L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 3 juillet 1996 est emblématique de la tendance à la « subjectivisation » de la cause dans le contrat. Tout commence lorsque monsieur et madame Y concluent un contrat avec la société DPM en vue de la création d'un « point vidéo club » dans leur petit village. Cependant, du haut de ses 1314 habitants, le village est loin d'apporter la clientèle espérée par monsieur et madame Y. Aussi ces derniers éprouvent rapidement certaines difficultés à respecter leur engagement vis-à-vis de la société DPM.
La Cour de cassation s'est demandé si l'on peut considérer comme dépourvu de cause un contrat dénué d'utilité concrète car impossible exécuté selon l'économie voulue par les parties ?
Il en résulte « qu'ayant relevé que, s'agissant de la location de cassettes vidéos pour l'exploitation d'un commerce, l'exécution du contrat selon l'économie voulue par les parties, était impossible , la Cour d'Appel en a exactement déduit que le contrat était dépourvu de cause, dès lors qu'était ainsi constaté le défaut de toute contrepartie réelle à l'obligation de payer le pris de location des cassettes, souscrite par monsieur et madame Y dans le cadre de la convention de création d'un « point club vidéo ». Cet arrêt intervient alors que la tendance contractuelle est à la subjectivisation de la cause.
[...] En l'espèce, c'est la cause subjective qui est retenue par la Cour d'Appel qui dispose que le mobile déterminant de l'engagement de ces derniers [les épouxY] était la diffusion certaine de cassettes auprès de leur clientèle. La jurisprudence invoque fréquemment la licéité de la cause en se référant à cette conception, c'est-à-dire au motif déterminant de l'engagement. Elle a toutefois admis que ce mobile devait être commun aux deux parties. Or, en l'espèce la conception subjective est utilisée afin d'invoquer une absence de cause dans le contrat. Ainsi, ni la conception objective, ni la subjective ne sont utilisées en l'espèce. [...]
[...] Cependant, du haut de ses 1314 habitants, le village est loin d'apporter la clientèle espérée par monsieur et madame Y. Aussi ces derniers éprouvent rapidement certaines difficultés à respecter leur engagement vis-à-vis de la société DPM. Ainsi, une action en justice est démarrée, puis un jugement rendu en première instance. Le 17 mars 1994, la Cour d'appel de Grenoble annule le contrat litigieux conclu entre la société de vidéo et les époux Y. Insatisfaite, la société forme un pourvoi en cassation. Ce dernier est rejeté par l'arrêt du 3 juillet 1996 qui confirme celui de la Cour d'appel. [...]
[...] En second lieu, Larroumet critique le phénomène de subjectivisation comme une tentative de réduire la cause à une notion unitaire vouée à l'échec. En effet, le projet de réforme du droit des contrats de 2008 a soulevé la question de la suppression de la cause face à la montée en puissance de l'intérêt réel du contrat. Ce remplacement de notion ne peut résoudre le conflit entre conceptions objective et subjective toujours selon Larroumet. [...]
[...] Cependant la définition du lien de causalité entre la société de cassettes et les époux dans le contrat en question, retenue par la Cour d'Appel afin de démontrer une absence de cause n'est en aucun point objective. En effet, c'est en ce premier aspect qu'est décelé un pas de la jurisprudence vers une évolution de la conception de la cause. La conception moderne Une conception moderne de la cause introduit la cause subjective en réaction à la théorie classique objective. Elle est issue de critiques formées envers cette théorie jugée fausse et inutile, notamment par l'œuvre de Planiol. [...]
[...] Il en résulte qu'ayant relevé que s'agissant de la location de cassettes vidéos pour l'exploitation d'un commerce, l'exécution du contrat selon l'économie voulue par les parties, était impossible , la Cour d'Appel en a exactement déduit que le contrat était dépourvu de cause, dès lors qu'était ainsi constaté le défaut de toute contrepartie réelle à l'obligation de payer le pris de location des cassettes, souscrite par monsieur et madame Y dans le cadre de la convention de création d'un point club vidéo Cet arrêt intervient alors que la tendance contractuelle est à la subjectivisation de la cause, c'est-à-dire qu'en utilisant certains aspects des notions traditionnelles de la cause, cette dernière se voit assigner un rôle nouveau Un pas vers une conception nouvelle de la cause Face au phénomène de la subjectivisation de la cause, les formes traditionnelles objectives et subjectives de la cause sont écartées en l'espèce. Une conception classique originelle La conception classique de la cause trouve son origine chez Domat et prône la cause objective. Il s'agit d'une notion abstraite, identique à chaque type de contrat, qui privilégie la raison immédiate de l'engagement. En l'espèce, comme le rappelle la société DPM, il s'agit d'un contrat synallagmatique, conclu avec les époux Y. [...]
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