Il est question en l'espèce d'une cession d'un fonds de commerce consentie par le gérant de la société Hôtel café des sports, le débiteur, à son épouse, le tiers défendeur à l'action. Le trésorier principal de Montrouge, le créancier du débiteur et demandeur à l'action, avait alors assigné le tiers pour faire juger que la vente, consentie en fraude de ses droits, lui était inopposable. La cour d'appel de Versailles, en date du 13 mars 1992, avait accueilli la demande du créancier.
Un critère purement quantitatif, le prix, peut-il conduire à exclure du champ d'application de l'action paulienne les actes à titre onéreux conclus à des conditions normales ? Autrement dit, selon quels critères sont appréciés la condition d'appauvrissement et d'insolvabilité du débiteur ?
[...] L'action paulienne concerne alors trois personnes : le créancier demandeur, le débiteur, auteur de la fraude alléguée, et le tiers, partie à l'acte contesté et défendeur à l'action. La Cour de cassation énumère les différentes conditions relatives à chacun des «acteurs» de l'action paulienne. En effet, s'agissant du créancier, du débiteur ou du tiers, des conditions leur sont propres. Selon la Cour de cassation, le créancier dispose de l'action paulienne lorsque la cession a pour but de faire échapper un bien à ses poursuites S'agissant du créancier, les conditions d'exercice de l'action tiennent à la créance dont il se prévaut et au préjudice qu'il allègue. [...]
[...] La cour d'appel de Versailles, en date du 13 mars 1992, avait accueilli la demande du créancier. Le tiers se pourvoit alors en cassation aux motifs que l'action paulienne n'est recevable que si le créancier justifie que l'acte incriminé lui a causé un dommage en créant un appauvrissement du débiteur. Le tiers reproche à l'arrêt d'avoir retenu l'appauvrissement du débiteur uniquement selon le fait qu'il ait vendu le fonds de commerce en question à un prix inférieur à son prix d'achat sans avoir caractérisé qu'au jour de la vente, le fonds de commerce avait conservé sa valeur initiale et, alors, que le débiteur n'avait pas l'intention de s'appauvrir au regard de son créancier et n'avait pas, par conséquent, l'intention de lui nuire. [...]
[...] Ici, elle fait référence à la condition tenant au tiers qu'est la complicité dans la fraude, c'est-à-dire sa mauvaise foi. le préjudice : base de la recevabilité de l'action paulienne Il paraît évident que le créancier ne peut se prévaloir d'une fraude à ses droits que si et dans la mesure où l'acte prétendument frauduleux lui porte préjudice. Si tel n'est pas le cas tout intérêt à agir fait défaut. En l'espèce, la société dont le débiteur était le gérant était son seul élément d'actif garantissant la créance et, de ce fait, le créancier n'avait plus l'opportunité d'exiger du débiteur le remboursement de sa créance puisqu'il est insolvable, la société cédée étant son seul élément d'actif. [...]
[...] La Cour de cassation continue d'assouplir cette condition et en vient même à l'écarter entièrement lorsque l'acte argué de fraude a compromis un droit préférentiel du créancier demandeur. En agissant de la sorte, la Cour de cassation attribue à l'action paulienne une autre fonction que celle de préservation du droit de gage général : la jurisprudence déclare ainsi recevable l'action paulienne sans que le débiteur se soit réellement appauvri ou rendu insolvable s'il a compromis néanmoins le privilège du titulaire d'une sureté réelle ( Civ.1re juillet 1995). [...]
[...] Un critère purement quantitatif, le prix, peut-il conduire à exclure du champ d'application de l'action paulienne les actes à titre onéreux conclus à des conditions normales ? Autrement dit, selon quels critères est appréciée la condition d'appauvrissement et d'insolvabilité du débiteur ? La Cour de cassation définit l'action paulienne en ce que le créancier dispose de celle-ci lorsque la cession a pour effet de faire échapper un bien à des poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler et plus difficiles à appréhender Elle ajoute dans son argumentation le critère de garantie de créance que constituait la société et qui favorisait la fraude ainsi que la nécessaire connaissance de l'opération par le tiers, son épouse caractérisant ainsi sa mauvaise foi. [...]
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