Cour de Cassation, 3 novembre 1992, bonne foi, British Petroleum, révision du contrat, dommages et intérêts, jurisprudence, canal de Craponne
M. Huard a conclu avec la société British Petroleum (BP) un contrat de « distribution agréé » pour une durée de 15 ans, prenant effet dès 1971, lui réservant une exclusivité en matière d'achats de produits pétroliers. En contrepartie de ces engagements, cette dernière mettait à sa disposition un ensemble de matériels de distribution et lui consentait, une avance de 471.000 Francs, amortissable pendant la durée du contrat, qui était de quinze ans. Mais 10 ans après le début des effets du contrat, M. Huard doit encore rembourser 346.000 Francs sur les 471.000 qu'il était censé rembourser en quinze ans, alors le contrat fut prorogé de 5 ans en 1981. Cependant un imprévu survint : jusqu'en 1982, les prix de vente des produits pétroliers au détail avaient été fixés par les pouvoirs publics. Mais un arrêté du 9 novembre 1983 relatif aux prix de vente des produits pétroliers au détail, libéra les prix de vente, et autorisa les distributeurs à consentir, par rapport au prix plancher fixé par les pouvoirs publics, un rabais à la pompe de 16 centimes par litre d'essence et de 17 centimes par litre de supercarburant. Cela n'améliora pas la situation de M. Huard, qui assigna la société BP en paiement de 250.000 Francs à titre de dommages et intérêts.
Un contrat peut-il être modifié par voie judiciaire suite à une imprévision ?
[...] Alors, la bonne foi n'est pas utilisée dans son sens moral, mais comme le moyen de faire produire au contrat son effet utile. Un arrêt laissant un précédent dans la jurisprudence française Depuis quelques années, certains arrêts avaient toutefois amorcé sinon un revirement, du moins, un infléchissement de cette jurisprudence du canal de Craponne , en incitant les parties à renégocier le contrat en cas de modification du contexte, sur le fondement non pas de la théorie de l'imprévision, mais de la bonne foi et de l'équité, lorsque cette évolution du contexte rend le contrat ruineux pour l'une des parties La Cour semble limiter le champ d'application de la théorie de l'imprévision aux seuls cas extrêmes où le changement des circonstances économiques ne crée pas un simple déséquilibre dans le contrat, mais prive une obligation contractuelle de toute contrepartie réelle et donc de toute cause . [...]
[...] Huard, qui assigna la société BP en paiement de 250.000 Francs à titre de dommages et intérêts. Un contrat peut-il être modifié par voie judiciaire suite à une imprévision ? La Cour de cassation répondra que dans ce cas précis, c'est possible. L'opposition de deux théories irréconciliables La jurisprudence du Canal de Craponne et la philosophie du principe qui en découle Avec la jurisprudence du Canal de Craponne , les magistrats suivent l'idée que contracter c'est prévoir et que la révision du contrat en cours d'application revient aux contractants aux moyens de clauses conventionnelles d'adaptation. [...]
[...] De plus, cela permet d'avoir un contentieux à peu près inexistant en la matière. La théorie de l'imprévision Des pays n'acceptaient pas l'imprévision puis ont changé de position suite à une jurisprudence, c'est le cas de l'Allemagne, l'Espagne, la Suisse et la Grande-Bretagne, les comparatistes contestaient alors la position française, analysant le droit français comme un droit isolé, périmé, passéiste et désuet sur ce sujet. Les pays ayant appliqué la théorie de l'imprévision n'ont pas souffert de l'instabilité tant redoutée. Puis les solidaristes sont apparus et se sont prononcés comme favorables à l'imprévision. [...]
[...] En tout cas, sous l'égide de cette bonne foi très conquérante, la voie de la révision du contrat pour imprévision a sans doute été un peu plus dégagée par cet arrêt. Conclusion Toutefois, la Cour de cassation ne posera pas de règle acceptant l'imprévision s'appliquant à tous les contrats, malgré les prévisions des solidaristes voyant cet arrêt comme précurseur d'une future décision posant un cadre plus large à l'application de l'imprévision, il faudra attendre la réforme du droit des obligations de 2016 et une loi brisant sa jurisprudence constante pour que la théorie de l'imprévision soit acceptée. [...]
[...] Cour de Cassation, chambre commerciale novembre 1992 La bonne foi au service de la révision du contrat par le juge M. Huard a conclu avec la société British Petroleum un contrat de distribution agréé pour une durée de 15 ans, prenant effet dès 1971, lui réservant une exclusivité en matière d'achats de produits pétroliers. En contrepartie de ces engagements, cette dernière mettait à sa disposition un ensemble de matériels de distribution et lui consentait, une avance de 471.000 Francs, amortissable pendant la durée du contrat, qui était de quinze ans. [...]
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