Il faut distinguer le préjudice certain, réparable, du préjudice éventuel, non réparable. La perte de chance est un intermédiaire entre ces deux types de préjudices, et l'arrêt de la première chambre civile du 2 avril 2009 va nous donner une illustration des éléments nécessaires à sa réparation.
En l'espèce, un litige a opposé un particulier à la société de crédit Cetelem qui avait présenté une demande de remboursement à ce dernier. L'avocat a mené le procès sans assigner en garantie la société d'assurance Cardif et l'appel du particulier a été rejeté par la cour d'appel. Le client poursuit donc son avocat pour manquement à son devoir de diligence et perte de chance de gagner son procès. Le 7 novembre 2007, la Cour d'appel de Besançon accueille sa demande en confirmant le manquement fautif de l'avocat à son devoir de diligence, ce manquement conduisant à une perte de chance pour le particulier de voir ses prétentions soumises à un débat judiciaire et à un examen par la juridiction saisie de la demande de remboursement présentée par la société Cetelem.
[...] Ce principe avait déjà été affirmé dans un arrêt de la première chambre civile du 16 juillet 1998 par exemple, ou la cour de cassation avait énoncé que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée La cour de cassation a même défini une méthode afin de procéder à la détermination de la réparation : il faut tout d'abord évaluer le préjudice plein c'est-à-dire ce que la victime a perdu en imaginant que la chance était certaine d'être réalisée, puis l'affecter d'un coefficient de proportionnalité à la probabilité que la chance se réalise. L'article 1346 de l'avant-projet Catala dispose également que la perte d'une chance constitue un préjudice réparable distinct de l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée Cependant, ce principe d'évaluation du préjudice peut être critiquable, puisque cette réparation partielle qui en résulte ne replace pas la victime dans la situation où elle était avant la perte de sa chance, contrairement aux réparations totales qui ont lieu lorsque le dommage est certain. [...]
[...] La cour de cassation va alors devoir déterminer si la réparation de la perte de chance subie par le particulier par son avocat était justifiée. La cour de cassation, retenant le manquement fautif de l'avocat à son devoir de diligence, casse cependant l'arrêt du 7 novembre 2007 partiellement, énonçant que la cour d'appel de Besançon avait privé sa décision de base légale, n'ayant pas fait l'effort d'examiner le préjudice causé par la perte de chance. Ainsi, la cour de cassation rappelle les conditions de la perte de chance mais également la nécessité de l'évaluation du préjudice causé par cette perte de chance : L'éventualité favorable du succès du procès: condition à la réparation de la perte de chance Dans cet arrêt, la cour de cassation justifie la cassation de l'arrêt de la cour d'appel du 7 novembre 2007 par l'absence de preuve du caractère favorable du succès éventuel du procès A : Une condition à la réparation de la perte de chance: la disparition certaine d'une éventualité favorable Dans cet arrêt du 2 avril 2009, la cour de cassation rappelle une condition indispensable à la réparation de la perte de chance : la disparition certaine et actuelle d'une éventualité favorable. [...]
[...] Le fait de reconstituer fictivement la discussion entre le particulier, la société de crédit et la société d'assurance amène à penser à l'évaluation du préjudice, que la cour de cassation évoque : Une nécessité : l'évaluation du préjudice causé par la perte de chance La cour de cassation évoque en effet dans son arrêt le fait d' évaluer le préjudice pouvant résulter de la faute de l'avocat Cette notion d'évaluation est très importante, car c'est elle qui va déterminer la réparation du préjudice causé par la perte de chance car le principe est que la réparation du préjudice causé par une perte de chance n'est pas totale, et ce principe évoqué implicitement par la cour de cassation suit la jurisprudence antérieure même s'il peut être critiqué A : L'évaluation du préjudice : une nécessité pour la réparation La cour d'appel a condamné l'avocat à verser des dommages et intérêts d'une somme de 10000 au particulier. La cour de cassation a pourtant cassé ce jugement, énonçant qu'il fallait rechercher s'il existait une chance sérieuse de succès du procès afin d'évaluer le préjudice résultant de la faute de l'avocat. [...]
[...] Le 7 novembre 2007, la cour d'appel de Besançon accueille sa demande en confirmant le manquement fautif de l'avocat à son devoir de diligence, ce manquement conduisant à une perte de chance pour le particulier de voir ses prétentions soumises à un débat judiciaire et à un examen par la juridiction saisie de la demande de remboursement présentée par la société Cetelem. L'avocat est alors condamné au versement de dommages et intérêts d'une somme de euros, et ce, même si la cour d'appel a retenu que les prétentions du particulier à une garantie intégrale et le succès judiciaire du procès avec la société Cetelem étaient hypothétiques. Un pourvoi en cassation est formé. [...]
[...] Dans l'arrêt de la première chambre civile du 21 novembre 2006, la cour énonce que seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable Donc il paraît normal que la cour de cassation casse l'arrêt rendu par la cour d'appel de Besançon si elle a condamné l'avocat à verser des dommages et intérêts pour la faute qu'il a commise et qui a entraîné pour le particulier la perte de chance de gagner le procès, sans avoir démontré le caractère favorable de l'éventualité du succès du procès B : Une conséquence : la cassation de l'arrêt de la cour d'appel La cour a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Besançon du 7 novembre 2007 au motif qu'elle avait privé sa décision de base légale, en ne recherchant pas s'il existait une chance sérieuse de succès de l'action en garantie que l'avocat avait été chargé d'engager contre la société d'assurance. En matière de responsabilité contractuelle ou délictuelle, la victime doit prouver avoir subi un préjudice certain pour le voir réparé. [...]
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