Arrêt n° 2213 702 du 13 septembre 2023, prescription extinctive, suspension de prescription, article 2234 du Code civil, article 17 de la DDHC, recouvrement de créances, procédure de sauvegarde judiciaire, liquidation judiciaire, créance litigieuse, lois d'extinction, arrêt du 29 mai 2001, article 6 de la CEDH, ancien article 2210-1 du Code civil, loi du 17 juin 2008
En l'espèce, la société Satem a été placée en sauvegarde judiciaire le 12 avril 2013, un mandataire judiciaire ayant été nommé à cet effet. Par un jugement du 16 septembre 2014, un plan de sauvegarde est arrêté et le mandataire judiciaire devient commissaire à son exécution. Un jugement du 12 avril 2016 prononce la résolution du plan de sauvegarde et place la société Satem en liquidation judiciaire : le mandataire judiciaire est ainsi révoqué de ses fonctions et remplacé par une SARL (l'ancien mandataire judiciaire faisant partie de la SARL est désigné en qualité de liquidateur judiciaire). Le 25 mai 2016, la société Sogea déclare à la procédure une créance de 300 000 euros née d'un avenant signé le 24 mars 2014, faisant suite à un protocole d'accord conclu en 2011. Par une lettre recommandée du 12 août 2016, le liquidateur conteste cette créance, car elle résulterait d'un accord conclu sans l'autorisation du juge-commissaire. Le 29 novembre 2018, le liquidateur assigne les sociétés Satem et Sogea devant le tribunal de la procédure collective pour obtenir l'annulation de l'avenant.
[...] Il s'agit donc de déterminer si, dans le cas d'espèce, le liquidateur a pu bénéficier de ce droit à la suspension. En effet, selon l'article précité, la prescription ne Court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure. Cet empêchement légal ouvre droit à la suspension de la prescription tel que cela a pu être illustré dans un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 4 décembre 2013. [...]
[...] Selon l'article 2219 précité, la prescription extinctive est le délai au terme duquel le créancier ne peut plus agir en justice pour faire valoir son droit de créance. Son effet est d'éteindre le droit d'agir du créancier et de libérer le débiteur de sa dette sans pour autant effacer le délai déjà Couru d'après l'article 2230 du Code civil : comme le rappelle la Cour de cassation dans un arrêt rendu en sa première chambre civile le 29 mai 2001, la prescription extinctive est donc le mode d'extinction d'une créance par l'écoulement du temps. [...]
[...] Wiederkehr dans son article Conflits de lois dans le temps et dans l'espace en matière de prescription, la suspension ne joue que si le délai de prescription n'était pas écoulé au jour de l'ouverture de la procédure. En l'espèce, le liquidateur disposait encore d'un délai suffisant, de sorte que l'article 2234 ne lui était d'aucune utilité. Cette interprétation stricte de la portée de la suspension se justifie au regard du but poursuivi par le législateur. En effet, l'objectif est d'empêcher l'écoulement du délai pendant la procédure collective, lorsque le créancier ne peut agir du fait de l'ouverture de celle-ci. [...]
[...] Une inapplication justifiée de l'article 2234 du Code civil L'appréciation décisive de la notion de délai utile pour agir L'arrêt commenté se fonde sur la notion de « délai utile pour agir » pour écarter l'application de l'article 2234 du Code civil dans le cas d'espèce. L'appréciation de ce délai utile est donc décisive pour la solution retenue. Le délai utile correspond au temps nécessaire au créancier pour exercer son action en justice après la cessation de l'empêchement qui suspendait la prescription : il doit être apprécié in concreto en fonction des circonstances de chaque espèce. [...]
[...] Une décision proportionnée à l'harmonisation de la suspension Dans cet arrêt, la prescription liée à l'ouverture de la procédure collective puis à la désignation du liquidateur judiciaire est le centre du sujet. La décision permet ainsi d'harmoniser l'application de la prescription malgré ces interruptions. Ainsi, il ne faut pas percevoir les suspensions et les interruptions comme visant à déséquilibrer le rapport entre les parties en permettant à la partie de profiter de cette mise en pause de la prescription : en effet, un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 13 février 2020 rappelle que la durée totale de la suspension de l'article 2234 du Code civil ne pourrait pas excéder la durée de dix ans, ce qui était auparavant codifié au sein de l'ancien article 2210-1 du Code civil, avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008. [...]
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