif de la violation de leur jouissance paisible du bien loué. [...]
[...] Mais la Cour de cassation décide qu'il faut faire prévaloir la force obligatoire du contrat sur la protection de la liberté de culte des cocontractants. Les pratiques religieuses d'une des parties ne peuvent créer des obligations à la charge d'un cocontractant que dans la mesure où elles ont été introduites dans le champ contractuel par une clause expresse. Or, en l'espèce, aucune clause du contrat ne prévoyait expressément l'incorporation au contrat des convictions religieuses des preneurs et des obligations religieuses qui en découlent. [...]
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