Le silence du Code civil sur les qualités substantielles d'une oeuvre d'art a conduit le pouvoir réglementaire à les déterminer dans le décret du 3 mars 1981. Celui-ci a justement été appliqué dans l'arrêt rendu, par la première chambre civile de la Cour de cassation, le 27 février 2007. Un couple se porte acquéreur, lors d'une vente aux enchères publiques, d'une œuvre d'art. Dans le catalogue d'objets d'art, sa dénomination est suivie uniquement et immédiatement de la référence à la période historique sous laquelle elle a été effectuée.
Ceci garantissait aux acquéreurs le fait qu'elle avait bien été réalisée sous cette période. Toutefois, à la suite de cette vente, les acquéreurs découvrent finalement, par le biais d'experts, que l'authenticité de l'œuvre était fausse. Ils exercent alors une action en nullité pour erreur sur la substance.
Les mentions erronées, utilisées par le vendeur concernant la période historique pendant laquelle l'œuvre a été produite, suffisent-elles à établir une erreur sur la substance de l'objet du contrat ?
[...] Or, en acceptant, sur la base de ce décret une telle action, la Cour de cassation permet à la nullité pour erreur de ne plus être le fondement de l'irresponsabilité des intermédiaires. L'arrêt rendu le 15 novembre 2005 par la première chambre civile de la Cour de cassation est un exemple. Dans cette affaire, un commissaire priseur a été condamné à verser des dommages et intérêts à l'acquéreur, pour n'avoir pas fait figurer dans le catalogue d'œuvres d'art, l'auteur effectif de l'œuvre offerte à la vente, sa définition ayant été consacrée par le décret du 3 mars 1981. [...]
[...] La cour d'appel, par un arrêt du 13 octobre 2003 les déboute en invoquant le fait que l'incertitude des experts quant à l'authenticité de l'œuvre ne permettait pas d'accueillir une action en nullité pour erreur sur la substance, cette dernière n'étant ainsi pas établie. Les acquéreurs décident alors de se pourvoir en cassation contre les deux arrêts des cours d'appel. Ils font grief aux arrêts d'avoir débouté leur action en nullité alors même que l'existence d'une erreur sur la substance est établie. En effet, l'authenticité de l'œuvre leur ayant été garantie au moment de la vente, alors même qu'elle était inexacte, suffit à entrainer une erreur sur la substance, leur conviction, au moment de la vente, ayant été erronée. [...]
[...] Cette solution parait tout à fait compréhensible dans la mesure où pour qu'une action en nullité pour erreur sur la substance soit valable, il faut la réunion de deux conditions. Tout d'abord, il faut que l'élément en cause soit une qualité substantielle de la chose, sa substantialité devant être prouvée par la personne qui allègue l'erreur. De plus, les deux parties doivent avoir considéré cet élément comme substantiel. Autrement dit, la connaissance du caractère substantiel de l'erreur doit être commune. [...]
[...] L'apport du décret du 3 mars 1981 La solution apportée par la Cour de cassation, dans cet arrêt du 27 février 2007, permet, en faisant application du décret du 3 mars 1981, de faciliter la preuve des demandeurs à l'action en nullité pour erreur sur la substance de l'objet du contrat. En effet, en l'espèce, les demandeurs n'ont pas eu à démontrer que l'erreur qui avait été commise, avait été déterminante de leur consentement, autrement dit qu'elle était substantielle, mais simplement qu'il y avait eu erreur. [...]
[...] Par ailleurs, la primauté du décret du 3 mars 1981, consacrée par la Cour de cassation, implique la sécurité juridique des transactions. En effet, le décret du 3 mars 1981 sur la répression des fraudes en matière de transactions d'œuvres d'art et d'objets de collection, en apportant des définitions précises à un vocabulaire régulièrement utilisé par les professionnels, fixe les obligations de ces derniers, obligations que les acquéreurs sont en droit d'exiger. La transparence est ainsi assurée, celle- ci clarifiant la situation entre professionnels, mais de plus, rendant accessible le marché de l'art aux néophytes, ces derniers pouvant désormais contracter tout en étant munis de garanties sur l'œuvre acquise qui, si elles font défaut, suffisent à justifier l'action en nullité. [...]
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