Source d'un débat doctrinal perpétuel, les conditions de la force majeure, permettant une exonération de responsabilité d'un débiteur, évoluent constamment. Suivant une partie de la doctrine, les tribunaux français ont récemment adopté une position assez stricte en exigeant à la fois un caractère irrésistible ainsi qu'un caractère imprévisible.
L'arrêt du 30 octobre 2008 rendu par la première chambre civile est une illustration de la nouvelle position des juges français quant aux conditions nécessaires de la force majeure. En l'espèce, la société Figeac Aéro est victime de coupures d'électricité nécessaire à son activité industrielle. Assigné en paiement de factures arriérées, la victime demande reconventionnellement indemnisation de son préjudice auprès d'EDF, fournisseur d'électricité et auteur du dommage. Pour excuser sa faute, l'auteur du dommage invoque un mouvement social qui l'a empêché d'exécuter convenablement son obligation.
Un événement irrésistible, mais prévisible peut-il constituer un cas de force majeure ?
[...] Traditionnellement, trois conditions étaient nécessaires : il fallait un événement imprévisible, irrésistible et extérieur. L'irrésistibilité implique que l'agent n'ait pas pu résister à l'événement. Il est insurmontable. Cela exclut un simple empêchement ou une simple difficulté. De plus, l'événement doit être imprévisible. En effet, la jurisprudence considère que si l'événement est prévisible, on peut prendre certaines précautions pour empêcher que l'événement ne se réalise ou pour éviter que les conséquences dommageables de l'événement ne se produisent. Enfin, l'événement doit être extérieur à la personne mise en cause. [...]
[...] La prévisibilité d'un événement irrésistible devrait donc inciter le débiteur à renoncer au contrat. A défaut, il commettrait une imprudence fautive Il est alors juste de condamner ce comportement fautif et d'écarter la force majeure. Pour revenir à l'arrêt, la grève constitue a priori un cas de force majeure puisque imprévisible lors de la conclusion du contrat, bien que prévisible lors de son exécution, et irrésistible lors de son exécution. La cour de renvoi pourrait donc exonérer le fournisseur EDF de sa responsabilité. [...]
[...] En effet, par cet arrêt, la première chambre civile met fin à sa résistance quant à la non-exigence de la condition d'imprévisibilité. Elle fait acte d'allégeance à la formation la plus solennelle de la haute juridiction judiciaire pour reprendre les termes de Philippe Brun et Olivier Gout, professeurs à l'Université de Savoie. Mais surtout, cet arrêt constitue une clarification de la position de la Cour de cassation : il exprime clairement la nécessité de la réunion de deux conditions - l'imprévisibilité et l'irrésistibilité - de façon cumulative. [...]
[...] Des circonstances internes à l'agent sont désormais retenues comme force majeure (c'est notamment le cas de la maladie). Néanmoins, encore faut-il que l'événement soit imprévisible. En effet, un conducteur qui prendrait son véhicule sachant qu'il avait une forte probabilité de faire un arrêt cardiaque, si le risque se réalise, il est certain que la force majeure ne serait pas retenue. Ce serait commettre une imprudence fautive qui exclurait la force majeure. Cet arrêt confirme l'abandon du critère d'extériorité ; la Cour de cassation n'y fessant même pas illusion. B. [...]
[...] Il n'y a lieu à aucun dommages et intérêts lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit. Elle est donc d'une efficacité redoutable, car elle écarte totalement la responsabilité de l'agent. Pour entrainer un tel effet, il est nécessaire de poser des conditions. Celles-ci ont largement évolué au gré de la jurisprudence, soutenue par la doctrine. [...]
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