Arrêt du 13 juillet 2022, droit des contrats, réforme du droit des contrats de 2016, exécution forcée d'un contrat, principe de proportionnalité, article 1221 du Code civil, non-rétroactivité, ancien article 1143 du Code civil, loi de ratification du 20 avril 2018, exception d'exécution forcée, dommages et intérêts, sécurité juridique des contractants, arrêt du 11 mai 2005, force obligatoire du contrat, article 1103 du Code civil, équilibre du contrat
Le 21 mars 2000, un couple a acquis le lot n° 16 du lotissement de la Haute Garonette. Le 15 décembre 2011, la société civile immobilière Domaine du cap est devenue propriétaire du lot n° 18. Le 12 mars 2008, la société a entrepris la construction légale d'un immeuble de six logements avec piscine.
Le couple a assigné la société pour violation du cahier des charges aux fins d'obtenir la démolition de l'édifice préjudiciable et des dommages et intérêts. Dans une décision du 11 mars 2021, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence rejette la demande du couple pour disproportion manifeste. Le couple forme donc un pourvoi en cassation.
[...] Il est vrai que cet affaiblissement de la force obligatoire peut être considéré, comme le dit Thomas Genicon, docteur en droit, comme un bouleversement des plus grands équilibres du droit des contrats . Cependant, à travers cet arrêt, la Cour de cassation démontre également que la codification stricte par le législateur de l'exception d'exécution forcée permet d'éviter une remise en cause trop libre de la force obligatoire contractuelle. En effet, comme le mentionnent les juges de fond et Haute juridiction, c'est la disproportion excessive , entre le coût de l'exécution forcée et l'intérêt du créancier, qui permet au débiteur de s'acquitter de son obligation, et non un simple déséquilibre. [...]
[...] Ainsi, concernant les arrêts conclus avant la réforme de 2016, la démolition n'est plus considérée comme la sanction automatique au non-respect du cahier des charges. L'application anticipée et partielle de la réforme de 2016 Dans l'attendu le juge dispose que : qu'il était totalement disproportionné de demander la démolition d'un immeuble d'habitation collective dans l'unique but d'éviter aux propriétaires d'une villa le désagrément de ce voisinage, alors que l'immeuble avait été construit dans l'esprit du règlement du lotissement et n'occasionnait aucune perte de vue ni aucun vis-à-vis La Cour de cassation retient le rejet de la demande d'exécution forcée par les propriétaires en énonçant l'existence d'une disproportion manifeste entre le coût de la démolition pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. [...]
[...] Il conviendra de répondre à cette question en analysant tout d'abord le revirement de jurisprudence effectué par la Cour de cassation puis il conviendra d'exposer les enjeux d'une exception à l'exécution forcée (II). Un revirement de jurisprudence justifié par la portée générale du principe d'exigence de proportionnalité Dans cet arrêt soumis à la jurisprudence antérieure, la Haute juridiction opère une application anticipée de l'article 1221 du nouveau Code civil toutefois, son application est partielle Une application anticipée de l'article 1221 du Code civil par la Cour de cassation Dès l'attendu le juge évoque : l'existence d'une disproportion manifeste entre le coût de la démolition pour le débiteur et son intérêt pour les créanciers a pu déduire, de ces seuls motifs, que la demande d'exécution en nature devait être rejetée et que la violation du cahier des charges devait être sanctionnée par l'allocation de dommages-intérêts La Cour retient l'inexécution de la démolition de l'édifice préjudiciable en énonçant la disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. [...]
[...] La force obligatoire attachée à un contrat, consacrée par l'article 1103 du Code civil, engage les parties à exécuter ce qui y est exposé. Par leur consentement au contrat, les parties s'obligent à son exécution. Dans la jurisprudence antérieure à la réforme de 2016, seule l'impossibilité d'exécution de l'obligation constituait une dérogation à la force obligatoire contractuelle, la Cour de cassation ayant toujours refusé d'exclure l'exécution d'une obligation au regard du coût de l'exécution forcée. Dans cet arrêt, la Cour de cassation confirme la décision des juges de fond, considérant la disproportion manifeste comme une dérogation à la force obligatoire contractuelle. [...]
[...] Les juges se fondent donc sur un contrôle de la disproportion manifeste. La mise en œuvre du contrôle de disproportion dans cet arrêt semble apporter davantage de sécurité juridique au débiteur. En effet, dans un rapport au président de la République, il est mentionné que lorsque l'exécution forcée en nature est extrêmement onéreuse pour le débiteur sans que le créancier y ait vraiment intérêt, il apparaît en effet inéquitable et injustifié que celui-ci puisse l'exiger, alors qu'une condamnation à des dommages et intérêts pourrait lui fournir une compensation adéquate pour un prix beaucoup plus réduit . [...]
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