En l'espèce de l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation, la demanderesse a vendu aux enchères publiques cinquante photographies de Baldus au prix unitaire de 1000 francs dont le défendeur s'est portée acquéreur pour la totalité des lots. Trois années plus tard, la demanderesse retrouve le défendeur dans le but de lui vendre quatre-vingt-cinq photos de plus, à un prix similaire au prix de vente aux enchères, mais néanmoins fixé par elle. Ultérieurement à la vente, la demanderesse se rend compte de la valeur substantielle de ses photos et de leur vente à un prix dérisoire.
En l'espèce de l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 27 février 1996, le défendeur, président d'une société, a racheté des actions à une associée (la demanderesse). Dans le même temps, le défendeur a vendu pour le compte de la demanderesse des actions à des tiers acquéreurs, pour un total de 3 321 actions au prix unitaire de 3 000 francs. L'acte de vente stipulait que si l'acquéreur cédait dans les deux ans les actions achetées, pour un montant supérieur à 3 500 francs, il devrait partager la plus-value au-delà de ce montant avec le cédant. Quatre jours plus tard, les actions étaient revendues à une société au prix unitaire de 8 800 euros.
Le problème de droit commun rapporté devant les chambres distinctes de la Cour de cassation était notamment de savoir s'il existait une obligation d'information de la part de l'acquéreur à l'égard du vendeur ou plus précisément, le silence de l'acquéreur aboutissant à un manque à gagner du cédant est-il constitutif d'une réticence dolosive ?
[...] Appel est interjeté devant la Cour d'appel de Versailles, le 5 décembre 1997, accueillant la demande et condamnant le défendeur au paiement de la somme de francs, représentant la restitution en valeur des photos vendues lors des ventes de gré à gré. La CA a considéré, pour retenir le dol, que l'acquéreur savait qu'il contractait à un prix dérisoire et manquait ainsi à son obligation de contracter de bonne foi, incitant ainsi la demanderesse à conclure une vente qu'elle n'aurait pas envisagée dans ces conditions. [...]
[...] Cour de cassation, première chambre civile mai 2000 et chambre commerciale février 1996 - l'obligation d'informations et la réticence dolosive Selon William James Il y a peu de différence entre un homme et un autre, mais c'est cette différence qui est tout L'illustration de cette affirmation, transposée, le cas échéant, au domaine juridique, peut être perçue par deux arrêts rendus, l'un, par la première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 3 mai 2000 et l'autre, par la Chambre commerciale en date du 27 février 1996. [...]
[...] Pourtant, les juges du fonds aboutissant dans les deux cas à la conclusion d'une réticence dolosive se voient censurés par la première Chambre civile tout en étant maintenus par la Chambre commerciale. A première vue, il serait tentant de conclure à un revirement de jurisprudence ou tout du moins à des signaux forts envoyés par la première Chambre civile à la Chambre commerciale dans un souci de révision de sa position et d'unification de la jurisprudence. En effet, la bonne foi des acquéreurs fait défaut dans les deux espèces, les deux achetant à un prix qu'ils savent dérisoire. [...]
[...] Néanmoins, la Cour régulatrice, dans le contrôle de l'application de ces principes, dégage des solutions diamétralement opposées en ce qu'elle casse l'une des décisions des juges du fonds pour maintenir l'autre. Des solutions divergentes dans l'application de principes similaires La clé des solutions réside dans l'énoncé de l'article 1116 du Code civil et de son interprétation par la Haute juridiction. En effet, l'article suscité dispose Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. [...]
[...] Néanmoins, à travers ces deux arrêts la tendance semble vouloir s'inverser puisqu'il est demandé à la Cour régulatrice de se prononcer sur l'existence d'une obligation d'information à la charge de l'acquéreur. L'intérêt d'une réponse à une telle interrogation se justifie par l'éventuelle concentration entre les mains d'un acquéreur, d'éléments d'information essentiels sur la chose convoitée, notamment sur sa valeur, qu'il provoquerait la vente à son avantage en ne les divulguant pas au cédant, aboutissant sur un manque à gagner substantiel du vendeur, faute d'une juste considération de la valeur de sa chose. [...]
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